Nous devons notre vie aux éléphants, selon les archéologues de l’Université de Tel-Aviv

A l’occasion de la Journée mondiale de l’éléphant célébrée la semaine dernière, qui a mis en mettre en garde contre la disparition progressive de ces grands mammifères, le Prof. Ran Barkai, chef du département d’archéologie et des cultures du Proche-Orient ancien de l’Université de Tel-Aviv, explique que nous devons sauver les éléphants, non seulement parce que leur disparition bouleverserait l’écosystème, mais aussi car nous avons une dette envers eux.

Un plaidoyer émouvant en faveur de nos amis en voie de disparition.

Le Prof. Barkai étudie les liens culturels et biologiques existant entre l’homme et l’éléphant depuis des millions d’années : « C’est grâce aux éléphants que nous avons pu vivre depuis deux millions d’années », déclare-t-il. « Ce sont eux qui ont permis l’existence et la prospérité de l’espèce humaine dans les temps anciens, et avons donc une grande dette envers eux. Ils sont maintenant dans une situation critique, et c’est notre tour de les aider à survivre. »
L’homme et l’éléphant: une romance qui a commencé il y a deux millions d’années
Ces dernières décennies, la population des éléphants d’Afrique et d’Asie va en diminuant. Dans la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), principale ONG mondiale consacrée à la préservation des espèces biologiques, les éléphants sont catalogués comme espèce en voie de disparition. Certains estiment que leur nombre total dans le monde ne dépasse pas 500 000. La raison la plus évidente leur  diminution est le braconnage pour la production d’ivoire à partir de leurs défenses.
La Journée mondiale de l’éléphant, marquée chaque année le 12 août est consacrée à la conservation et à la protection des éléphants dans le monde. L’initiative, lancée en 2011 par deux cinéastes canadiens en collaboration avec la Fondation gouvernementale thaïlandaise, a pris de l’ampleur et est désormais prise en charge par plus de 65 organisations pour la protection des animaux sauvages dans le monde entier.
« Les éléphants et les mammouths étaient des animaux très importants dans le monde des anciens humains », explique le Prof. Barkai. « Depuis toujours les hommes ont été attirés vers les éléphants et ils ont partagé leur habitat avec eux pendant de très longues périodes». La romance entre l’homme et l’éléphant a commencé il y a environ deux millions d’années avec l’émergence de l’Homo erectus, ancêtre direct de l’homme moderne. « L’Homo erectus a été le premier à chasser de manière systématique, car les proportions de son corps et le volume développé de son cerveau exigeaient de plus grandes quantités de nourriture. Les éléphants et les mammouths ont pu lui procurer une combinaison de graisse et de viande optimale sur le plan calorique, ainsi que des repas rassasiants et nutritifs pour toute une tribu pendant des semaines».
Une entité soeur
Mais les éléphants ne constituaient pas seulement une source de nourriture, ils jouaient aussi un rôle central dans la culture des anciens hommes, qui voyaient en eux des partenaires de leur existence, et les traitaient comme des animaux développés, une sorte d’entité sœur, en grande partie en raison de leurs similitudes avec eux (durée de vie, soins de la progéniture, transmission des connaissances et apprentissage, démonstrations d’affection et d’inquiétude, entre-aide, intelligence élevée, soin des morts). « L’homme préhistorique respectait des règles claires sur la manière dont il utilisait les éléphants. Même s’il devait les chasser pour ses besoins de survivance, il le faisait d’une manière rationnelle et prenait soin d’utiliser toutes les parties de l’animal. Il fabriquait des outils, des pendentifs, des perles et des figurines en os et en ivoire, construisait des structures d’habitation avec les os des mammouths. Enfin il les dessinait dans ses peintures rupestres ». Cet ensemble complexe de relations indique une longue tradition de coexistence entre les humains et les éléphants.
Selon le chercheur, il est difficile de savoir ce qu’impliquerait la disparition de la population de ces grands mammifères de la surface de la terre. On sait cependant que leur extinction dans la région d’Israël et du Levant il y a environ 400 000 ans a provoqué l’apparition d’un nouveau type d’humain, l’homme moderne, qui a apporté avec lui une nouvelle culture de chasse, de nouveaux outils et la technologie de l’utilisation du feu.
La ruée vers l’ivoire
Une chose est claire cette disparition provoquera des changements dans l’écosystème : « L’homme va perdre un partenaire très important qui l’a accompagné pendant deux millions d’années », explique le Prof. Barkai. « Dépendant de l’éléphant, il a eu l’intelligence de le chasser seulement quand c’était nécessaire et a réussi à maintenir leur population pendant des millions d’années. Sa survivance dépendait de manière essentielle du fait que ces animaux étaient dans son environnement. Il y a donc quelque chose de très important dans ce lien entre nous et les éléphants, vous pouvez même appeler cela une dette existentielle. La ruée vers l’ivoire a entrainé une chasse irresponsable qui menace la continuation de leur espèce et je pense que nous devons veiller à ce que nos amis les éléphants ne disparaissent pas de la terre ».
Source : Les Amis Français de l’Université de Tel Aviv
Sivan Cohen-Wiesenfeld, PhD
Rédactrice en chef du site des Amis français et des Amis francophones de l’Université de Tel-Aviv

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