Après la confirmation, par la Cour de cassation, de la responsabilité pénale du meurtrier de Sarah Halimi, les avocats de la sœur de la victime ont annoncé porter plainte en Israël. Si la loi israélienne permet théoriquement une telle procédure, peut-elle réellement aboutir ?

Les avocats de la sœur de Sarah Halimi, cette sexagénaire tuée sauvagement dans son appartement à Paris en 2017, ont annoncé qu’ils allaient porter plainte devant la justice israélienne. La loi de ce pays permet en effet de poursuivre les auteurs de crimes à caractère antisémite, même s’ils ont été commis hors de son territoire.
La sœur de Sarah Halimi, qui vit en Israël, en possède la nationalité, condition nécessaire pour enregistrer la plainte : c’est un citoyen israélien qui doit dénoncer le crime pour que la justice de son pays s’en saisisse. Ses avocats, Mes Francis Szpiner et Gilles-William Goldnadel,  ont donc annoncé dans un communiqué qu’ils allaient « saisir la justice israélienne d’une plainte à l’encontre de Kobili Traoré au nom d’Esther Lekover, sœur de la victime ».Dans la nuit du 3 au 4 avril 2017, Kobili Traoré s’était introduit dans l’appartement de sa voisine de confession juive, âgée de 65 ans, la surprenant dans son sommeil. Après l’avoir rouée de coups aux cris de « Allah Akbar » et en psalmodiant des versets du Coran, le jeune homme de 27 ans avait tenté d’étouffer sa victime, puis l’avait jetée du balcon de cet appartement au 3ème étage d’un HLM de la rue de Vaucouleurs, près du quartier parisien de Belleville. Médecin, puis directrice de crèche, Sarah Halimi était mère de trois enfants et grand-mère.

Si le caractère antisémite du crime a été confirmé par l’arrêt de la Cour de cassation le meurtrier échappera toutefois à un procès, celui-ci confirmant son irresponsabilité pénale. Trois experts avaient établi qu’il était, au moment des faits, en proie à une « bouffée délirante », sur fond de forte consommation de cannabis.
Une semaine après cette décision de la Cour de cassation, les avocats de la sœur de la victime ont donc choisi de s’appuyer sur l’article 13 de la loi pénale d’Israël. Celle-ci permet de juger sur son sol des crimes antisémites, si le pays où ils ont été commis ne s’en est pas saisi, ou si la décision de la justice locale est jugée illégitime. La procédure ne pourrait en revanche pas être engagée si le suspect avait été parfaitement innocenté en France.
Plusieurs écueils juridiques rendent cependant improbable un procès de Kobili Traoré en sa présence. Celui-ci est français, ce qui exclut d’emblée une extradition vers l’étranger, aux termes de la loi française. Par ailleurs, le droit pénal international s’oppose à l’extradition d’un suspect dans une affaire déjà jugée ou classée. Un procès israélien du meurtrier de Sarah Halimi, s’il devait se tenir, aurait donc lieu en son absence.
De leur côté, les avocats du frère de Sarah Halimi avaient eux annoncé dès la semaine dernière leur intention de porter l’affaire devant la Cour européenne de justice.

LE PLUS. r(epublicain-lorrain.fr). La sœur de Sarah Halimi entend porter plainte en Israël pour tenter d’obtenir un procès contre son meurtrier. Ce dernier a été jugé irresponsable pénalement par la justice française. Cette annonce répond à l’arrêt de la Cour de cassation du 14 avril. La juridiction suprême a entériné le caractère antisémite du crime mais confirmé l’impossibilité de traduire en justice le meurtrier, compte-tenu de l’abolition de son discernement lors des faits.

Citoyenne israélienne.

Cette décision a suscité une très forte émotion dans la communauté juive et au-delà. Elle a été accompagnée d’un vif débat sur la responsabilité pénale des personnes atteintes de troubles psychiatriques sur fond de consommation de drogues.

Mes Francis Szpiner et Gilles-William Goldnadel ont annoncé mercredi vouloir « saisir la justice israélienne d’une plainte à l’encontre de Kobili Traoré au nom d’Esther Lekover, soeur de la victime ». La loi pénale d’Israël peut s’appliquer à des crimes antisémites commis à l’étranger et dénoncés par un citoyen israélien, ce qui est le cas de leur cliente. La France n’extrade toutefois pas ses ressortissants.

Le caractère antisémite reconnu.

Le 4 avril 2017, Kobili Traoré, 27 ans, est en proie à une « bouffée délirante », selon les sept experts psychiatriques qui l’ont examiné, lorsqu’il fait irruption chez sa voisine de 65 ans Lucie Attal, aussi appelée Sarah Halimi. Aux cris de « Allah Akbar », le jeune homme musulman la roue de coups en récitant des versets du Coran avant de la jeter par-dessus le balcon de leur HLM de Belleville, dans l’est de Paris.

Le 19 décembre 2019, après un débat contradictoire lors d’une audience publique, la cour d’appel de Paris a reconnu le caractère antisémite du crime mais déclaré M. Traoré irresponsable pénalement et ordonné son hospitalisation assortie de mesures de sûreté pour 20 ans. Saisi d’un recours, la Cour de cassation a confirmé le 14 avril son irresponsabilité pénale, estimant que loi « ne distingue pas selon l’origine du trouble mental qui a fait perdre à l’auteur la conscience de ses actes ».

Débat politique.

« Décider de prendre des stupéfiants et devenir alors ‘comme fou’ ne devrait pas à mes yeux supprimer votre responsabilité pénale », a commenté dimanche le président de la République Emmanuel Macron qui a demandé une évolution législative. Pour la défense de M. Traoré, le jeune homme vivait le soir des faits sa première crise psychiatrique, imprévisible contrairement aux effets habituels de l’ivresse cannabique ou alcoolique.

« Mes Goldnadel et Szpiner déplorent d’être contraints de diligenter cette procédure mais ils ne sauraient accepter un déni de justice qui heurte la raison et l’équité bien au-delà de la communauté juive de France », ont conclu les deux avocats dans un communiqué.

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