« Moshe Kahlon, son combat pour le pouvoir d’achat des Israéliens » dans Le Figaro. Un article de Anne Cheyvialle.
Il a négocié son soutien à la coalition gouvernementale de Benjamin Nétanyahou contre la promesse de pouvoir passer ses réformes et de limiter la hausse du budget consacré à la sécurité, un sujet très sensible en Israël, grâce à une gestion optimisée des crédits. Ce budget est désormais établi sur cinq ans et non sur une base annuelle et la hausse, qui était de 5 % et 8 % en moyenne, est aujourd’hui inférieure à 3 %. «C’est la première fois dans l’histoire du pays que les dépenses sociales – éducation, santé… – augmentent plus que le budget sécurité», se félicite-t-il.
Cela étant, le ministre, qui prône «l’économie libérale avec des principes sociaux», compte avant tout sur la croissance pour améliorer le quotidien des Israéliens. Cela passe par des mesures favorables aux entreprises, une baisse de l’impôt sur les sociétés – de 26,5 % en 2015 à 23 % en 2018 -, plus d’incitations à l’investissement, notamment dans les hautes technologies, et moins de réglementation. Le ministre, qui s’était illustré dans un précédent mandat sur une ouverture à la concurrence des télécoms, continue dans cette voie. Il a réduit les taxes d’importations et augmenté les quotas sur de nombreux produits alimentaires et d’habillement qui ont fait chuter les prix, de 30 % à 40 % pour le poisson ou 70 % pour les tomates. Ce qui lui a valu plusieurs mois de mobilisation des producteurs locaux, qui ont reçu des compensations. «Cela profite surtout aux classes les plus basses de la société», insiste Moshe Kahlon.
Sous emploi des Haredim
L’an dernier, la consommation privée a été l’un des moteurs de la croissance, qui a atteint 4 %. «Cela tient à la fois à l’inflation très basse (0,7 % en avril), au taux d’emploi très élevé, de 77 %, et à un chômage très bas, à 3,5 %», explicite Seltem Iyigun, économiste de l’assureur crédit Coface. Israël est une des économies les plus performantes du Proche et du Moyen-Orient, ajoute l’expert, mettant en avant «l’administration solide et la force des exportations, composées à 50 % de produits à haute valeur ajoutée». Revers de la médaille, le risque est d’attirer trop de flux de capitaux, contribuant ainsi à l’appréciation de la devise. Le shekel a pris 9 % face au dollar depuis le début de l’année. «C’est un handicap pour les exportateurs», reconnaît le ministre.
Sa feuille de route est de s’attaquer à deux faiblesses récurrentes, citées par l’OCDE et le FMI: le manque de productivité ainsi que le taux de pauvreté et d’inégalités très élevé. Cela passe par plus d’éducation, de formation, d’investissement en R&D. L’enjeu est aussi d’augmenter le taux d’emploi des femmes arabes et des hommes ultraorthodoxes, la population haredim, dont 52 % seulement travaillent (contre 80 % pour l’ensemble des Israéliens). «Ils bénéficient de cours spécifiques à l’université, réservés aux hommes, on leur fournit des ordinateurs», cite le ministre. Ses prérogatives dépassent la sphère des finances: il n’hésite pas à s’occuper d’éducation, de transport ou de logement afin de réduire les prix de l’immobilier, lesquels ont flambé ces dernières années à cause de la spéculation. Un programme digne d’un premier ministre même si son ambition, se défend-il, se limite aux finances.