Maroc-Israël : au-delà de l’alliance militaire, des projets industriels.
DÉFENSE. Le chef d’état-major israélien achève une visite inédite à Rabat. L’occasion d’évoquer, entre autres, le volet industriel de la coopération entre les deux États.
Par Le Point Afrique
Les liens entre le Maroc et Israël – y compris, discrètement, militaires – remontent à des décennies. Les deux pays avaient établi des relations diplomatiques au début des années 1990, avant que le Maroc n’y mette fin au début de la seconde intifada, le soulèvement palestinien du début des années 2000.
Le 24 novembre dernier, le Maroc et Israël avaient signé un accord de coopération sécuritaire, qui prévoit, notamment un volet sur la coopération dans l’industrie militaire.
Pour le Maroc bâtir une industrie locale de l’armement
Arrivé lundi au Maroc, le général Kochavi a été reçu par Abdellatif Loudiyi, ministre délégué chargé de la Défense, a indiqué, mardi, l’armée israélienne dans un communiqué. Le général israélien a ensuite été accueilli par une haie d’honneur au quartier général des Forces armées royales (FAR) marocaines, où il s’est entretenu avec son homologue, le général Belkheir Al-Farouq, et le chef du renseignement militaire Brahim Hassani.
Au-delà de la langue de bois officielle, le déplacement du général Kochavi au Maroc traduit la volonté réciproque d’accélérer la coopération militaire et sécuritaire. Les deux parties « ont réitéré leurs ambitions et leur volonté commune de consolider ces relations pour servir les objectifs de paix et de stabilité de notre région », souligne le communiqué marocain. Côté militaire, « cette visite a permis d’examiner les opportunités de développer davantage les axes de la coopération portant principalement sur la formation, le transfert de technologies ainsi que sur le partage d’expériences et d’expertises », s’est encore félicité l’état-major marocain. Lors des discussions, la partie marocaine a également fait part de « [son] intérêt à monter conjointement des projets industriels de défense au Maroc », a précisé l’état-major général des FAR.
Fin mars, une délégation de hauts gradés israéliens avait effectué une visite au Maroc, une autre première, qui avait abouti à la signature d’un accord de coopération, envisageant la création d’une commission militaire mixte. Ce partenariat se fonde sur un accord-cadre signé en novembre 2021 à Rabat par le ministre israélien de la Défense Benny Gantz. L’accord prévoit notamment une coopération entre services de renseignements, le développement de liens industriels, l’achat d’armements et des entraînements conjoints. Une visite sans précédent des dirigeants d’Israel Aerospace Industries (IAI), le premier groupe aéronautique public israélien (civil et militaire), s’était déroulée en parallèle de la mission militaire.
Un nouvel axe Maroc-Israël parti pour reconfigurer l’équilibre régional.
Le rapprochement entre les deux États se poursuit à un rythme soutenu depuis la normalisation de leurs relations en décembre 2020 dans le cadre des accords d’Abraham, un processus entre l’État hébreu et plusieurs pays arabes, soutenu par Washington. Des observateurs israéliens ont participé pour la première fois fin juin à l’exercice militaire « African Lion 2022 », le plus large sur le continent africain, co-organisé par le Maroc et les États-Unis. Scellée avec la bénédiction de Washington, cette alliance stratégique et militaire suscite la défiance de l’Algérie, rivale régionale du Maroc et soutien de la cause palestinienne, qui a fustigé « l’arrivée à présent de l’entité sioniste [Israël] à nos portes ».
La visite du chef de l’armée israélienne a d’ailleurs déclenché débats et critiques sur les réseaux sociaux marocains. « Nous ne sommes plus face à une normalisation normale, mais plutôt face à une alliance sécuritaire et militaire qui existe entre le Maroc et les régimes arabes réactionnaires, qui sont contre les valeurs des droits de l’homme et de la démocratie », et Israël, a dénoncé le journaliste et militant Abdellatif El Hamamouchi.
/www.lepoint.fr/