Prise d’otages dans une synagogue au Texas, interdiction de Maus, d’Art Spiegelman, dans le Tennessee, déclaration erronée de l’actrice Whoopi Goldberg sur l’Holocauste, qui ne serait pas une « affaire de race » … Le climat actuel inquiète les responsables des musées sur la Shoah aux États-Unis, où l’enseignement de cette page sombre n’est requis que dans vingt-deux des cinquante États. « Commémorer l’Holocauste à travers un mémorial est essentiel, mais ne suffit pas aujourd’hui. Il faut que la tragédie soit comprise de telle manière qu’elle ne puisse pas se reproduire », explique Ellen Lang, l’ex-présidente du conseil d’administration du Mémorial et centre d’éducation de l’Holocauste de Floride.
Les seize musées spécialisés dans le génocide du pays réagissent en se mobilisant. Très impliqué dans le débat public, le grand United States Holocaust Memorial Museum (USHMM), à Washington, a publié une lettre ouverte de cinquante et un rescapés des camps, bénévoles au sein de l’institution, contre « la tendance croissante, dans la vie publique américaine, à invoquer l’Holocauste afin de promouvoir d’autres idées ». Allusion aux propos de militants et d’élus, comme la sulfureuse députée de Georgie Marjorie Taylor Greene, qui mettent sur le même plan les méthodes de l’Allemagne nazie et les obligations sanitaires liées au Covid.
À Los Angeles, le musée de l’Holocauste organise des visites pour les candidats à la mairie afin de les sensibiliser. D’autres ont conçu des expositions innovantes pour mettre en valeur les témoignages de survivants auprès des jeunes. Tel le Musée et centre d’éducation sur l’Holocauste de l’Illinois, qui propose une expérience de réalité virtuelle immergeant les participants dans les camps de la mort en compagnie d’un rescapé qui partage ses souvenirs. À Los Angeles, une installation offre la possibilité d’avoir une conversation virtuelle avec l’image d’une survivante. Celle-ci répond au moyen de phrases préenregistrées, générées par une technologie d’analyse verbale… Il faut bien cela. Une étude de septembre 2020 a montré que 63 % des milléniaux américains ne savaient pas que six millions de Juifs avaient été exterminés pendant la Seconde Guerre mondiale.
Alexis Buisson. Télérama – N° 3763 – 23/02/23022