La coalition a reporté mercredi l’examen d’un projet de loi qui permettrait aux fonctionnaires de conserver l’argent qui leur a été donné pour couvrir des procédures judiciaires ou des dépenses médicales, suite à une menace d’obstruction de la part de l’opposition et suite à des informations qui ont fait état de fortes pressions exercées par les députés de la coalition.

Le projet de loi, largement décrié par les critiques comme étant une législation taillée sur mesure pour répondre aux besoins personnels du Premier ministre Benjamin Netanyahu et dénoncé par le bureau de la procureure générale, qui a considéré qu’il « ouvrait la porte à la corruption dans l’ensemble de la fonction publique », ne fera pas l’objet d’un vote initial comme prévu, dimanche, et il sera repoussé jusqu’à la prochaine session de la Knesset, qui débutera le 30 avril.

Parrainé par le Likud, le parti du Premier ministre, ce projet de loi permettrait à Netanyahu de conserver un don de 270 000 dollars reçu de son défunt cousin et ancien bienfaiteur, Nathan Milikowsky, afin de financer ses frais de justice dans son procès pour corruption en cours. La Haute Cour de justice avait jugé le cadeau « illicite » et elle avait ordonné à Netanyahu de restituer l’argent à la succession de son cousin, ce que le Premier ministre n’a pas encore fait.

Elle permettrait également à Netanyahu de puiser dans les 2 millions de shekels collectés l’année dernière dans le cadre d’une initiative de crowdfunding pour payer ses frais de justice. Le compte a été gelé, dans l’attente d’un avis juridique autorisant Netanyahu à utiliser l’argent.

En outre, le projet de loi permettrait à des centaines de milliers de fonctionnaires israéliens et à leurs familles de recevoir des cadeaux financiers et compliquerait la surveillance de faits potentiels de corruption. Comme l’a déclaré un haut fonctionnaire du ministère de la Justice devant une commission de la Knesset dimanche dernier, cette loi mettrait en place un mécanisme « qui pourra être utilisé à mauvais escient pour dissimuler des infractions pénales ».

Le Likud considère ce projet de loi comme utile pour les fonctionnaires et leurs familles qui ont besoin d’un soutien financier, tandis que les fonctionnaires du ministère de la Justice et l’opposition l’ont dénoncé en affirmant qu’il ouvrait la voie à la corruption, le soupçonnant d’être destiné à bénéficier « directement » à Netanyahu.

Le député Ofir Katz (Likud), qui dirige la commission chargée de préparer la législation pour le vote, avait prévu un vote jeudi matin pour faire avancer le projet de loi en première lecture à la Knesset dimanche prochain.

Mais les députés de la coalition, en particulier ceux des partis ultra-orthodoxes, auraient exigé que le projet de loi, qui sème la discorde, ne soit pas avancé à ce stade, craignant une réaction brutale et faisant valoir que cette démarche ne correspondait pas au récent message de réconciliation du gouvernement, alors qu’un dialogue est engagé avec l’opposition sur le projet très controversé de réforme du système judiciaire.

Des membres des partis Yahadout HaTorah et le Shas, ainsi que d’autres partis, auraient déclaré, selon les médias israéliens, que le fait de soumettre le projet de loi sur les dons au vote « n’est pas une bonne chose », et ils auraient souligné que le leader du Shas, Aryeh Deri, avait accepté de retarder un projet de loi distinct visant à lui accorder un avantage personnel, qui lui permettrait d’être nommé ministre malgré une récente disqualification par la Haute Cour.

Yair Lapid, Benny Gantz, Merav Michaeli et Avigdor Liberman se rencontrant pour coordonner la stratégie de l’opposition face à la réforme du système judiciaire, à Jérusalem, le 13 mars 2023. (Crédit : Yesh Atid)

En outre, le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, et les chefs des autres partis d’opposition ont publié une déclaration commune mercredi après-midi, critiquant la coalition pour avoir imposé une session législative spéciale dimanche, le dernier jour possible avant la fête de Pessah, et menaçant de la perturber.

« Venant s’ajouter au fait que la séance plénière ne se réunit traditionnellement pas la semaine de Pessah, sauf cas exceptionnels, les députés sont maintenant censés voter sur un projet de loi qui pourrait corrompre l’ensemble du secteur public », indique la déclaration.

De plus, l’opposition refuserait de s’engager dans une pratique courante de jumelage, par laquelle les députés de chaque côté de l’allée acceptent mutuellement de sauter un vote lorsque l’un de leurs homologues est inévitablement absent. L’opposition a également menacé de faire obstruction à un projet de loi prévu pour le même jour – demandé par les partis haredim – sur l’amélioration de la sécurité pour le prochain pèlerinage religieux très fréquenté au mont Meron, plutôt que de l’adopter sans heurts par un accord comme prévu.

« Nous insistons sur le fait que nous ne laisserons pas passer cela et que le projet de loi sur les cadeaux corrompus se heurtera à une opposition massive de la part de toutes les factions de l’opposition. Nous suggérons à la coalition de reconsidérer la question et d’empêcher l’adoption du projet de loi sur les dons », a averti le dirigeant de Yesh Atid.

Peu après la menace de l’opposition, les médias israéliens ont déclaré que le projet de loi sur les dons était mis de côté pour le moment.

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