Miki Ziv n’a pas un travail facile. La plupart du temps, il ne croise que des mécontents. Enfin, quand ils réussissent à parvenir jusqu’à lui. Car il s’est organisé pour ne pas être débordé. Sa secrétaire filtre les appels et ne laisse entrer les visiteurs qu’au compte-gouttes dans son bureau. Il peut colmater quelques brèches, mais que faire face à une cascade de récriminations ? Bonne figure, c’est déjà ça.
Voilà huit ans que cet ancien militaire aux cheveux rares et aux yeux rieurs est le directeur général de la gare routière de Tel-Aviv. Gérer une gare n’est jamais une sinécure. Et celle-là encore moins que tout autre.
Car cet immense bloc de béton de sept étages possède la particularité peu enviable d’être probablement le bâtiment le plus détesté des habitants de la ville. Trop laid, mal conçu, peu pratique, il doit également lutter contre sa réputation de coupe-gorge, certes exagérée, mais pas totalement usurpée.
Après plusieurs meurtres et viols, les faits divers sont devenus plus rares depuis cinq ans, se félicite Miki Ziv : la police multiplie les rondes, des caméras de surveillance ont été installées, ainsi que des portiques de sécurité aux entrées.
Sur un mur de son bureau, au cinquième étage de ce paquebot échoué dans le quartier populaire de Neve Sha’anan, dont il occupe un quart de la surface, le directeur a affiché les tout premiers plans de l’immeuble, dessinés en 1967.
Pour rappeler à ses visiteurs que la Tahana Merkazit Harishona (« la nouvelle gare centrale »), avant d’être honnie, fut un projet phare de la ville. Et qu’elle mérite au moins la compréhension que l’on accorde aux utopies, même lorsqu’elles ont échoué.
Un fleuron déchu
À l’époque où il a été pensé, cet édifice devait être la plus grande gare routière du monde et la tête de gondole de la modernité de Tel-Aviv.
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