- Chronique de Julie Jacob (Jacob Avocats) dans journaldunet.com. Les sociétés françaises ont pris conscience du dynamisme de l’économie israélienne en matière d’innovation. Pour en profiter, un canal s’offre à elles : le transfert de technologies.
Dernièrement, les acquisitions de start-up israéliennes sont en pleine expansion :
- la société américaine Harman a fait l’acquisition de la société israélienne Red Bend (leader mondial de solutions de gestion logicielle mobile) pour 170 millions de dollars.
- Intel a racheté la start-up israélienne Replay Technologies spécialisée dans la reconstruction de vidéo 3D d’événements sportifs pour un montant estimé entre 150 à 175 millions de dollars.
- Oracle a acquis la start-up israélienne Ravello (pionnier de la virtualisation et des plates-formes de machines virtuelles) pour un montant de 400 à 500 millions de dollars dans le but de concurrencer Microsoft Azure et Amazon Web Services.
L’ex-Premier Ministre Manuel Valls en visite en Israël avec Axelle Lemaire notamment, avait eu l’occasion de découvrir quelques-unes des pépites de cette Start up Nation…
Les investisseurs français ont pris conscience de ce dynamisme depuis quelques temps, et cherchent à optimiser des leviers d’innovation et de croissance qu’offrent les technologies israéliennes.
Le premier canal usité par les sociétés françaises dans cette optique est le transfert de technologies permettant à l’entreprise de gagner du temps en intégrant dans sa propre offre commerciale un produit ou une innovation développé en Israël.
Dans un contexte favorable aux activités de R&D, les entreprises privées ainsi que les universités et centres de recherche israéliens ont développé des relations fortes avec des investisseurs français et européens permettant une exploitation efficace de leurs innovations.
Parmi les secteurs les plus innovants de la Silicon Wadi (Silicon Valley israélienne), figurent la cybersécurité (protection des systèmes informatiques et des données, sécurité biométrique), la domotique et les objets connectés, l’électronique et les semi-conducteurs (capteurs, imagerie, réalité augmentée) et les contenus et interfaces (vidéos, médias linéaires et non linéaires, publicité).
1. Les avantages du transfert de technologie
Le transfert de technologie est un processus par lequel une invention, un logiciel, une application, un programme informatique, un savoir-faire ou des compétences développés par une entreprise ou une organisation (comme un institut de recherche) sont transférés à une autre entreprise.
Le transfert peut intervenir entre entreprises privées, mais également entre une société commerciale et une structure publique, issue du monde universitaire.
Il s’agit en tout état de cause pour l’acquéreur de profiter d’une technologie maîtrisée par l’inventeur afin d’améliorer un produit, ou de proposer un nouveau produit au sein de son propre marché.
Pour l’inventeur, le transfert de technologie permet de bénéficier de l’implantation locale de l’acquéreur afin de proposer ses propres produits et innovations directement au sein d’un nouveau marché, sans les barrières rencontrées dans le cadre d’une exportation ordinaire, et ainsi de bénéficier d’un avantage concurrentiel.
On le voit, un accord de transfert de technologies, par sa nature, implique une collaboration étroite entre l’acquéreur (ou le licencié) et le cédant (ou le donneur à licence) dans une perspective de bénéfices réciproques et d’adaptation à un savoir-faire, à un produit, à une technologie complexe, à un marché.
Le transfert de technologie peut ainsi être formalisé de différentes manières selon les spécificités de l’ensemble transféré. Ainsi le transfert peut intervenir par une cession de droits de propriété intellectuelle (cession de brevets, de logiciels/algorithmes, marques ou dessins et modèles industriels), une concession de licence exclusive ou non exclusive (licence d’utilisation d’une technologie protégée, limitée dans le temps, dans l’espace, etc.), un partenariat commercial, la création d’une joint-venture, une prise de participation, un rachat d’entreprise, etc.
2. Les enjeux juridiques des transferts de technologies
Il est nécessaire de définir précisément la stratégie à adopter pour le transfert de technologies tant les enjeux juridiques sont importants, et particulièrement ceux relatifs aux droits de propriété intellectuelle.
Tout d’abord, il est essentiel pour les parties de définir les contours du transfert et ainsi de recenser précisément les droits de propriété intellectuelle attachés à la technologie envisagée. Il est particulièrement recommandé de s’attarder sur le type de droits concernés (brevet, marque, savoir-faire, logiciel, droits d’auteur, dessins et modèles) et sur les formalités de protection accomplies, sur la durée de la protection offerte, sur la possibilité d’opérer d’éventuelles extensions de la protection, etc.
Cette analyse doit s’opérer dans une perspective concurrentielle. Il s’agit en effet de définir si les droits envisagés sont suffisamment larges afin d’éviter tout contournement de la part d’un concurrent et/ou d’éviter tout litige ou toute revendication de la part d’un tiers. A cet égard, il est essentiel pour l’acquéreur de prévoir dans le contrat formalisant le transfert une clause de garantie le protégeant en cas de remise en cause du droit de propriété intellectuelle.
La propriété intellectuelle israélienne à cet égard est intéressante.
En effet, le gouvernement israélien souhaite éviter que les transferts de technologie ne se transforment en « fuite des connaissances ». C’est pourquoi, il a développé de nombreuses coopérations (telle que Magnet Consortia) pour favoriser les collaborations entre les multinationales, les entreprises locales et le monde universitaire.
Cette volonté politique s’est traduite par la systématisation des dépôts de brevets permettant d’accorder aux innovations israéliennes une protection juridique efficace. Il est à ce titre à relever que les dépôts de brevets sont particulièrement tournés vers l’international comme l’illustre la pratique du dépôt triadique (brevets déposés à la fois auprès de l’Office européen des brevets, du Japanese patent office et de l’Office américain) en plein développement.
La souplesse des outils contractuels à la disposition des entreprises permet cependant d’adapter au mieux la réalisation du transfert aux besoins exprimés, à la nature de la technologie transférée et ainsi d’offrir à chaque partie des garanties et une protection juridique adéquates.
Le développement de telles formes de coopération commerciales est une véritable chance pour les entreprises, tant françaises qu’israéliennes, dans une perspective de conquête de marchés et d’ultra concurrence technologique. Gageons que les échanges technologiques s’intensifieront entre les deux pays.
Avec la participation de Maxime Ramos-Guerrero, Avocat