Toute tentative de négociation avec le Hamas dans le cadre d’un accord sur un échange entre des terroristes prisonniers en Israël et les otages détenus à Gaza, aboutit, de façon incontournable, à l’évocation du nom de Marwan Barghouti.

Ce terroriste s’est construit une image publique depuis sa prison et a su s’imposer comme le « chouchou » des sondages auprès de la population palestinienne en Judée-Samarie. Dans le contexte des négociations en cours, sa proximité avec le Hamas, avec qui il a promis de « promouvoir la réconciliation de tous les Palestiniens », pourrait changer la donne politique.

Les autorités israéliennes prennent la question au sérieux. Il y a deux semaines, Barghouti a été transféré de la prison d’Ofer, où il était à l’isolement, à la prison d’Ayalon, où sa détention a été aménagée, contrairement aux procédures habituelles, de peur qu’il ne réussisse, de là bas, à créer des troubles, et notamment un embrasement de la Judée-Samarie.

Au début du mois dernier, un haut responsable du Hamas, Oussama Hamdan, a déclaré à la chaîne libanaise LBCI que, dans le cadre d’un accord, le Hamas avait l’intention d’exiger la libération de prisonniers condamnés à la prison à vie en raison de leur implication dans des attentats. Le seul nom alors cité ouvertement a été celui de Marwan Barghouti.

Barghouti, le candidat le plus populaire dans les sondages.

Les sondages d’opinion menés depuis le début de la guerre auprès des Palestiniens révèlent cette tendance inquiétante : une partie importante de l’opinion publique palestinienne soutient le Hamas et le massacre du 7 octobre. En décembre dernier, un sondage montre qu’au lendemain de la guerre, 75 % des habitants palestiniens de Judée-Samarie préfèrent que le Hamas continue de diriger la bande de Gaza et 72 % estiment que la décision de lancer cette attaque brutale était « justifiée et digne d’éloges »…

Malgré sa longue peine d’emprisonnement, cinq peines à perpétuité pour, entre autres, avoir été reconnu responsable du meurtre de cinq Israéliens lors de la deuxième Intifada, Barghouti a su s’imposer dans le paysage politique palestinien. Dans presque tous les sondages réalisés ces dernières années, il est sacré candidat le plus populaire. De nombreux membres de la jeune génération, qui ne le connaissaient pas, voient dans ce meurtrier un symbole.

Depuis sa prison, Barghouti clame qu’il avait l’intention de succéder à Mahmoud Abbas en prônant la réconciliation des différents courants palestiniens et l’établissement d’un gouvernement d’unité nationale… D’où l’attitude positive du Hamas à son égard.

Qui est Marwan Barghouti ? 

Barghouti est né en 1959 à Kfar Kaubar, près de Ramallah, et appartient à l’une des familles les plus nombreuses et les plus influentes de la région. Entre 1976 et 1978, il est membre du Parti communiste palestinien. En 1978, il est condamné à quatre ans de prison pour implication dans des activités terroristes. Au cours de ses années derrière les barreaux, il rejoint les rangs du Fatah et apprend l’hébreu.

Lors de la première Intifada, il mène d’énormes manifestations contre le gouvernement israélien en Judée-Samarie et est arrêté et expulsé vers la Jordanie en 1987. De là, il coordonne la direction des activités du Fatah en Judée-Samarie.

Son retour dans la région est rendu possible grâce aux accords d’Oslo en 1994. Il prend alors de nombreuses mesures considérées comme un défi envers le leadership d’Arafat. Barghouti s’impose comme la voix centrale qui représente la jeune génération, celle qui veut remplacer l’ancienne dans les institutions dirigeantes du mouvement. En 1996, il est élu membre du Conseil législatif sur la liste du Fatah dans le district de Ramallah.

Après le déclenchement de la deuxième Intifada, Barghouti soutient la lutte armée contre Israël et dirige la branche armée du Fatah, responsable de nombreux attentats contre les Israéliens. En avril 2002, il est capturé par Tsahal à Ramallah lors de l’opération « Mur de protection » et est condamné pour les meurtres. Les Palestiniens le comparent à Nelson Mandela.

Quoi qu’il en soit, l’aspiration et la sympathie du public palestinien pour Barghouti témoignent du vide de leadership qui existe à Ramallah, vide qui ne devrait que s’intensifier. Et même si Israël tente de lancer des initiatives visant à améliorer l’image de l’Autorité palestinienne, il est évident que l’effet est essentiellement cosmétique. Une chose est claire : un scénario dans lequel le Hamas insiste sur la libération de Barghouti comme condition sine qua non à un accord posera un véritable défi à l’establishment sécuritaire israélien.

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