Le Proche-Orient est confronté à une situation de stress hydrique appelée à se dégrader sous l’effet du dérèglement climatique. Tandis qu’Israël a transformé cette faiblesse en force, en devenant un pays en pointe dans la gestion maîtrisée de l’eau, les autres économies de la région restent pénalisées par une mauvaise gestion structurelle de leurs ressources hydriques.
Le Proche-Orient fait face à des contraintes croissantes sur la ressource en eau. Les pays de la région sont situés dans des zones arides connaissant de faibles précipitations, dont le taux d’évaporation est élevé et qui sont inégalement réparties dans l’espace (entre littoraux et déserts) et le temps (forte saisonnalité). Les ressources naturelles proviennent ainsi en grande partie des eaux de surface et, dans une moindre mesure, des eaux souterraines qui ont tendance à être exploitées à des niveaux insoutenables. Les pays du Proche-Orient sont déjà en situation de stress hydrique, alors même que les contraintes sur la ressource en eau vont s’accroître. Du côté de l’offre, le dérèglement climatique va perturber le cycle de l’eau, compte tenu notamment de la hausse des températures et de la baisse des précipitations. Du côté de la demande, la croissance démographique due à des taux de natalité élevés (Égypte, Irak, Israël) et/ou à l’afflux de réfugiés (Jordanie, Liban) exerce une pression sur la ressource, tout comme le développement du secteur agricole où le rendement de l’eau reste faible, sauf en Israël où sont déployées des techniques d’optimisation.
Dans la plupart des pays, la mauvaise gestion du secteur de l’eau fragilise les équilibres macro-budgétaires ainsi que la santé publique, l’environnement et la sécurité alimentaire. Hormis en Israël, où la bonne gestion du secteur a permis au pays de devenir un leader mondial de l’eau, le Proche-Orient se caractérise par des infrastructures sous-développées (Irak, Égypte, Jordanie) voire endommagées par des conflits (Liban, Syrie, TP). Les tarifs trop faibles, le plus souvent pour des raisons sociales, n’incitent pas aux économies d’eau (Égypte, Iran, Jordanie, Liban), ni aux dépenses d’entretien ce qui se traduit par des pertes excessivement élevées, à hauteur de 35% à 60% (sauf en Israël où elles ne dépassent pas 10%). Les stratégies et gouvernances sectorielles sont sous-optimales et ne permettent pas d’attirer des investissements privés voire favorisent l’essor du secteur informel, dans un contexte de pénuries d’eau récurrentes (surtout en Syrie, Liban, TP mais aussi dans certaines régions d’Iran et d’Irak). Les déficiences des politiques hydriques ont plusieurs implications. D’abord, au plan macroéconomique, elles contribuent au déficit budgétaire et à l’accumulation de dette publique (Jordanie, Égypte, Liban, TP). Ensuite, au plan social, elles aggravent les inégalités et peuvent être source de tensions voire de risques sanitaires, du fait d’un système d’épuration sous-développé. Enfin, au plan environnemental, le manque d’eau menace la biodiversité et les écosystèmes agricoles, fragilisant ainsi la sécurité alimentaire via une baisse de la production de certains aliments, qui doivent être importés (Égypte, Iran, Jordanie).
Les autorités nationales concentrent leurs efforts sur le développement des infrastructures hydriques, en particulier de dessalement, d’irrigation, d’adduction et de traitement des eaux usées. En Égypte, les projets dans l’irrigation et l’assainissement (y compris de valorisation des boues d’épuration) semblent prometteurs. En Jordanie, le développement du secteur s’articule autour du mégaprojet du National Conveyor et du traitement des eaux usées à des fins d’irrigation. De son côté, Israël met en œuvre sa politique holistique d’optimisation de la ressource en eau, via le dessalement (triplement des capacités d’ici 2050), la réutilisation des eaux usées (87% à ce jour), les techniques d’économies d’eau et la génération d’eau à partir de l’humidité de l’air.