Caroline Haïat est journaliste pour le site français d’i24NEWS.
Noa Krotman, jeune israélienne de 24 ans, a choisi de faire ses études à Milan, la capitale mondiale du design. Elle note que l’approche du domaine étudié à l’étranger est différente et plus large que celle proposée dans l’Etat hébreu. Elle considère également qu’une fois rentrée en Israël, l’obtention d’un stage puis d’un emploi est plus facile lorsque l’on possède ce bagage culturel importé de l’étranger.
Et puis, pour la plupart des Israéliens comme pour n’importe quel jeune du monde, le désir d’émancipation, de nouvelles rencontres et d’expériences de vie, loin du cocon familial, motive cette « envie d’ailleurs ».
« Mes parents ont vécu à New-York pendant un an lorsqu’ils avaient mon âge. J’ai grandi avec les récits de leur aventure et j’ai toujours été fascinée par l’idée de vivre dans un autre pays. Quand j’ai su que je voulais étudier le design d’intérieur, il était clair que pour un domaine aussi compétitif, je devais étudier dans un endroit qui me donnerait des avantages, alors je suis partie à Milan dans une université privée », raconte-t-elle.
La jeune fille explique que cela lui a également prouvé qu’elle pouvait se débrouiller par elle-même dans toute situation.
« L’éloignement de ma famille et de mes amis me permet d’en apprendre beaucoup sur mes capacités personnelles. A mon âge, j’ai déjà animé un seder de Pessah, j’ai dû aller à l’hôpital et gérer plein de choses seule, sans filet de sécurité, cela m’a donné une grande confiance en moi », assure-t-elle.
En octobre, Noa entamera sa troisième et dernière année de licence.
« C’est une expérience incroyable! J’étudie dans un programme international, ce qui me permet d’être en contact avec des personnes qui viennent des quatre coins de la planète. Mon anglais s’est aussi considérablement amélioré », a-t-elle dit.
Pour Gil Ezovi, qui a fait son MBA (master en management et gestion d’entreprise) pendant deux ans au sein de la prestigieuse université Esade de Barcelone, l’une des plus réputées au monde, l’objectif était de travailler ensuite en Europe.
« Plusieurs membres de ma famille ont étudié à l’étranger et j’ai toujours eu envie de sauter le pas, puis je suis arrivé à un moment de ma vie où j’avais besoin d’un changement et j’ai saisi l’opportunité. J’ai la nationalité européenne donc c’était plus simple pour rejoindre le continent », a-t-il raconté.
Arrivé en Espagne à l’âge de 34 ans, Gil avait déjà travaillé en Israël avant de reprendre ses études.
« C’était une vraie pause pendant deux ans de la vie professionnelle car j’ai pu me concentrer pleinement sur mes études et profiter avec mes amis. Dans ma promo, il y avait 180 personnes originaires de pays où je n’avais jamais été et cela m’a offert la possibilité de découvrir des gens différents, avec des modes de vie et des idées qui m’étaient inconnus auparavant. Ce sont des amis pour la vie », a-t-il déclaré.
Gil assure que l’expérience à l’étranger donne une perspective professionnelle et personnelle que les Israéliens ne peuvent pas obtenir s’ils étudient chez eux avec des camarades qui ont un parcours de vie similaire au leur.
Après l’obtention de son diplôme, Gil a été recruté en Allemagne dans une entreprise de technologie. Le jeune homme avoue que le salaire attractif est l’une des causes principales qui pousse les Israéliens à travailler à l’étranger.
« Lorsque l’on investit dans un MBA qui coûte très cher (70.000 euros en Europe) c’est avant tout pour trouver un travail en dehors d’Israël, qui sera très bien payé. A l’étranger, l’avantage c’est que ces diplômes sont reconnus partout, le réseau à l’université nous aide aussi à être recrutés et la pluralité des cultures apporte une vraie plus-value aux entreprises », a affirmé Gil.
Igor Kruter, Israélien qui a étudié 5 ans à l’Artez, l’académie d’art à Arnhem aux Pays-Bas, assure que « les études sont beaucoup moins chères et de meilleure qualité » en Europe. « C’était mon rêve d’étudier en Hollande, c’est une culture dont je me sens très proche ».
Cette mobilité pour les étudiants a européens s’est largement démocratisée depuis des années grâce au programme d’échange universitaire Erasmus, créé en 1987 qui connaît un franc succès auprès des jeunes des 33 pays membres. Environ 12 millions de personnes ont déjà pu en bénéficier, dont, depuis 2015, 6.582 étudiants et enseignants sont venus en Israël grâce à Erasmus+.
Car Israël n’est pas en reste et peut aussi se révéler fortement attractive pour les étrangers ! L’Université de Tel-Aviv accueille, par exemple, chaque année, 2.000 étudiants du monde entier.
Le mois dernier, le Conseil de l’enseignement supérieur a annoncé qu’il allait fermer les programmes médicaux américains à l’Université de Tel-Aviv, à l’Université Ben Gurion et au Technion afin de remplacer les 130 étudiants étrangers par des Israéliens en raison du manque de places et de la pénurie de médecins israéliens. Gil estime qu’au contraire, il n’y a pas tellement de concurrence entre les Israéliens et les étrangers en Israël.
« Je pense que fermer ces écoles aux étrangers est une erreur car toutes les analyses montrent que lorsqu’il y a de la diversité, les résultats sont meilleurs. Israël n’a aucune raison de faire une chose pareille et s’ils le font ce serait un coup dur à la qualité des études et des résultats. Ce n’est pas la bonne solution car la diversité est une richesse pour le pays », souligne-t-il.
En Israël, regrette-t-il, il y a peu de masters à temps plein. Il faudrait selon lui recruter davantage d’employés de l‘étranger en Israël pour importer peu à peu le modèle européen au sein des entreprises israéliennes.
La majorité des étudiants en médecine israéliens sont notamment contraints de partir étudier à l’étranger en raison d’un manque de place au sein des établissements. Selon les données de l’OCDE, 60% des étudiants qui quittent le pays seraient des Arabes israéliens. Leurs lieux de prédilection sont la Cisjordanie, la Jordanie, ou encore la Roumanie et l’Ukraine.
De nombreuses initiatives sont toutefois mises en place pour aider les étudiants étrangers à venir en Israël comme le Minhal Hastudentim, branche du ministère de l’Alyah et de l’Intégration, organisme officiel le plus important qui les encourage en établissant un lien entre les étudiants immigrants et le système d’enseignement supérieur en Israël.
Caroline Haïat est journaliste pour le site français d’i24NEWS. COPYRIGHTS.