Amnesty International a publié, le 1er février, un rapport qui dénonce un système d’apartheid en Israël. Comment jugez-vous ce rapport, Madame l’Ambassadrice d’Israël en France ?
Je suis furieuse, mais vraiment furieuse. Nos équipes à l’ambassade ont bien sûr lu ce rapport dans son intégralité. Il apparaît clairement qu’Amnesty ne croit pas que nous ayons le droit de former un Etat-nation du peuple juif. Tant qu’il y aura un Etat-nation du peuple juif, pour Amnesty, il s’agira d’un apartheid. Mais c’est notre raison d’être depuis 1948 : former un Etat juif, pour tous les juifs dans le monde. Pour que la Shoah ne se reproduise jamais.
Il y a eu beaucoup de réactions en Israël pour condamner ce terme d’apartheid…
Le premier à le condamner a été Mansour Abbas, le chef d’un parti arabe : Israël n’est pas parfait, mais il n’y existe pas d’apartheid. De quel droit Amnesty peut dire que nous menons une politique d’apartheid ? Nous vivons à côté de l’Iran, de la Syrie… De toute la région, ils choisissent Israël, dont la très puissante Cour suprême fera en sorte qu’il n’y ait jamais d’apartheid. C’est elle qui a décidé de la liberté totale de mouvement des Arabes en Israël. C’est elle qui protège la démocratie.
La loi interdit les discriminations entre les différentes communautés d’Israël, mais cela ne signifie pas qu’elle n’existe pas…
La loi est très claire. Il peut arriver que certains n’aiment pas leurs voisins, qu’ils soient juifs ou arabes. Mais la loi interdit toute discrimination entre juifs et arabes, entre femmes et hommes… Même s’il y a des lois, les gens pensent ce qu’ils pensent.
La communauté LGBT est celle qui subit les discriminations : les homosexuels ne peuvent pas se marier, adopter des enfants ou avoir recours à une mère porteuse. Des projets de loi sont en cours et aboutiront dans les années qui viennent.
Une solution à deux Etats, israélien et palestinien, est-elle toujours envisageable ?
Moi, je crois à cette solution : deux Etats pour deux nations. Yaïr Lapid y croit aussi. Mais il y a un gouvernement de coalition qui relève du miracle, qui est fragile et qu’il faut garder, car l’alternative est très dangereuse. Pour l’instant, la solution de deux pays pour deux nations ne peut pas être discutée, par manque d’accord au sein du gouvernement, tout comme le sujet des constructions en Cisjordanie.
Mais si je vous donne maintenant un accord de paix et que vous l’amenez à Gaza ou en Cisjordanie, pensez-vous que quelqu’un là-bas le signera ? Non, personne. L’Autorité palestinienne a peur de signer la paix avec nous. Cela a toujours été comme ça.
Est-ce que le temps ne joue pas contre une solution à deux Etats ?
J’espère que non. Nous avons signé les accords d’Abraham ces dernières années : davantage de pays arabes sont en paix avec nous. Dans deux ans, ils seront encore plus nombreux. Quand les Palestiniens verront que nous sommes en paix avec beaucoup de pays arabes, ils vont peut-être comprendre qu’il est temps de faire la paix avec Israël.://www.lexpress.fr/