C’est Tu Beav, la Saint Valentin israélienne. Le quinzième jour du mois d’av est, selon la tradition rabbinique, l’un des jours les plus joyeux de l’année juive à l’époque des Temples de Jérusalem. Il s’agit actuellement d’une fête juive mineure, considérée comme un jour particulièrement propice aux mariages et au cours duquel les manifestations de deuil sont proscrites.
Selon ce récit, la concubine d’un Lévite meurt des suites de son viol par des jeunes Benjaminites (de Guiva) ; une guerre tribale s’ensuit, suivie de l’ostracisation des Benjaminites du reste d’Israël. Cependant, afin d’éviter la disparition d’une tribu israélite, les Anciens de l’assemblée leur suggèrent de se rendre à « une fête à YHWH célébrée annuellement à Silo […] lorsque vous verrez les filles de Silo sortir pour danser en chœur, vous sortirez vous-mêmes des vignes, vous enlèverez chacun une femme parmi les filles de Silo, et vous vous en irez au pays de Benjamin ».
Cette cérémonie se produisant dans les vignobles (que la Bible associe allégoriquement à l’amour) a lieu, selon les Sages de la Mishna, à Yom Kippour et le 15 av. C’était les deux jours les plus joyeux en Israël, aux dires du patriarche Shimon ben Gamliel ; tous les jeunes célibataires de Jérusalem sortaient danser dans les vignobles avec des habits blancs qui leur ont été prêtés (afin que les riches ne fassent pas honte aux pauvres), les filles invitant les garçons à les prendre.
La Mishna ne donne pas les raisons de cette célébration, ni celles de l’affirmation de Rabban Shimon ben Gamliel.
Selon la Meguilat Taanit, rédigée environ un siècle auparavant, le 15 av était le jour du korban etzim (« offrande des arbres »), au cours duquel les cohanim, les leviim et de nombreux laïcs apportaient du bois à brûler en grande quantité à l’autel des offrandes ; le climat rendait le bois assez sec pour qu’il soit certain qu’il ne contenait pas de vers (ce qui l’aurait rendu impropre à un usage saint) et qu’il ne soit plus nécessaire d’en couper en forêt, probablement jusqu’au 15 shevat (les commentateurs médiévaux font remarquer que de même que le raccourcissement des jours, l’allongement des nuits devient perceptible et qu’il convient d’étudier davantage chaque nuit).
Flavius Josèphe mentionne aussi cette fête sous le nom de τῆς τῶν ξυλοφορίων (tès tôn xylophorion, « fête d’apport du bois ») mais donne la date du 14 av (loos).
Les docteurs du Talmud proposent quant à eux six explications : outre le jour du korban etzim et la permission donnée aux Benjaminites de s’unir aux filles d’Israël (cf. supra), c’est un 15 av que :
- les tribus furent autorisées à se marier entre elles, à la suite de l’épisode des filles de Tselof’had
- le roi Osée retira les sentinelles placées par Jéroboam pour empêcher les Israélites de se rendre au Temple de Jérusalem lors des fêtes de pèlerinage (le Talmud de Jérusalem fait remarquer qu’il ne rendit pas le culte de YHWH obligatoire mais permit de pratiquer le culte de façon libre. Il demeure pour cette raison un roi qui « fit le mal aux yeux de YHWH » et voit sous son règne l’Assyrie envahir son royaume et déporter sa population)
- les gens de la génération du désert constatèrent que le décret divin condamnant les Israélites de la génération des explorateurs à mourir dans le désert, avait pris fin
- l’autorisation fut donnée aux Juifs d’enterrer les morts de la forteresse de Betar (dernier bastion des insurgés lors de la révolte de Bar Kokhba).
La plupart de ces explications comporte un motif de pardon, justifiant la comparaison du 15 av à yom kippour. De plus, comme les deux dernières raisons données ci-dessus marquent la fin de deux décrets par lesquels on justifie le jeûne du 9 av et qu’une tradition veut que le Temple soit reconstruit le mois où il a été détruit, certains en ont déduit que cet évènement aurait lieu le 15 av.