Tal Cohen, titulaire d’un MBA de l’Ecole de Gestion de l’Université de Tel-Aviv et sa startup « Plastic Back », retransforment les déchets plastiques dans leur matière première d’origine : le pétrole brut, réutilisable dans l’industrie pétrochimique, grâce à une méthode de rétro-ingénierie.
«Lorsque le plastique a été introduit pour la première fois, il a été considéré comme le grand sauveur de l’environnement, car il permettait de remplacer l’utilisation de l’ivoire des éléphants, de l’écaille des tortues et des coraux », explique Tal Cohen. Depuis son invention cependant, près de 8,3 milliards de tonnes de déchets plastiques ont été accumulés dans le monde. Avec 350 millions de tonnes de déchets produits chaque année, dont seulement 8% sont recyclés, le plastique est devenu en 70 ans l’un des risques majeurs pour l’environnement.
Une solution 100% chimique
« Le plastique est produit à partir du pétrole, source d’énergie non renouvelable », explique Tal. « Le pétrole brut est une huile minérale d’origine naturelle qui se développe sous terre pendant des millions d’années. Il est ensuite extrait du sous-sol par une opération de forage, puis raffiné par l’industrie pétrochimique, après quoi il peut être utilisé à diverses fins, comme le carburant des véhicules, les textiles synthétiques, le caoutchouc et… la production de plastique ».
Tal a été pour la première fois confrontés aux conséquences néfastes de la consommation de plastique lorsque, après avoir obtenu son B.Sc. en sciences marines et environnement au Centre académique Ruppin, il a travaillé comme biologiste marin, plongeant pour ses recherches de laboratoire, à trois kilomètres au large, entouré de poissons et …. de déchets plastiques. Il y a quelques années, il a entrepris des études de MBA à l’Université de Tel-Aviv, y compris le programme « Entrepreneuriat et gestion de l’innovation technologique » : « Je voulais apprendre à développer des technologies et des entreprises promouvant des solutions écologiques. Pendant mes études à l’UTA, j’ai également travaillé dans un Fonds de capital-risque, gérant les portefeuilles d’une dizaine d’entreprises d’énergie renouvelable, ce qui m’a beaucoup appris sur les besoins des startups dans ce domaine ».
La solution proposée par Tal Cohen et sa start-up israélienne « Plastic Back » est basée sur des procédés chimiques : « Grâce à la « rétro-ingénierie », nous sommes en mesure de reconvertir les déchets plastiques dans leurs précieuses matières premières d’origine : huiles, cires et autres produits chimiques recherchés. Notre technologie romp les liaisons entre les atomes de carbone du plastique pour produire des fractions liquides qui peuvent être (ré)utilisées par l’industrie pétrochimique ».
Des avantages tant sur le plan environnemental que financier et énergétique.
« Bien que la retransformation du plastique en pétrole par combustion existe déjà, elle nécessite des températures très élevées, comprises entre 600 et 1 000 degrés Celsius, impliquant des coûts environnementaux et financiers extrêment élevés », explique Tal. « La véritable innovation ici, c’est que nous parvenons à convertir le plastique en pétrole par des moyens chimiques uniquement, et à température ambiante. La méthode présente donc des avantages tant sur le plan environnemental que financier et énergétique. L’objectif est d’offrir une alternative au forage traditionnel pour l’obtention du pétrole ».
Tal raconte que l’idée lui est venue alors qu’il travaillait avec l’une des sociétés de son portefeuille : « Lorsque j’ai senti que j’avais suffisamment de connaissances sur le monde des startups, je suis parti à la recherche de technologies. En 2016-2017, j’en ai trouvé une à l’Université hébraïque de Jérusalem, liée au plastique, domaine que je connaissais bien depuis mon travail comme biologiste marin. Je savais également que le domaine des énergies renouvelables était en train d’évoluer ».
« La technologie était en place et j’ai donc décidé de vérifier si elle éveillait un intérêt sur le plan commercial », poursuit-il. « En 2019, nous avons participé au concours Shell aux Pays-Bas, le plus grand concours de l’Union Européenne sur le thème de l’énergie, dans le cadre duquel plus de 250 entreprises se sont affrontées pendant 10 jours. Nous avons fini à la 2e place. Nous avons alors compris qu’il existait une demande pour notre technologie. Shell étant disposée à investir, nous avons donc créé notre entreprise. Depuis, nous avons pu trouver un investisseur providentiel, avons reçu la reconnaissance de la Commission Européenne et participons au programme d’accélérateur pour startups de l’UE ».
D’une économie linéaire à une économie circulaire.
« Plastic Back permet de passer d’une économie linéaire à une économie circulaire, en bouclant la boucle entre l’industrie pétrochimique (y compris des entreprises comme Shell), qui dépend actuellement du forage de pétrole brut et est soumise à une réglementation et une pression de plus en plus lourdes, et les entreprises de gestion des déchets qui doivent gérer des millions de tonnes de déchets plastiques provenant de l’agriculture, des usines ou des hôpitaux etc. et dont la plupart sont mis en décharge. Les gestionnaires de déchets recherchent des alternatives, d’autant plus que le coût des décharges a quintuplé depuis 2019. Les producteurs de déchets, de leur côté, gagneraient la possibilité de traiter leurs déchets sur place ou à proximité, d’économiser sur les frais d’enlèvement et de traitement et même de générer des profits à partir de leurs déchets plastiques ».
Tal n’envisage pas de se reposer dans les années à venir : « La phase de recherche et développement de notre projet est en grande partie terminée. L’an dernier, nous avons prouvé avec succès qu’il existe une demande pour notre technologie. Nous avons reçu une subvention du ministère de l’Énergie pour créer notre première installation pilote avec un partenaire industriel dans le sud d’Israël en 2022. Nous pensons mettre en place nos premières installations un an et demi après, et, dans cinq ans, deux ou trois d’entre elles devraient être actives, probablement une en Israël et les autres en Europe ».
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