RADIO J. Bonjour Ilana, Hag Sameah,
Chronique de Daniel Rouach.
Avant l’élection Présidentielle il est banal de se poser la question de la situation des juifs de France, si Marine Le Pen devenait Présidente de la République. Vont-ils quitter la France en masse? Probablement pas. Faisons le point sur cette Alyah des juifs de France. Nous parlerons dans cette chronique du professeur Victor Malka, un physicien français des plasmas et un pionnier de l’accélération du plasma laser qui a fait son Alyah.
Que ce soit à Jérusalem, Tel-Aviv, Beersheva, Ashdod, Netanya, Haïfa… il est de plus en plus facile de remplir des salles d’intellectuels et ingénieurs Français.
Plus d’une fois à la Bourse de Tel-Aviv où à l’Université de Tel-Aviv des centaines de Français ayant émigré de France se retrouvent pour des évènements de haut niveau (conférences scientifiques, affaires…).
Point commun : un haut niveau de formation. Et beaucoup de participants à ses évènements ne sont pas du tout à la retraite. Ils exercent des professions d’ingénieurs, direction marketing, PDG … En quelques années le flux de juifs français ayant émigré en Israël a beaucoup évolué. Les anciens des grandes écoles qui vivent en Israël se comptent par centaines…
Selon les statistiques de l’OCDE publiées chaque année dans les « Perspectives des migrations internationales » , environ 100 000 Français émigrent vers les autres pays membres de l’OCDE tous les ans. Le chiffre oscille entre 100 000 et 120 000 départs par an.
Israël fait bien partie du « Top 10 » comme pays de destination. Au moins 1500/ 3000 personnes qui ont obtenu des diplômes d’ingénieurs de France et qui ont fait leur Alyah sont actives en Israël.
Polytechnique, Supelec… sont nombreux à travailler en Israël. Plus de 30 à 80 polytechniciens. Si l’on rajoute les autres écoles ESCP, HEC, ESSEC, Dauphine, Sciences Po, Universités… on a une population de 3 000 personnes de haut niveau de formation qui sont en Israël, et y vivent. Le nombre de personnes ayant le titre de Docteur et venant de France n’a rien à voir à ce qui était dans les années 1980. Au moins 500 à 1000 docteurs!
« Victor Malka est un chercheur d’exception », a estimé l’ex président de l’Ecole polytechnique. « Il incarne le scientifique que nous cherchons à accueillir à l’X : à la fois très libre dans le choix de ses sujets de recherche, très en pointe au plan théorique et très préoccupé de développer des applications utiles. Si le Nobel est attribué un jour à ces travaux, je vois trois lauréats incontournables : Victor Malka, l’Américain Wim Leemans et le Japonais Toshiki Tajima », renchérit Philippe Balcou, ancien directeur du Centre lasers intenses et applications à l’université de Bordeaux (CEA-CNRS).
Sur le site en français du Weizman Institute, un article révélateur : « Au Weizmann, ce « maître Jedi » rayonnait. Il faisait visiter son laboratoire en chantier où, bientôt, seraient lancés les premiers tirs de son « faisceau de rêve ». « Dream Beam » : tel était le titre de « une » de la revue Nature Le prestigieux journal publiait alors trois études qui feraient date.
L’une d’elles était signée de l’équipe de Victor Malka, avec le CEA. Les deux autres émanaient d’équipes américaine et anglaise. Toutes étaient parvenues à produire un faisceau d’électrons cohérents grâce à un accélérateur innovant : un « laser-plasma ».
« Victor Malka est né en 1960 à Casablanca (Maroc), dans une « famille juive séfarade traditionaliste de huit enfants ». Il a 6 ans quand sa famille émigre en France. Un choc : Marseille, le 17e étage d’un HLM, puis Paris et sa banlieue grise. Le sentiment de « vivre en prison ».
Les mathématiques seront son coin de ciel bleu. « J’avais des facilités en maths, j’ai été orienté vers les classes prépa. » Reçu à l’Ecole nationale supérieure de chimie de Rennes, il y découvre les charmes de… la physique. « J’ai décidé de bifurquer vers un DEA de physique. » A 30 ans, il entre au CNRS, « inquiet car j’étais en retard ». Retard qu’il comblera très vite… »
Les travaux de Victor Malka, ex-directeur de recherche au CNRS, ont le vent en poupe. Après le prix Julius Springer de la Société allemande de physique, ce spécialiste de la physique des plasmas au Laboratoire d’optique appliquée (LOA) de Palaiseau, s’est vu remettre le prix Holweck de la Société française de physique et de l’Institute of Physics, ainsi qu’un prix de la Société européenne de physique : « Convaincre la communauté des physiciens de la pertinence de l’approche laser pour accélérer des particules à travers un plasma ne fut pas chose facile, mais cette récente succession de récompenses prouve que notre démarche suscite aujourd’hui un véritable engouement », reconnaît le physicien.
La perspective d’utiliser un laser pour accélérer des électrons ou des protons remonte au début des années 1990. À l’époque, Victor Malka étudie la fusion thermonucléaire au Laboratoire pour l’utilisation des lasers intenses (Luli). Confronté à l’inertie de cette recherche de très haute volée, nécessitant un dispositif expérimental complexe autour duquel gravitent pléthore de scientifiques, le jeune physicien a du mal à trouver ses marques.
« J’ai fini par prendre conscience que la fusion nucléaire offrait trop peu de prise sur mon propre travail d’investigation, ce qui allait à l’encontre de l’idée d’autonomie que je me faisais du métier de chercheur », se souvient Victor Malka dont la carrière prend un tour nouveau vers 1994. Cette année-là, au Laboratoire Rutherford Appleton (Grande-Bretagne), avec une équipe de l’Imperial College London et de l’université de Californie à Los Angeles, il parvient à générer pour la première fois des faisceaux d’électrons de grande énergie.