L’industrie aéronautique européenne, et israélienne en particulier (très puissante), retient son souffle. Le nouveau Falcon que Dassault Aviation (actif en Israël) va dévoiler sera désormais le seul nouveau programme du secteur, élaboré à partir d’une page blanche.
L’avion sera présenté sur Internet ce jeudi à 18 heures (heure de Tel-Aviv), un horaire compatible avec New York et Hongkong, deux marchés importants pour l’aviation d’affaires.
Selon Le Point : « Peu d’informations ont filtré sur ce projet qui occupe le bureau d’études de Saint-Cloud depuis trois ans. Chez Dassault (11 000 salariés), on respecte le secret-défense lié à la production du chasseur Rafale et les fournisseurs savent aussi tenir leur langue au risque de perdre des contrats. Faute de décrire ce que sera le NX, on peut montrer ce qu’il ne sera pas, dans le contexte d’un marché d’avions d’affaires haut de gamme dominé par l’américain Gulfstream et le canadien Bombardier. Le premier a livré l’an dernier 127 appareils, le second 114 et Dassault 34, selon les chiffres de Gama, la fédération internationale de l’aviation d’affaires.
Le nouveau Falcon ne sera pas un avion supersonique. Chez Dassault Aviation où existait un temps une cellule de veille sur un programme supersonique, on a renoncé à cet enjeu, faute de moteur existant ou en projet. Les dérivés de réacteurs militaires, comme c’était le cas sur Concorde, sont trop gourmands, trop bruyants et très exigeants en maintenance pour un appareil civil. De plus, l’exigence environnementale exclura vraisemblablement tout supersonique des routes aériennes, même océaniques.
Le NX ne sera pas un petit Falcon et ne visera pas non plus l’entrée de gamme de l’aviation d’affaires, c’est-à-dire un appareil de six places pouvant rayonner vers l’Europe proche. Le marché, très concurrentiel, est couvert par le brésilien Embraer, les américains Beechcraft et Cessna, le suisse Pilatus, le français Daher, etc. tandis que le canadien Bombardier s’est retiré de la marque mythique Learjet. De plus, les coûts de production de Dassault Aviation ne sont pas compatibles avec ceux requis pour de tels appareils…
Bi ou triréacteur comme l’étaient les Falcon 50, 900, 7X et 8X ? Il semble qu’avec le dernier-né – le Falcon 6X actuellement aux essais en vol – la formule biréacteur devienne pérenne. Outre l’aspect psychologique, le troisième moteur présentait autrefois un bilan aérodynamique plus favorable qu’avec deux gros réacteurs. Aujourd’hui, la technologie a progressé, et même avec un moteur en panne, un biréacteur est certifié pour voler trois heures, presque la moitié de la traversée de l’Atlantique. Le triréacteur permettait aussi de rapatrier en vol ferry (sans passager) en volant avec deux moteurs, par exemple, depuis le fin fond de l’Afrique ou de l’Asie. La conception modulaire des réacteurs simplifie désormais les dépannages et la maintenance prédictive réduit les pannes.
Quelles dimensions de cabine ? Il semble là aussi que le Falcon 6X, avec la plus grande cabine du marché (1,98 m sous plafond et 2,58 m de large) fasse école. La réaction des clients y est très favorable, et Dassault Aviation dame le pion à Bombardier et Gulfstream dans cette catégorie de l’avion long-courrier haut de gamme. Le fait de se déplacer facilement dans la cabine est apprécié. Celle-ci peut devenir successivement un bureau, une salle de conférences, une salle à manger, un espace pour dormir, ce qui implique des mouvements de passagers contents de ne pas baisser la tête. Le personnel soignant appréciera aussi lors des évacuations sanitaires.
L’autonomie est un des arguments de vente d’un avion d’affaires (10 186 km pour le 6X à 11 945 km pour le 8X), mais il faut parfois la relativiser. Une cible pourrait être un rayon d’action de 14 000 km (comme le G700 de Gulfstream), soit près de 17 heures de vol. C’est long, très long même dans une cabine confortable avec lits et douche. Peu de dirigeants d’entreprise effectuent de tels voyages. En revanche, réaliser un tour d’Europe ou d’Afrique en multipliant les escales sans être astreint à avitailler en carburant peut être un atout. Il est fréquent que des avions d’affaires utilisent des aérodromes à l’infrastructure minimale. Peut se tenir alors à bord une conférence avec des clients ou des collaborateurs, à l’abri des oreilles indiscrètes.
Le nouveau Falcon sera plus électrique. Chez Dassault, l’avionique – les systèmes de communication et de navigation – est toujours à la pointe du progrès et devient cinq ans plus tard des normes pour l’industrie aéronautique civile. Ainsi en est-il du track-ball, la souris du cockpit, apparu sur Falcon en 2003 qui équipera plus tard l’Airbus A380. De même, le Système de descente d’urgence automatique, livré récemment en série sur l’Airbus A350, était intégré sur les Falcon depuis le 7X en 2007.