Isaac Herzog assimile les appels au boycott d’Israël « à une nouvelle forme de terrorisme ».

Par |2022-05-18T09:59:41+02:0018 Mai 2022|Catégories : ECONOMIE|

Le boycott, une arme efficace pour faire plier un pays ? Pas vraiment, vu d’Israël

Vu de Tel Aviv

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En Israël, la question du boycott brandi par Américains et Européens pour faire plier Poutine prend une résonance particulière. Régulièrement visé par de tels appels, le pays peut témoigner de l’inefficacité de la pratique… mais sa classe politique n’hésite pas à exploiter la situation.

En imposant un boycott, Américains et Européens espèrent avoir trouvé une arme pour faire plier Vladimir Poutine. Un pari loin d’être gagné à en juger par l’exemple d’Israël. Il ne se passe pas de semaines sans qu’un appel à boycotter l’État hébreu soit lancé. Mais ce pays n’en souffre pas véritablement, ce qui n’empêche pas le gouvernement et des médias de parfois surjouer le péril.

Quelques exemples parmi les plus récents : le conseil des étudiants de la faculté de Melbourne et le journal des étudiants de la prestigieuse université américaine de Harvard ont ces derniers jours proclamé leur soutien à la campagne organisée par BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions). Ces deux informations qui ne concernent qu’un petit groupe d’activistes ont eu un écho immédiat dans les médias. BDS est en effet devenu la bête noire des autorités israéliennes. Cette coalition regroupe 171 organisations palestiniennes soutenues par divers mouvements viscéralement antisionistes étrangers. La mouvance trouve d’ailleurs des soutiens en France, auxquels Marianne a déjà consacré plusieurs articles. Son objectif est de reléguer Israël à un statut d’État paria dont l’isolement est censé déboucher sur la fin à l’occupation des territoires palestiniens. Les responsables espèrent ainsi imiter l’exemple du boycott international, qui a contribué à la chute du régime de l’apartheid en Afrique du Sud.

AXA et Alstom ciblés

L’offensive est menée sur plusieurs fronts. Les entreprises étrangères actives en Israël, les artistes étrangers qui acceptent de s’y produire, les échanges universitaires sont dans le collimateur. Parmi les objectifs récents figurent par exemple AXA, le groupe d’assurance français accusé d’avoir eu dans le passé des intérêts dans une société israélienne d’armement et dans plusieurs banques israéliennes ayant des agences en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Veolia et Alstom ont également été la cible de dénonciations en raison de leur participation à des projets de tramway à Jérusalem et Tel Aviv. Orange a renoncé à un accord de licence avec un opérateur de téléphonie israélien. Ces entreprises ont toutefois catégoriquement nié avoir cédé au moindre appel à un boycott d’Israël qui est d’ailleurs interdit par la loi en France. Ce qui n’a pas empêché les activistes de BDS de crier victoire haut et fort.

Certains pays participent au boycott. Le Koweït a ainsi interdit la diffusion du film Meurtre sur le Nil sous prétexte de la présence de Gal Gadot, une actrice israélienne qui a eu la malencontreuse idée d’effectuer son service militaire obligatoire. Mais le mur du boycott érigé par une bonne partie des pays arabes pendant des décennies s’effondre à la faveur des nouvelles relations diplomatiques avec des pays du Golfe et la lune de miel d’Israël avec le Maroc ou le Soudan.

Impact économique quasi nul

Par ailleurs, les sociétés qui cèdent aux pressions s’exposent à de sérieux problèmes. Airbnb a ainsi renoncé à sa décision de ne plus proposer de logements dans des colonies de Cisjordanie en raison d’une levée de boucliers aux États-Unis. En revanche, le fabricant de glace américain Ben and Jerry’s, qui a décidé de ne plus vendre ses produits en Cisjordanie, a maintenu sa décision malgré les pressions de plusieurs États américains.

Toute la question est en fait de savoir si le boycott ou la menace qu’il fait planer est efficace. Sur le plan strictement économique, une commission du Parlement israélien a estimé que son impact est devenu quasiment nul. Ce constat n’a toutefois pas empêché les autorités d’en faire un cheval de bataille. Le gouvernement a ainsi établi un plan de bataille surnommé « Concert » doté de 60 millions de dollars sur cinq ans pour organiser une contre-offensive sur les réseaux sociaux tels que Facebook, Twitter, Instagram, ainsi dans les médias tout en finançant la tenue de conférences dans le monde.

Pour justifier un tel activisme jugé disproportionné et surtout inefficace par une partie des commentateurs, Isaac Herzog, le président israélien, a été jusqu’à assimiler les appels au boycott « à une nouvelle forme de terrorisme ». D’autres responsables dénoncent une forme d’antisémitisme qui avance masqué. Bref le ressenti reste à vif, quand bien même les appels à isoler Israël ont un impact minime.

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