Dans quelques jours Doug Emhoff portera un titre qui n’existe pas encore. Lorsque le mercredi 20 janvier son épouse, Kamala Harris, prêtera serment et accédera à la vice-présidence des Etats-Unis, ce quinquagénaire au large front dégarni deviendra pour les quatre années à venir le premier Sgotus » (Second Gentleman of the United States) de l’histoire du pays.
Comme c’est une première Doug Emhoff aura donc toute latitude pour habiter son nouveau rôle et, potentiellement, le réinventer. Cet avocat californien, spécialiste du droit des médias, du sport et du spectacle, a laissé entendre qu’il profiterait de son « mandat » pour défendre l’accès à la justice pour les personnes défavorisées et lutter contre l’insécurité alimentaire ; volontiers discret, il n’a pas été plus précis sur ses intentions.
A 56 ans, M. Emhoff entre dans la vie publique avec un fort capital de sympathie. La complicité manifeste avec son épouse, ses déclarations d’amour sur les réseaux sociaux, son choix de mettre un terme à sa carrière pour se consacrer à l’ascension politique de sa femme lui ont valu des louanges unanimes et un certificat de modernité, y compris de la part des féministes, ravies d’observer au plus haut niveau une inversion des rôles.
Emhoff a quitté son cabinet d’avocat de Los Angeles pour prémunir le couple de toute accusation de conflits d’intérêt. Ses futures activités professionnelles devraient se résumer à quelques cours de droit à l’université de Georgetown à Washington.
Le couple véhicule en outre l’image d’une famille progressiste et multiculturelle, reflet d’une Amérique en mutation. Né dans une famille juive de New York, M. Emhoff est divorcé, père de deux jeunes adultes aux prénoms inspirés d’artistes de jazz noirs : Cole (pour John Coltrane) et Ella (pour Ella Fitzgerald). Ses enfants ont rapidement adopté Mme Harris, d’origine jamaïco-indienne, qu’il a épousée en 2014 quelques mois après un « coup de foudre » lors d’une rencontre organisée par une amie commune ; ils l’appellent Momala, contraction de Maman et de Kamala.
Avare de commentaires politiques, le futur Sgotus utilise principalement les réseaux sociaux pour promouvoir le port du masque afin de lutter contre la pandémie ou s’enthousiasmer des initiatives de son épouse. Durant la campagne des primaires démocrates, puis celle de l’élection présidentielle, l’avocat plutôt éloigné de la vie politique jusqu’à sa rencontre avec Mme Harris, a découvert les interminables marathons des candidats, enchaînant meetings et rencontres à travers le pays. Le plus souvent en coulisses, plus rarement sur le devant de la scène, il a eu le loisir de sympathiser avec d’autres conjoints de candidats. Son entente avec Chasten, l’époux de Pete Buttigieg, le premier candidat ouvertement gay à une élection américaine, transparaît encore dans les messages que les deux hommes échangent par réseaux sociaux interposés.
- Emhoff assure aussi avoir cultivé une amitié avec Jill Biden, la femme de Joe, future First Lady, après avoir durant les huit années de l’administration Obama, occupé la place de Second Lady. Comme Doug, cette dernière s’était préservée une marge de liberté en poursuivant son métier d’enseignante dans une université de Virginie.
A l’aube d’une carrière fort éloignée des prétoires californiens, il aura peut-être en tête un chiffre troublant : quatorze des trente-huit Second Ladies de l’histoire américaine sont devenues premières dames des Etats-Unis, lorsque leur vice-président de mari a accédé au bureau Ovale.
Soruce : Le Monde & Israël Valley