Israël a achevé la construction de sa barrière de séparation avec la bande de Gaza ; celle-ci devrait mettre fin aux infiltrations de Gazaouis qui sèment la terreur dans le sud du pays.

Longue de 65 km et équipée de centaines de caméras et radars, cette barrière constitue un mur de fer entre Gaza et Israël, empêchant notamment le creusement de tunnels entre l’enclave et le sol israélien.

D’emblée, soyons clair : Israël a le droit et le devoir de protéger sa population d’attaques terroristes commises par des Palestiniens venus de la bande de Gaza et de la Cisjordanie.

Si un mur truffé de technologies peut contribuer à la sécurité et à un retour à une normalité quotidienne pour les habitants du sud d’Israël, on ne peut que s’en réjouir.

Israël n’en est pas à son premier mur : ses frontières avec la Cisjordanie, la bande de Gaza et l’Egypte sont désormais marquées par des clôtures, barrières de sécurité et murs de séparation.

Tous les moyens sont bons, seulement voilà ; à force de s’enfermer, Israël s’éloigne d’un règlement politique au conflit proche-oriental.

Enfermement physique

En 2002 déjà, le gouvernement d’Ariel Sharon avait décidé de la construction d’un mur de séparation entre Israël et la Cisjordanie, destiné à empêcher le passage incontrôlé de Palestiniens en territoire israélien.

Cette « clôture de sécurité » longue de plus de 600 km, partie métal et partie béton, semble avoir rempli son rôle ; le nombre d’attentats terroristes commis en Israël par des Palestiniens infiltrés de la Cisjordanie a chuté.

A sa frontière avec l’Egypte aussi, Israël a érigé en 2013 un mur d’acier long de 240 km ; le gouvernement Netanyahou visait à réduire les infiltrations de terroristes, mais pas seulement.

Les migrants clandestins d’Afrique, comme les trafiquants de drogues, de prostitués et d’armes, commençaient à menacer la société israélienne ; alors, on s’enferme.

Et en 2021, c’est la frontière entre Israël et la bande de Gaza qui est désormais bétonnée : sur terre, mais aussi en sous-sol et dans une portion de mer.

Enfermement politique

Pour Israël, l’enfermement, qui devrait être une mesure défensive temporaire, est devenue la seule stratégie de séparation entre les peuples de la région.

Israël préfère l’enfermement à la solution politique ; si officiellement, les barrières n’en cherchent pas à isoler les Palestiniens mais à empêcher les actes terroristes, la réalité du terrain est sensiblement différente.

Pour les Palestiniens, la clôture de sécurité a donné naissance à une « économie emmurée » ; les effets de cet enfermement sont désastreux pour la population palestinienne qui a du mal à subvenir à ses besoins.

Le récent rapport de la Conférence des Nations unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED) est sans équivoque : « le coût économique cumulé de la stricte politique de fermeture israélienne, des bouclages et opérations militaires en Cisjordanie depuis 2000, est estimé à 58 milliards de dollars ».

Autrement dit, la Cisjordanie a perdu en deux décennies (de 2000 à 2019) l’équivalent de trois fois et demie son PIB annuel.

En l’absence d’une perspective de paix négociée, la logique de la séparation politique devient celle de l’enfermement.

Un enfermement qui n’empêche pas la poursuite de la colonisation des territoires palestiniens, mais qui remet en cause la viabilité d’une entité palestinienne à venir.

TIMES OF ISRAEL. à propos de l’auteur
Jacques Bendelac est économiste et chercheur en sciences sociales à Jérusalem où il est installé depuis 1983. Il possède un doctorat en sciences économiques de l’Université de Paris. Il a enseigné l’économie à l’Institut supérieur de Technologie de Jérusalem de 1994 à 1998 et à l’Université Hébraïque de Jérusalem de 2002 à 2005. Aujourd’hui, il enseigne l’économie d’Israël au Collège universitaire de Netanya. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles consacrés à Israël et aux relations israélo-palestiniennes. Il est notamment l’auteur de « Les Arabes d’Israël » (Autrement, 2008), « Israël-Palestine : demain, deux Etats partenaires ? » (Armand Colin, 2012), « Les Israéliens, hypercréatifs ! » (avec Mati Ben-Avraham, Ateliers Henry Dougier, 2015) et « Israël, mode d’emploi » (Editions Plein Jour, 2018). Régulièrement, il commente l’actualité économique au Proche-Orient dans les médias français et israéliens.
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