En politique israélienne, il ne faut jamais jurer de rien. Et tant que la dissolution du parlement n’est pas définitivement actée, on ne peut pas exclure la possibilité que le chef de l’opposition, Benyamin Netanyahou, parvienne à former un gouvernement alternatif sans passer par de nouvelles élections.

Mais s’il n’y a pas de nouveau coup de théâtre dans les jours qui viennent, le passage de relai de Naftali Bennett à Yaïr Lapid pourrait s’effectuer dès  le milieu de la semaine prochaine. Et pour la première fois, le patron de Yesh Atid sera sur le devant de la scène.

Cela peut sembler paradoxal pour un ancien journaliste vedette de la télévision israélienne, mais cela fait un peu plus de trois ans que Yaïr Lapid a choisi de se mettre en retrait pour laisser la place à ses partenaires. Il l’a fait en 2019, quand le fondateur et leader du parti centriste Yesh Atid, avait initié le regroupement de deux nouveaux partis du centre en créant le parti Bleu Blanc, et de donner la tête de liste à un politicien débutant, l’ancien chef d’état-major de Tsahal, Benny Gantz. Un calcul politique qui avait permis à Bleu Blanc d’arriver en deuxième position derrière le Likoud lors des trois scrutins de 2019 et 2020. Sauf qu’après les législatives de mars 2020, Benny Gantz avait décidé de faire alliance avec Benyamin Netanyahou, contre l’avis de Yaïr Lapid, qui retournait avec son parti Yesh Atid sur les bancs de l’opposition.

Un an et un quatrième scrutin législatif plus tard, Yaïr Lapid arrivait encore une fois en deuxième place derrière le Likoud.  Et quand Benyamin Netanyahou échouait à réunir une majorité parlementaire, c’est le leader centriste qui était à son tour mandaté par le président de l’Etat pour former le gouvernement.

Il entamait alors des négociations avec Naftali Bennett et lui faisait une proposition inattendue : former un gouvernement de rotation sur le modèle de celui qu’avaient tenté un an plus tôt Benyamin Netanyahou et Benny Gantz, sauf que Yaïr Lapid offrait à Naftali Bennett de prendre le premier la direction du gouvernement. Vu l’expérience du cabinet précédent, on aurait pu penser que le leader centriste n’aurait pas pris le risque de renoncer à la première rotation, considérant que le patron de Yamina aurait pu « oublier » ses promesses une fois dans le fauteuil de Premier ministre. Ce qui, comme on l’a vu, n’a pas été le cas, puisque Naftali Bennett a bien passé la barre comme convenu au Premier ministre suppléant, même si ce n’est que pour la transition en attendant les prochaines élections.

Cela dit, il ne faudrait pas voir en Yaïr Lapid un impulsif ou un naïf. C’est d’une poigne de fer qu’il dirige le parti qu’il a fondé il y a bientôt dix ans et qu’il a fait entrer à la Knesset dès 2013 avec 19 députés, en faisant la deuxième formation politique du parlement derrière le Likoud. C’est donc encore Yaïr Lapid qui a initié un rapprochement des partis centristes aux législatives de 2019, pour en faire une véritable force politique, même si elle s’est scindée un an et demi plus tard. Et c’est toujours Yaïr Lapid qui a mis sur pied la coalition qui a réuni des partis de droite, de gauche et pour la première fois un parti arabe dans la même majorité. Et même si l’expérience a échoué, elle confirme que le futur Premier ministre de transition est capable de faire bouger le paysage politique israélien.

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Pascale Zonszain

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