EDITORIAL. YOUVAL BARZILAY. Une réalité dure à avaler. Le french-bashing de haute intensité revient. 

Sur les réseaux sociaux les caricatures anti-France foisonnent. On invective sans vraiment en mesurer les conséquences.

Un homme nous manque. Sa qualité reconnue par tous : il construisait des arguments solides. Commandeur de la Légion d’honneur, Shimon Peres a toujours été un grand ami de la France. Par temps de paix où de turbulences.

En temps de guerre, comme cela est le cas actuellement, il aurait demandé à son chauffeur de se rendre à l’Ambassade France à Tel-Aviv Yafo pour échanger, discuter, argumenter, convaincre.

Il aurait donné son avis sur la création d’un Etat Palestinien. Il aurait pris un avion pour parler au Président français et aux Ministres français.

Malheureusement très peu d’israéliens ont la force et le courage de prendre des initiatives solides pour limiter la fracture entre la France et Israël.

LE PLUS.

Shimon Peres mort le à Ramat Gan (Israël), a été un grand homme d’État israélien. Il est Premier ministre d’Israël en 1977 (par intérim), de 1984 à 1986 et de 1995 à 1996, et président de l’État d’Israël de 2007 à 2014.

Après une carrière diplomatique entamée après la guerre d’indépendance israélienne, il devient haut fonctionnaire au service du gouvernement israélien comme directeur adjoint, puis directeur général du ministère de la Défense entre 1953 et 1959. Après cette période, il commence une longue carrière politique.

Membre du Mapaï, du Rafi puis du Parti travailliste, il siège comme ministre au sein de douze gouvernements, ce qui lui confère une longévité inédite. Il occupe à trois reprises la fonction de Premier ministre entre 1977 et 1996. Respecté dans le monde occidental, Shimon Peres reçoit, avec Yasser Arafat et Yitzhak Rabin, le prix Nobel de la paix 1994 pour sa participation aux pourparlers de paix avec les Palestiniens ayant mené aux accords d’Oslo.

Après avoir rejoint le parti centriste Kadima, fondé par Ariel Sharon, il est élu à la présidence de l’État d’Israël à l’issue de l’élection de 2007, devenant ainsi le premier ancien chef du gouvernement désigné chef de l’État dans l’histoire d’Israël. À l’issue de son septennat, il met un terme à sa carrière politique, à plus de 90 ans.

Après la mort d’Ariel Sharon en 2014, Shimon Peres était le dernier survivant de la génération des « pères fondateurs » de l’État d’Israël.. Yigal Amir se résout à lui laisser la vie sauve, et conserve ses munitions pour Yitzhak Rabin.

À la suite de cet assassinat, Peres redevient Premier ministre et réaffirme sa volonté de poursuivre le processus de paix. Il décide d’avancer de six mois le scrutin qui doit désigner le Premier ministre israélien au suffrage universel par les citoyens. Pendant la campagne électorale, pendant qu’il cumule le rôle de Premier ministre et celui de ministre de la Défense, il lance l’opération militaire Raisins de la colère dans le Sud du Liban. Le bombardement de Cana, où 106 civils qui s’étaient abrités auprès de la FINUL, moururent sous les bombardements israéliens, met un terme à l’opération. L’image de Shimon Peres est fortement endommagée à l’étranger, mais l’impact national est également important[16]. Les semaines précédant l’élection, la cote de popularité de Shimon Peres s’effondre. Son adversaire Benyamin Netanyahou met alors l’accent sur le mauvais bilan des travaillistes en matière de sécurité et les critiques à l’international fusent, certains demandant un retrait du prix Nobel à Peres. Le , le Premier ministre sortant est battu de justesse par le candidat du Likoud, qui recueille 50,5 % des voix. Pour beaucoup, cet échec sonne le glas de sa carrière politique.

Shimon Peres continue d’agir en tant qu’« ambassadeur » non officiel d’Israël, grâce au prestige et au respect dont il jouit dans l’opinion publique internationale et dans les cercles diplomatiques. Il s’efforce de contrecarrer l’activité de propagande des cercles internationaux pro-palestiniens. L’année de sa défaite, le président de la Confédération suisse, Jean-Pascal Delamuraz, lui décerne le « prix de la fondation » lors du forum de Crans-Montana. En 1997, il fonde le Centre Peres pour la Paix, et reste un défenseur résolu des accords d’Oslo et de l’autorité palestinienne, en dépit des deux Intifadas.

