Ronald Lauder. TRIBUNE – Le président du Congrès juif mondial expose ses réflexions sur la crise sanitaire et les communautés juives dans le monde.
Le coronavirus a déclenché une crise mondiale sans précédent: des milliers de morts, des millions de malades et des milliards d’êtres humains mis en quarantaine. L’humanité tout entière se trouve aux prises avec une menace commune pour la vie. Si le printemps laisse entrevoir des signes d’espoir, l’humanité fait face à un défi gigantesque.
Le peuple juif se trouve à l’avant-garde de la lutte contre cette calamité mondiale. La ville de New York a comptabilisé un nombre effrayant de victimes de la pandémie, certaines de ses communautés juives ont été lourdement touchées. Londres a aussi beaucoup souffert ; le nombre de victimes est très élevé au sein des communautés juives. Un tel bilan se produit également dans d’autres villes européennes telles Paris, Rome, Amsterdam, Anvers et Moscou. Les communautés juives ressentent panique, détresse et affliction. Cependant, ces communautés démontrent une détermination exceptionnelle et une cohésion remarquable. Les heures sombres sont aussi des heures de grandeur. Alors que le coronavirus fait régner les ténèbres, ces communautés ont à cœur de faire briller une lueur de dévouement, de détermination et d’amour.
Nous devons relever la tête et nous tourner vers l’avenir. Au moment où la pandémie atteint son pic et entame une phase descendante, nous devons comprendre les implications pour l’avenir proche et lointain du peuple juif.
Dans les prochains mois, le monde juif aura à affronter le même défi qui se pose à toutes les nations: protéger les vies et assurer le bien-être de la population alors que l’activité économique redémarre. En même temps, nous devons trouver de nouvelles façons de mener la vie communautaire et de s’occuper de l’éducation de nos enfants. La distanciation sociale que nous sommes obligés d’appliquer doit devenir un outil tant pour la construction communautaire que pour le maintien du lien social. Nous devons garantir que la vie juive ne s’affaiblisse pas mais se renforce.
Le deuxième défi est la solidarité. Comme toute famille, celle du peuple juif est mise à l’épreuve. Plus que jamais, nous dépendons les uns des autres. Nous devons surmonter ce qui nous divise, redécouvrir ce qui nous unit. Plus que tout, nous devons nous soutenir les uns les autres. Le virus ne différencie pas les Juifs ultra-orthodoxes des Juifs réformés. L’implosion économique nuit aux libéraux aussi bien qu’aux conservateurs. L’impératif de faire fructifier une communauté juive puissante et unie découle des dangers qui nous entourent. Il est l’heure de l’unité, l’heure de l’harmonie, le temps d’une renaissance de la solidarité juive.
Le troisième défi est l’antisémitisme. À présent, comme autrefois, une épidémie biologique mortelle engendre une vague d’antisémitisme, mettant en danger la vie des Juifs. Sur ce front, il n’y a aucune marge de compromis. Nous devons nous unir contre ceux qui veulent nous détruire. Nous devons protéger chaque Juif, chaque communauté juive qui sont attaqués. Nous devons appliquer le seul remède capable d’éradiquer le virus de l’antisémitisme: la force, la force et encore la force. Ce n’est qu’en restant unis et résolus que nous pourrons contenir la résurgence de la haine qui nous menace.
Le quatrième défi est l’État d’Israël. Au cours de ces derniers mois, Israël a combattu la pandémie de manière remarquable. Les Israéliens ont, une fois de plus, prouvé qu’ils étaient forts et déterminés, capables de faire face à la crise comme une nation unie. Mais, cette pandémie a également généré une certaine tension entre l’État juif et les Juifs de la diaspora. Beaucoup se sentent frustrés puisqu’il leur est interdit de voyager dans ce pays qu’ils considèrent comme leur deuxième foyer.
Pour affronter les défis colossaux de 2020, le monde juif doit se préparer et renouveler son organisation. Premier besoin urgent: une initiative ambitieuse pour apporter l’aide médicale israélienne ainsi que d’autres, aux communautés juives ravagées par le coronavirus. Deuxièmement, il est impératif de développer une approche globale pour faire la guerre à l’antisémitisme partout où il relève sa face hideuse. Il nous faut des mesures coordonnées pour que les communautés juives ayant échappé au pire de la pandémie puissent aider celles qui souffrent. Dernier point, mais non le moindre, des actions intensives au sein de chaque communauté de sorte que les plus chanceux soutiennent ceux avec qui le destin a été cruel.
Avant tout, nous devons renouveler le mot d’ordre «un pour tous, tous pour un», embrasser à nouveau notre éthique séculaire de responsabilité mutuelle et d’amour pour Israël. Dans le monde post-Covid-19, la mondialisation va régresser, le nationalisme s’intensifier. Nous devons agir par la promotion de l’esprit juif éclairé, généreux, humaniste et démocratique. Nous devons nous engager à affronter ce qui nous attend encore avec courage et détermination, comme une grande famille unifiée.
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