LIBRE PENSEE. Il est intéressant de noter que dans de nombreuses langues, l’on exprime le début de chaque année par les termes de « nouvel an, new year, Neujahr ». La langue hébraïque, quant à elle, ne suit point ce schème de traduction. La traduction littérale de Rosh HaShanah, expression absente de la source biblique est, en effet, « la tête de l’année ».

Que peut donc signifier cette expression ?

Cette expression signifie que la nouvelle année est placée sous le signe de la tête, siège de la pensée, de la réflexion, de la conscience et de la méditation. Tout commence dans les infinis et mystérieux méandres de la pensée. Rien ne peut être créé, en ce monde, sans qu’il y ait préalablement de programme défini et directeur. Ainsi, le premier verset de la Bible pourrait être traduit : Par la pensée (ou consciemment), le Seigneur créa le ciel et la terre. (Genèse 1 : 1).

« Toute finalité dans l’action trouve son origine dans la pensée » (Lekha Dodi, chant du Shabbat au soir).

L’on pourrait probablement avancer l’idée que toute forme de Vie et de matière découle et émane de l’esprit visant à élever le monde.

Rosh HaShanah n’est pas à proprement dit la Création du monde qui, selon la Tradition, émerge du néant le 25 Eloul, mais la création de l’Homme. L’œuvre insondable de la Création ne prend tout son sens que par la présence et la participation active de l’Homme – ADaM et ‘HaVaH, ou plutôt YSh et YShaH (le couple homme et femme) – qui, en insufflant un souffle de Vie dans un monde inerte dépourvu de direction devient le collaborateur à part entière de l’Eternel.

Donc, le temps de Rosh Hashanah a pour dessein d’inviter l’Homme à méditer profondément et sérieusement sur sa vocation, sur la place qui est la sienne dans ce monde.

Que sommes-nous capables d’amener de nouveau au monde ? Cette notion de renouveau réside au cœur même de la racine biblique Sh. N. Y. / שׁ.נ.י à partir de laquelle est construit le terme « ShaNaH » qui, traduit par « année » signifie « doubler, changer, modifier » et même « étudier » et « enseigner ».

Avons-nous pris véritablement conscience du pouvoir qui nous a été octroyé de transformer le monde en vue de l’embellir et de l’améliorer ? La racine שׁ.פ.ר Sh. P. R du terme שׁוֹפָר ShoPhaR, « corne de bélier », dont on a le devoir d’écouter le son au jour de Rosh HaShanah, a pour signification « rendre beau ».  Sommes-nous capables de surmonter les nombreux dilemmes éthiques qui ne cessent de submerger notre conscience ?

Rosh HaShanah est appelé « יוֹם הַדִּין Yom HaDin » – « le Jour du jugement » – pour l’ensemble du genre humain car l’exercice le plus difficile, loin de résider dans le jugement du Roi du monde, réside avant tout dans l’aptitude à nous juger nous-mêmes.

L’introspection et le jugement de soi constituent l’essence même des deux jours chômés, fait rare, de Rosh HaShanah, qui n’en forment qu’un. La pensée et la méditation visent à unifier un monde brisé.

Dès lors que nous aurons fait l’effort d’amasser les débris de ce monde par la puissance de la pensée, alors, nous serons ensemble capables de construire un monde meilleur.

 

 

Shana tova !

Haïm Ouizemann

Diplômé de l’Institut des Civilisations et Langues Orientales de Paris (INALCO) et certifié de l’Institut Catholique de Paris (ICP) enseigne la Bible (TaNa’Kh), sa langue, son éthique et son histoire. Installé, depuis son Alya en 1989 à Ashkelon, il participe activement au refleurissement d’Erets Israël. Végétarien par conviction morale, Haïm rêve d’une ère nouvelle où les grandes spiritualités pourraient se rencontrer en vue d’instaurer un monde meilleur. Convaincu que le retour du peuple d’Israël en Erets-Israël annonce la restauration de l’idéal de fraternité abrahamique, il encourage le dialogue interreligieux dans le respect de l’autre.

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