Le Kunsthaus de Zürich, le plus grand musée d’art suisse, est en pleine tourmente. L’institution a demandé à des experts d’étudier les œuvres de la collection Bührle. ancien marchand d’armes (1890-1956) qui a fait fortune pendant la Seconde Guerre mondiale.
L’origine de la Collection Bührle, gérée par une fondation, fait débat depuis longtemps mais a refait surface suite au déménagement des tableaux. Jusqu’en 2015, ils étaient visibles dans un musée très confidentiel à Zurich, mais la Fondation Bührle a décidé depuis de déplacer la Collection au Kunsthaus Zürich.
L’ouverture en octobre de l’extension du Kunsthaus Zürich, conçue par l’architecte britannique David Chipperfield pour abriter de façon permanente la Collection Bührle, a permis à l’instance culturelle de devenir le «plus grand musée d’art de Suisse».
Mais la décision d’exposer la Collection Bührle a été attaquée, notamment dans un récent ouvrage de l’historien Erich Keller, Das kontaminierte Museum (en français, Le musée contaminé). L’origine douteuse des tableaux et le manque de contextualisation de la collection font débat.
Le musée avait pourtant pris ses précautions en commandant, sur ordre des autorités, une étude historique auprès de l’université de Zürich. Face aux critiques persistantes, le musée a annoncé mercredi qu’un «comité d’experts indépendants (…) vérifiera la pertinence de la méthodologie et de la procédure suivies» par les responsables de la collection «ainsi que l’exactitude de la présentation des résultats».
Sur un site en ligne, le musée présente également longuement le parcours du marchand d’armes, sans omettre ses liens avec les nazis. Il y est indiqué que Bührle a commencé à acheter des œuvres d’art en 1936, un fois qu’il a gagné son premier million avec l’expansion des exportations d’armes, et était en possession à la fin de sa vie d’une collection regroupant environ 600 œuvres.
Toujours selon ce site, il a été en contact dès 1938 avec la galerie de Theodor Fischer à Lucerne qui vendait pour le régime nazi des œuvres confisquées aux musées allemands et considérées comme «dégénérées». Dans les années qui suivent, Fischer vend également des toiles provenant de collections privées qui ont été pillées par les nazis en France. «Bührle achète onze de ces tableaux à Fischer pendant les années de guerre», selon le Kunsthaus Zürich.
S’il a fait des affaires pendant la Seconde Guerre Mondiale, «il ne nous a pas légué, pour autant, une collection d’art nazie», a souligné mercredi face aux médias le directeur de la Collection Bührle, Lukas Gloor, a rapporté l’agence de presse suisse ATS.
En 1945, sous la pression des Alliés, la Suisse a créé au sein du tribunal fédéral une chambre des biens spoliés. Se sont suivies alors des enquêtes judiciaires, au cours desquelles 77 œuvres d’art ayant abouti dans des collections suisses sont identifiées comme des biens spoliés à leurs propriétaires. Parmi celles-ci, 13 sont en possession de Bührle, qui doit les restituer. Il en a acquis 9 une seconde fois au prix du marché.
Source : Le Figaro (résumé)