Le monde du travail en Israël est en effervescence ; une nouvelle convention sociale prévoit le relèvement du salaire minimum de 13% d’ici à 2025.

Bonne nouvelle ? Pas sûr. Les partenaires sociaux évitent de toucher à un aspect crucial des relations du travail : la durée hebdomadaire du travail qui est, en Israël, une des plus longues des pays occidentaux.

Bien sûr, il faut se réjouir de l’accord tripartite qui vient d’être signé par le gouvernement israélien, le patronat et les syndicats ; le relèvement du salaire minimum et du nombre de jours de congés payés constitue une avancée sociale importante.

En revanche, il est une mesure que le gouvernement évite de prendre : la baisse de la durée légale du travail, qui se traduirait immédiatement par une amélioration de la productivité.

Eh oui, moins un homme (ou une femme) travaille et plus sa production augmente ; tous les pays occidentaux le savent mais Israël l’ignore…

Un pays où l’on travaille trop.

En Israël de 2021, la durée légale du travail est une des plus longues des pays occidentaux : 42 heures par semaine.

Et encore, la durée a été réduite en avril 2018, passant de 43h à 42h par semaine. Mais on est bien loin des 35 heures à la française…

En fait, il ne faut pas regarder seulement la durée légale ; il faut examiner aussi la durée du travail effectif qui prend en compte les heures supplémentaires et les jours de congés.

Selon la base de données de l’OCDE, le Mexique et la Colombie font partie des nations les plus laborieuses du monde, avec une moyenne annuelle respective de 2 124 et 1 964 heures travaillées par travailleur.

Israël se trouve à la 7e place sur les 38 pays de l’OCDE pour la durée effective de son travail : sur toute l’année 2020, un Israélien a travaillé 1 782 heures alors que le Français s’est contenté de travailler 1 408 heures.

Bref, Israël est un des pays occidentaux où l’on travaille le plus.

Un pays où l’on produit peu

On aurait pu croire qu’en travaillant beaucoup, l’Israélien produit beaucoup.

Eh bien non, plus il travaille et moins il produit ; l’Israélien travaille beaucoup mais sa production est relativement faible.

Autrement dit, l’Israélien est très peu productif : la productivité (c.-à-d. la production par heure de travail) du salarié israélien est une des plus basses des pays occidentaux.

Au palmarès de la productivité du travail, Israël figure presque à la queue des pays occidentaux ; en 2020, l’Israélien produisait l’équivalent de 52 dollars par heure travaillée, soit 36% de moins qu’un Américain, 35% de moins qu’un Français et 25% de moins qu’un Britannique.

En tête du classement de la productivité se trouvent l’Irlandais et le Luxembourgeois qui produisent, chacun, près de 120 dollars de l’heure ; plus du double de l’Israélien !

« Le travail, c’est la santé ; rien faire c’est la conserver », chantait Henri Salvador. Il n’avait pas tort ; quand on travaille trop, l’impact est négatif sur l’économie mais aussi sur la santé.

Conclusion : l’Israélien devrait travailler moins, ce qui lui permettrait de produire plus et mieux, tout en ayant davantage de temps libre et une santé meilleure.

Pour y parvenir, il est urgent d’abaisser la durée légale du travail en Israël.

Times of Israel.
à propos de l’auteur
Jacques Bendelac est économiste et chercheur en sciences sociales à Jérusalem où il est installé depuis 1983. Il possède un doctorat en sciences économiques de l’Université de Paris. Il a enseigné l’économie à l’Institut supérieur de Technologie de Jérusalem de 1994 à 1998 et à l’Université Hébraïque de Jérusalem de 2002 à 2005. Aujourd’hui, il enseigne l’économie d’Israël au Collège universitaire de Netanya. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles consacrés à Israël et aux relations israélo-palestiniennes. Il est notamment l’auteur de « Les Arabes d’Israël » (Autrement, 2008), « Israël-Palestine : demain, deux Etats partenaires ? » (Armand Colin, 2012), « Les Israéliens, hypercréatifs ! » (avec Mati Ben-Avraham, Ateliers Henry Dougier, 2015) et « Israël, mode d’emploi » (Editions Plein Jour, 2018). Régulièrement, il commente l’actualité économique au Proche-Orient dans les médias français et israéliens.
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