Nommé ministre de la Coopération régionale par Ehud Barak le , il subit un nouvel échec personnel lors de l’élection présidentielle de 2000, lorsqu’il est battu, à la surprise générale, par Moshe Katsav. Contre toute attente, il accepte la fonction de vice-Premier ministre, ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement Ariel Sharon. Shimon Peres défend le droit pour Israël à une politique de sécurité, répond aux critiques internationales contre la « barrière de sécurité » élevée par l’État israélien. Il soutient la politique d’Ariel Sharon dans sa volonté d’utiliser les forces armées israéliennes pour contrecarrer la « guerre de la terreur », engendrée par les nombreux palestiniens transformés en bombes humaines, et pour déraciner l’infrastructure politique et militaire de la « résistance » palestinienne et de ses réseaux terroristes. Il qualifia toutefois l’assassinat, en , de Salah Shehadeh (Hamas), de « tragédie », en raison de l’importance des pertes civiles lors de ce bombardement. Il a très longtemps tardé à admettre l’idée d’un État palestinien souverain et ne reconnaît pas le fait de l’occupation israélienne, restant sur la position officielle (« territoires disputés »), ni l’idée d’un retrait de la totalité des territoires occupés[réf. nécessaire]. Il prend position en faveur de la guerre d’Irak de 2003, lors du Forum économique de Davos, où il déclare, notamment, que « la guerre contre le terrorisme commence par Saddam Hussein », et que la guerre en Irak « serait une très bonne chose pour la reprise de l’économie mondiale »[20].

Du Parti travailliste à Kadima

Shimon Peres aux côtés de Yasser Arafat en 2001.

Shimon Peres est battu à l’élection interne du Parti travailliste de 2005 par Amir Peretz. Celui-ci précipite des élections législatives anticipées, en annonçant le départ des travaillistes du gouvernement Sharon.

Le , moins de 24 heures après l’hospitalisation du Premier ministre Ariel Sharon à la suite d’une hémorragie cérébrale, un des responsables de Kadima affirme sous certaines conditions que Shimon Peres devrait être nommé Premier ministre. Mais celui-ci annonce sur Aroutz 1, le , qu’il n’a pas l’intention de redevenir Premier ministre, même si cela lui était proposé. En revanche, il devient le numéro 2 (derrière Ehud Olmert) de Kadima, nouveau parti à vocation centriste créé par Sharon en vue des élections anticipées de mars 2006. Le , il démissionne de son poste de député pour lever les obstacles juridiques à la poursuite de sa carrière au sein de son nouveau parti.

Après la victoire de Kadima, il devient vice-Premier ministre du gouvernement de coalition qu’Ehud Olmert forme avec les travaillistes. Il a également le porte-feuille de ministre du Développement régional chargé de la Galilée et du désert du Néguev.

Président de l’État d’Israël

Shimon Peres à Davos en 2007.

Candidat à l’élection présidentielle de 2007, il arrive en tête du premier tour à la Knesset le en obtenant 58 voix contre 37 pour Reuven Rivlin, le candidat du Likoud et 21 pour Colette Avital, présentée par le Parti travailliste. Aucun des trois candidats n’atteignant la majorité absolue de 61 voix requise pour être élu dès le premier tour, un second tour a lieu le même jour. Dès l’annonce des résultats du premier tour, ses deux concurrents se retirent de la course et déclarent leur soutien à Peres, lui laissant la voie libre. Il est élu président par 86 voix contre 23.

Shimon Peres est investi président de l’État d’Israël le , après avoir prêté serment devant les membres de la Knesset pour un septennat. Il succède à Moshe Katsav, qui l’avait battu sept ans plus tôt, lors du précédent scrutin présidentiel. Le nouveau chef de l’État doit alors restaurer le prestige de la fonction du président de l’État d’Israël, mis en cause par des scandales de mœurs impliquant l’ex-président Katsav.

En , le président Peres reçoit, des mains de la reine Élisabeth II, les insignes de l’ordre de Saint-Michel et Saint-George lors d’une cérémonie organisée au palais de Buckingham, à Londres. Lors de la cérémonie, le chef de l’État israélien s’est dit « très ému de recevoir, en tant qu’émissaire d’Israël, un tel honneur ».

Au Forum économique mondial de Davos de , Shimon Peres et le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdoğan ont une virulente discussion autour de l’intervention israélienne à Gaza. Le chef du gouvernement turc, énervé, déclare qu’il se « souvient très bien de ces enfants qui sont morts sur la plage ». Le président israélien réplique alors qu’il « faut savoir se mettre à la place des autres : que feriez-vous si des dizaines, des centaines de roquettes s’abattaient sur Istanbul ? ». Erdoğan décide alors de prendre ses affaires et de quitter le débat, acclamé par ses partisans de l’AKP qui voient en lui un héros. L’opposition turque (CHP) rappelle cependant que l’État d’Israël reste un allié et que le Premier ministre Erdoğan a manqué de respect à un prix Nobel de la paix.

Le , Shimon Peres entame des consultations pour la formation d’un nouveau gouvernement. Dès lors, il se dit favorable à une grande coalition. Le 24 février, il ouvre la 18e Knesset. Le , Peres rencontre au Beit HaNassi, la résidence présidentielle, le vainqueur désigné des élections législatives, Benyamin Netanyahou et le charge de former un gouvernement. Le 31 mars, Netanyahou est nommé Premier ministre et est investi le lendemain par la Knesset.

Le pape Benoît XVI, en visite officielle en Israël en , est salué par le président Peres au Beit HaNassi. Le , il déclare « être prêt à aller par les airs, la terre, la mer, même à la nage, pour atteindre la paix »[24].

