Si les relations d’Israël avec l’Afrique se caractérisent généralement par leur pragmatisme mâtiné d’une certaine dose d’opportunisme, la démarche semble surtout empirique en matière de diplomatie au rythme des possibles extensions des Accords d’Abraham sur le continent, quand elle se fait bien plus volontariste en matière économique, emmenée par le secteur privé et associatif.
« Depuis bientôt vingt ans, les entreprises et les différentes organisations non gouvernementales sont bien plus actives en Afrique que les pouvoirs publics israéliens », insiste l’universitaire Galia Zabar, spécialiste du continent à l’université de Tel-Aviv. Au point de faire la course en tête sur le continent, aux avant-postes de relations économiques et commerciales où le business pur côtoie l’aide au développement.
L’essentiel pour les Israéliens semble en effet de contribuer à tirer l’Afrique vers le haut, en faisant profiter le continent des différentes technologies – hier agricoles et hydrauliques, aujourd’hui numériques ou financières -, qui ont permis de développer leur pays en seulement quelques décennies, dans un contexte géographique et climatique assez similaire à celui d’une bonne partie du continent (…).
C’est d’ailleurs avec cette philosophie en tête qu’Israël s’était engagé dès les années 1960 aux côtés des pays africains nouvellement indépendants, jusqu’au boycott d’Israël décrété en 1973 par l’Organisation de l’unité africaine (OUA), ancêtre de l’UA, alors sous forte influence libyenne.
Puis le relai a été pris par le Mashav, l’agence gouvernementale de coopération internationale israélienne, créé en 1958 et qui continue de jouer son rôle à travers le continent.
Mais, avec un budget inférieur à 30 millions d’euros en 2021, il ne dispose plus des moyens qui permettraient à Israël de retrouver l’influence qui était la sienne sur le continent il y a plus d’un demi-siècle. Conscient de ses limites, le gouvernement israélien, à commencer par son ministère des Affaires étrangères, a mis en place tout un ensemble de mécanismes financiers destinés à accompagner les initiatives israéliennes – privées, associatives, voire caritatives -, orientées vers l’Afrique.
En s’associant à des programmes comme Desert Tech ou Innovation Journey, ou à des fondations privées, les pouvoirs publics améliorent sensiblement leur force de frappe sur le continent. Avant de s’engager, comme l’affirme Yael Ravia-Zadok, directrice générale adjointe du département économique du ministère des Affaires étrangères, « à développer les synergies avec les partenaires multilatéraux de l’Afrique, comme la Banque mondiale ou les différentes organisations financières régionales », pour gagner encore plus en visibilité.
Car malgré les efforts réalisés ces dernières années, Israël pèse peu dans les grands indicateurs économiques du continent, comme l’illustre les échanges commerciaux entre les deux partenaires qui ne dépassent pas les 2 milliards de dollars par an. Ne disposant ni des moyens financiers de l’État chinois, ni du soutien affiché de ses responsables politiques, les entrepreneurs israéliens comptent donc essentiellement sur leur savoir-faire et sur leur avancée technologique pour faire la différence face à la concurrence internationale dans de nombreux domaines.
L’objectif reste avant tout « de réaliser des affaires, confirme Sinai Gohar-Barak, responsable du programme Desert Tech, mais jamais au détriment de l’Afrique ». Qu’il s’agisse d’agriculture, de finance, d’hydraulique et d’énergie, de sécurité ou encore de santé, les Israéliens qui travaillent en Afrique se font fort d’apporter les toutes dernières technologies disponibles à leurs partenaires, en les adoptant si besoin au contexte propre au continent.
Les autres observent un marché encore mal connu dans leur pays malgré sa proximité, et dont la perception du risque reste encore trop importante comparée à un marché israélien certes limité en taille, mais très dynamique et plus rapidement rémunérateur. Conscient du rôle de « facilitateur » qui lui incombe, le gouvernement compte bien, depuis Tel-Aviv, à continuer de s’appuyer sur « l’écosystème » israélien mis en place au fil des années pour pousser les investisseurs à franchir le pas et ainsi aider Israël à retrouver le rôle qui a été le sien en Afrique.
Source : Jeune Afrique & Israël Valley
https://www.jeuneafrique.com/1409897/economie/israel-un-ami-qui-veut-du-bien-a-lafrique/