S’imposer dans l’univers de la tech
Cette acquisition, «pour un prix très raisonnable», précise Christophe Victor, directeur général délégué du Groupe Les Echos, permet surtout au groupe de presse de mener à grande vitesse son offensive dans l’univers de la tech.
Il avait déjà largement entamé cette stratégie l’année dernière, en lançant une initiative ambitieuse dans l’événementiel, avec Viva Technologies, trois journées de conférences autour des start-up et de l’innovation, avec pour partenaire le groupe Publicis, chargé, entre autres, d’attirer les sponsors. Parallèlement, le quotidien s’était enrichi d’une page consacrée à l’actualité des start-up.
Le 15 juin prochain, pour l’ouverture de la seconde édition de Viva Technology, il bénéficiera même d’un nouveau relais: il va lancer, pour l’occasion, un magazine en anglais, The Innovator, avec 50 pages portant sur l’innovation et la transformation digitale. Ce magazine gratuit sera joint au quotidien, et diffusé six fois par an, à l’occasion d’événements tech comme le Web Summit de Lisbonne. Pour son lancement, le groupe a recruté une journaliste américaine chevronnée, Jennifer Schenker, qui va travailler avec un réseau de pigistes. Au programme, «une technologie dans chaque numéro. Le premier, diffusé lors de Viva Tech, nous sera centré sur l’intelligence artificielle», précise à Challenges sa rédactrice en chef. Chaque numéro sera articulé autour du colloque qu’il supportera, avec des entretiens de speakers attendus. Côté web, le site sera hébergé sur la plateforme social Medium. Et le groupe a noué un partenariat avec LinkedIn, pour assurer son développement viral.
Assurément, le groupe de presse économique, propriété du groupe LVMH, veut mettre les bouchées doubles sur ses activités de services. «Les services assurent 35% de notre chiffre d’affaires (180 millions d’euros en 2016)», précise Christophe Victor. «Plus que jamais, nos clients veulent que nous décryptions les transformations digitales des entreprises. NetExplo sait identifier les tendances émergentes de la société».
Le groupe compte maintenant sur trois activités-clés: les médias, mais aussi «les talks» (Les Echos, Viva Technology, etc), et d’activités de coaching. L’entrée dans son giron de Netexplo apporte «nos études et nos Livres blancs, notre plateforme de Moocs (formations en ligne), désormais proposées aussi bien aux PME qu’aux grands groupes», précise Thierry Happe, fondateur de Netexplo, qui rejoint les équipes du groupe Les Echos. Le groupe organisera même, à partir de la fin de l’année, des learning expeditions, par exemple en Israël et à Boston.
Concurrence
Parviendra-t-il, pour autant, à rentabiliser cette omniprésence ? La première édition de Via Technology, avec 8 millions d’euros de chiffre d’affaires annoncé, n’avait pas été rentable pour autant.
Sans compter que le groupe arrive sur un terrain de jeu déjà largement encombré. Par d’autres agences indépendantes et par des médias, «qui cherchent de nouvelles sources de revenus vers l’événementiel», résume Olivier Ezratty, consultant et auteur du Guide des start-up. Avec par exemple Les Echos donc, Challenges avec le Sommet des start-up, et des jeunes médias spécialisés dans les start-up, tels Frenchweb et Maddyness. L’offre s’est diversifiée. Plus encore depuis la disparition en 2015 des conférences Le Web, avec lesquelles l’entrepreneur Loïc Le Meur avait développé en France ce format de conférences XXL censées drainer des start-uppers des quatre coins du monde. Exemples: les 19 et 20 juin, le cabinet de conseil Octo va organiser la dixième édition des conférences USI, qui ont drainé 2 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2016. Au menu, «des talks de 40 minutes. Mais sans exposants ni sponsors», résume François Hisquin, président fondateur d’Octo. Autre acteur, le Hub Institute (3,5 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2016), qui organise une fois par an le Hub Forum, conférence portant sur le marketing digital, et dix fois par an les Hub Days, des conférences dans les locaux du Medef.
Tous espèrent capter une partie du budget marketing de gros sponsors, tels Google, Microsoft ou Google. Seulement, «les offres de sponsoring des entreprises se concentrent sur les plus gros événements, comme Viva Technology. Faute de sponsors, d’autres organisateurs ont mis la clé sous la porte, comme Rude Baguette», constate Olivier Ezratty.