En 2011, le président des États-Unis Barack Obama lui décerne la médaille présidentielle de la Liberté à la Maison-Blanche

 

Mort et hommages

Shimon Peres avec l’ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Samantha Power, en 2016.

Le , après une rencontre avec des dirigeants d’entreprises de nouvelles technologies israéliennes et vingt-trois années jour pour jour après la signature des accords d’Oslo, Shimon Peres est victime d’un accident vasculaire cérébral majeur qui le laisse dans un état critique. Il meurt le 28 septembre 2016 des suites de cet AVC, au centre médical Chaim Sheba.

Fait rarissime aux États-Unis en l’honneur d’une personnalité étrangère, Barack Obama décide la mise en berne des drapeaux sur la Maison-Blanche, ainsi que tous les bâtiments officiels et militaires américains dans le pays et à l’étranger pour une durée de deux jours en hommage à Shimon Peres.

Tombeau de Shimon Peres au Mont Herzl.

Le , son corps est exposé à l’extérieur du Parlement, à Jérusalem. Ses funérailles se déroulent à Jérusalem le lendemain, le , en présence de plusieurs personnalités internationales, parmi lesquelles le président français, François Hollande, et son prédécesseur Nicolas Sarkozy, le prince Charles, le président allemand, Joachim Gauck, le roi d’Espagne, Felipe VI, le président américain, Barack Obama, et son prédécesseur Bill Clinton, accompagné du secrétaire d’État John Kerry et de la conseillère à la sécurité nationale Susan Rice. Le président ivoirien, Alassane Ouattara, est également présent. Le Canada est représenté par le Premier ministre Justin Trudeau, ses prédécesseurs Stephen Harper et Jean Chrétien, ainsi que par le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion, et la chef du Parti conservateur, Rona Ambrose.

Sa disparition ne suscite pas autant d’hommages dans le monde arabe. Aucun chef d’État arabe ou député arabe israélien ne se déplace pour assister à ses obsèques, à l’exception du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas]. Alors que la Jordanie reste silencieuse, le président de l’Égypte, Abdel Fattah al-Sissi, exprime sa « peine profonde » et envoie son ministre Sameh Shoukry à ses obsèques.

Détail des mandats et fonctions politiques

Shimon Peres avec Bill Clinton (Washington, 1996).
  •  : vice-ministre de la Défense
  •  : ministre sans portefeuille
  •  : ministre de l’Immigration
  •  : ministre des Communications, ministre des Transports
  •  : ministre de l’Information
  •  : ministre de la Défense
  • 19771992, 19951996, 20032005 : chef du Parti travailliste
  •  : ministre des Affaires religieuses
  •  : ministre des Affaires intérieures
  •  : Premier ministre
  •  : premier vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères
  •  : premier vice-Premier ministre et ministre des Finances
  •  : ministre des Affaires étrangères
  •  : ministre de la Défense
  •  : Premier ministre (par intérim)
  •  : Premier ministre, ministre de la Défense, à la suite de l’assassinat d’Yitzhak Rabin
  •  : ministre de la Coopération régionale
  •  : vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères
  •  : vice-Premier ministre
  • 20052007 : vice-chef de Kadima
  •  : premier vice-Premier ministre, ministre du Développement du Néguev et de la Galilée et du Développement économique régional
  •  : président de l’État d’Israël

Prix et distinctions

Shimon Peres recevant le Prix Nobel de la paix le , aux côtés de Yitzhak Rabin et Yasser Arafat , « pour leurs remarquables avancées dans les négociations de paix entre Israël et la Palestine »

Décorations

Buste de Shimon Peres à Jérusalem.

Publications

  • David et sa fronde, éd. Stock, Paris, 1971
  • L’héritage des Sept, éd. Stock, Paris, 1981
  • La force de vaincre (entretien avec Joëlle Jonathan), éd. Centurion, Paris, 1981
  • Le Temps de la paix, éd. Odile Jacob, Paris, 1993
  • Combat pour la paix, éd. Fayard, Paris, 1995
  • Le Voyage imaginaire : Avec Théodore Herzl en Israël, éd. Éditions, Paris, 1998
  • Conversations avec Shimon Peres (entretien avec Robert Littell), Paris, Gallimard, 1998
  • Mon dernier rêve : La double hélice, éd. Baker Street, Paris, 1999
  • Que le soleil se lève, éd. Odile Jacob, Paris, 1999
  • Un temps pour la guerre, un temps pour la paix, éd. Robert Laffont, Paris, 2003
  • Un chemin vers la paix (entretien avec Christiane Vulvert), éd. Timée, Paris, 2006
  • 60 Ans de conflit israélo-arabe : Témoignages pour l’Histoire (avec Boutros Boutros-Ghali), éd. Complexe, Paris, 2006
  • Pensées et poèmes, éd. Éditions des Catalogues Raisonnés, Paris, 2008
  • (en) Ben-Gurion : A Political Life, éd. Schocken Books, Berlin, 2011
  • Avec nous, après nous…(avec Jacques Attali), éd. Fayard, Paris, 2013
  • Aucun rêve n’est impo
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