Défense, agriculture, nouvelles technologies, tourisme : la coopération bilatérale s’était accélérée dans la foulée de l’accord de normalisation, signé en décembre 2020 et en contrepartie duquel le Maroc a engrangé les reconnaissances américaine puis israélienne de sa souveraineté sur le territoire disputé du Sahara occidental.

Mais depuis le 7 octobre et l’attaque sanglante du Hamas sur le sol israélien les liaisons aériennes entre Israël et le Maroc ont été suspendues, les touristes israéliens se sont volatilisés comme les investisseurs.

« Du jour au lendemain, il n’y avait plus personne. Les Israéliens qui étaient là se sont sauvés, ils ont eu très peur », relate Michel Cohen, investisseur franco-israélien.

En parallèle, les manifestations pro-palestiniennes, ont repris de l’ampleur, donnant lieu à des appels à une rupture des relations entre le Maroc et Israël.

Depuis le 7 octobre et l’attaque qui a fait 1 200 morts en Israël, le ton de Rabat a évolué : exprimant d’abord sa « profonde préoccupation » et condamnant toute attaque contre des civils, le royaume a fini par dénoncer, le 11 novembre lors d’un sommet arabo-islamique à Ryad, « la persistance d’Israël dans son agression flagrante contre les civils désarmés ». Sans jamais condamner l’attaque du Hamas elle-même.

« Gagnant-gagnant »

« Le Maroc aujourd’hui est dans une situation très délicate », avec d’un côté « un désir profond de maintenir une relation gagnant-gagnant » et « la pression de la rue » de l’autre.

En octobre, l’évacuation du bureau de liaison israélien à Rabat pour des raisons de sécurité a rappelé la rupture des relations en 2000, sur fond de seconde Intifada (soulèvement palestinien).

Rabat avait alors dénoncé la « violence israélienne », causant la fermeture du bureau israélien.

« On va maintenir la relation mais ralentir la cadence des rencontres, des visites ».

Difficile dans ce contexte d’imaginer le royaume accueillir des responsables israéliens de haut niveau et encore moins le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lui-même, dont une visite était pressentie d’ici la fin de l’année.

« Cordon ombilical »

D’après Jamal Amiar, auteur de Le Maroc, Israël et les Juifs marocains, les liens tissés depuis 2020, militaires, sécuritaires et économiques, sont trop forts pour être rompus même si le soutien à la normalisation — qui n’était déjà que de 31 % l’an dernier d’après un sondage du réseau Arab Barometer – a encore baissé.

Une rupture créerait aussi « un désordre diplomatique », notamment avec l’administration américaine, dit-il, rappelant que le soutien sur la question du Sahara occidental était aux yeux de Rabat une « contrepartie énorme » à la normalisation.

M. Amiar préconise que le royaume fasse de sa position délicate « un atout » pour « jouer un rôle plus dynamique » dans les efforts de médiation, misant sur ses liens avec Israël, les pays arabes mais aussi l’importante communauté juive au Maroc, qui en fait un pays unique dans le monde arabe.

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