Niv Adi, spécialiste des questions de défense et de cybersécurité, était l’invité d’Ilana Ferhadian ce mercredi matin sur Radio J, à 7h45. Il est revenu sur le scandale Pegasus.
L’affaire Pegasus est la bombe médiatique de la semaine : le 18 juillet dernier, Forbidden Stories et Amnesty International révélaient la surveillance massive de journalistes et de chefs d’État du monde entier par l’intermédiaire de ce logiciel espion israélien.
Niv Adi rappelle sur Radio J comment fonctionne ce logiciel et qui en est à l’origine : « Pegasus est développé à l’origine dans le Mossad. Jusqu’en 2011 personne n’a entendu parler de lui. Le Mossad et les personnes qui le dirigeaient en 2011 ont décidé d’exporter et de transférer une partie de ce logiciel dans une compagnie privée. Malheureusement, ceci est devenu hors de contrôle. Ils ont été très loin dans l’idée au début d’aller vers des gouvernements, de permettre de commercialiser différemment de ce que le Mossad pouvait faire. […] Il a été transféré dans des mains moins responsables ».
Ainsi, dans cette situation, il est important pour Niv Adi de « séparer l’État d’Israël, l’image de l’État d’Israël et cette affaire embarrassante contrôlée par des bandits ou des personnes qui travaillent dans le monde du cyber ».
Et le spécialiste poursuit : « Il faut que l’État d’Israël sorte de sa cachette et parle très clairement. […] Il doit faire une commission très rapide, aller vraiment en avant, parler, se détacher de l’image de cette compagnie commerciale et très vite défendre et arrêter. Ce sont des affaires qui arrivent quand les technologies avancent plus vite que les politiques, le contrôle légal ».
Israël peut-il craindre une riposte de la part des personnes impliquées ? Niv Adi est dubitatif, et rappelle que ce genre d’affaire a déjà eu lieu : « Tout le monde a toujours utilisé des écoutes téléphoniques, notamment dans le cadre des écoutes secrètes téléphoniques de François Mitterrand, ou plus récemment le scandale avec Facebook. Cela est souvent arrivé que des États écoutent d’autres États».
Dans le même temps, Israël se retrouve face à une autre inquiétude : la menace cyber terroriste, notamment venant de la République islamique d’Iran. Mais Israël ne se laisse pas faire…Récemment, une mystérieuse cyber-attaque ciblait le réseau ferroviaire iranien et ses infrastructures internet. Niv Adi estime que Jérusalem pourrait bien en être à l’origine, comme pour d’autres attaques : « Israël dit à la fois vouloir faire un deal avec l’Iran. Et, de l’autre côté, il s’agit d’un pays terroriste. Quand ils sont sur les listes terroristes, tout est possible pour retarder, pour attaquer, pour éliminer ».
Mais les hackers iraniens sont aussi de leur côté toujours très actifs. Ils existent depuis plus de trente ans. En mars dernier, ils ont par exemple ciblé d’éminents chercheurs aux États-Unis et en Israël.
Cependant, la situation n’inquiète pas vraiment Israël, comme l’explique Niv Adi au micro d’Ilana Ferhadian : « Il n’y a aucune inquiétude d’un point de vue israélien. Il pourrait y avoir une inquiétude du côté des États-Unis puisqu’ils manquent de dizaines de milliers d’employés dans la défense cybernétique. En Israël, c’est beaucoup plus hermétique. On est attaqués des centaines, des milliers de fois par jour. Pas seulement par l’Iran mais aussi par beaucoup de hackers ».
Le risque est malgré tout présent : C’est toujours la course puisque tout le monde développe en permanence de nouvelles technologies. Ce sont les forces de renseignements militaires qui doivent contrôler et avoir les outils pour lutter », conclut le spécialiste en cybersécurité.
Cécile Breton (Radio J)