Un an après sa mort, les mémoires de Shimon Peres viennent de paraître en anglais. Intitulé No Room for Small Dreams (Harper Collins Libri), le livre foisonne d’anecdotes personnelles et dessine la trajectoire hors norme de l’Etat hébreu. La partie la plus fascinante du récit concerne le plus grand tabou israélien : ses capacités nucléaires et la construction de la centrale de Dimona, dans le désert du Néguev, avec l’aide de la France.
L’ancien président israélien, alors directeur général du ministère de la défense, conduisit des négociations secrètes avec Paris. Lui et David Ben Gourion, le père de l’Etat, prirent leur téléphone pour obtenir, de la part de grands donateurs juifs, les fonds nécessaires pour payer le réacteur français.
L’ancien président raconte le survol d’un satellite soviétique au-dessus du chantier, en 1960, et la panique diplomatique qui s’en suivit. Puis son rendez-vous trois ans plus tard à la Maison Blanche avec le président Kennedy, demandant des explications sur le programme nucléaire.
Au fil de ce long effort secret, Israël finit par obtenir un avantage déterminant sur les pays arabes, sans jamais confirmer ou démentir son existence. « Croyant en la capacité d’Israël à les détruire, nos ennemis abandonnèrent un par un leurs ambitions de nous détruire, écrit Shimon Peres. Le doute fut une dissuasion puissante pour ceux qui souhaitaient un second Holocauste. »
Ce doute, qu’on pourrait appeler la politique de l’ambiguïté, est cultivé à ce jour. Une ambiguïté qui apparaît toujours, en filigrane, dans les attaques israéliennes contre le programme nucléaire iranien. Mais elle est contestée en Israël même par une poignée de militants, en raison de son périmètre jugé excessif.
Source : http://www.lemonde.fr