Il n’est un secret pour personne que plusieurs dizaines de magnats juifs russes ont acquis la nationalité israélienne ces dernières années grâce à la Loi du retour. C’est un moyen pour eux d’assurer leur existence et de protéger leur richesse.
Les sanctions imposées à la Russie influent à présent sur la situation des oligarques juifs russes qui vont obligatoirement être touchés par les décisions occidentales. Israël devra légiférer contre ses binationaux, liés à Poutine et réfugiés sur son territoire pour se protéger des sanctions. La plupart des oligarques, qui se comptent par dizaines, ont d’excellentes relations avec le pouvoir russe, qu’ils financent d’ailleurs, mais certains sont poursuivis par certains pays étrangers. Entre autres, Roman Abramovich, Mikhail Fridman, Petr Aven et Viktor Vekselberg, viennent d’être sanctionnés au niveau international pour entretenir des relations avec Poutine. Ils sont nombreux pour tous les citer.
Roman Abramovich, né le 24 octobre 1966 à Saratov, juif russo-israélo-portugais, est le plus connu en Occident pour avoir acheté le club de football Chelsea. Il était ancien gouverneur du district autonome de Tchoukotka dans l’extrême orient russe de 2000 à 2008. Sa fortune est estimée à 15 milliards de dollars et fait de lui la 124ème fortune du monde. Par ses investissements dans le domaine culturel, Il est qualifié de «méga philanthrope et de partisan ardent, de longue date, de la culture juive dans le monde».
Mikhaïl Fridman, né de parents juifs le 21 avril 1964 à Lviv en Ukraine, est la 79ème fortune de la planète avec 15 milliards de dollars. Simple ingénieur au départ, et il a créé plusieurs entreprises dans des domaines variés : produits chimiques, machines électriques, compagnie pétrolière d’État au sein de sa holding LetterOne.
Petr Aven, né de mère juive le 16 mars 1955 à Moscou, a dirigé Alfa-Bank, la plus grande banque commerciale de Russie. Il fait partie du cercle restreint de Poutine. Avec une fortune de 5 milliards de dollars, il est la 529e personne la plus riche du monde.
Viktor Vekselberg, né en 1957 à Lviv en Ukraine d’un père juif ukrainien et d’une mère chrétienne russe, est président du conglomérat russe Renova Group. Avec une fortune de 11 milliards de dollars, il est placé à la 119e place sur la liste des personnes les plus riches du monde.
Israël, qui veut garder une position neutre pour servir de médiateur entre la Russie et l’Ukraine, a refusé d’appliquer les sanctions imposées par les États-Unis, le Royaume-Uni, et l’Union européenne. Mais les Américains ne pourront pas accepter longtemps cette situation alors que la guerre s’intensifie en Ukraine, que les destructions ne cessent pas et que la liste des morts s’allonge. La sous-secrétaire d’État américaine aux affaires politiques, Victoria Nuland, exige qu’Israël applique les sanctions : «Ce que nous demandons, entre autres, c’est que toutes les démocraties du monde se joignent à nous dans les sanctions financières et de contrôle des exportations que nous avons imposées à Poutine. Vous ne voulez pas devenir le dernier refuge pour l’argent sale qui alimente les guerres de Poutine».
Israël a été créé après la Shoah pour devenir le refuge de tous les Juifs en danger dans le monde en leurs octroyant automatiquement la nationalité israélienne.
Certains préfèrent profiter seuls de leurs richesses en adoptant un profil discret mais d’autres au contraire ont retrouvé leurs racines juives en devenant des philanthropes pour les causes juives ou des investisseurs dans la haute technologie d’Israël. Pour garder leur liberté de circuler, ils utilisent leurs propres jets privés. Malgré cela, il devient difficile aux organisations juives puritaines d’entretenir des relations avec les oligarques russes. Pour preuve, la décision du mémorial national israélien de la Shoah, Yad Vachem, qui a refusé un don de 10 millions de dollars de la part d’Abramovich «à la lumière des développements récents». Les sanctions vont donc avoir un impact important sur l’aide apportée aux organismes de bienfaisance juive qui font parfois du zèle en expulsant de leur comité des membres russes, à l’instar du donateur né en Ukraine, Fridman, évincé du Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar.
Sous la pression, Israël a été contraint de créer un comité interministériel spécial pour convenir de la question des sanctions et du sort des oligarques binationaux. Le ministre des Affaires étrangères Yaïr Lapid a déjà donné ses instructions à ses fonctionnaires : «Vous devez être très prudent car ces gars-là ont des relations et ils peuvent vous appeler au téléphone et vous demander des choses. Ne vous engagez à rien car cela pourrait causer des dommages diplomatiques. Dites que vous ne pouvez pas les aider et donnez-leur le numéro du ministère des Affaires étrangères. Israël ne sera pas une voie pour contourner les sanctions imposées à la Russie par les États-Unis et d’autres pays occidentaux».
Israël est cependant dans une position difficile. Il ne pourrait plus servir de médiateur s’il imposait des sanctions à la Russie et surtout, les avions de Tsahal ne disposeraient plus de la liberté de circulation au-dessus de la Syrie pour frapper les bases iraniennes et les convois d’armements du Hezbollah.
LA QUESTION DES OLIGARQUES RUSSES BINATIONAUX
Par Jacques BENILLOUCHE
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