Comprendre l’intérêt et les limites du régime sans gluten, très pratiqué en Israël, la chronique de Serge Rafal.
Le régime sans gluten dont on parle beaucoup, et peut-être trop, est effectivement indispensable dans la maladie cœliaque et l’allergie vraie au blé, mais inutile en dehors de ces situations peu fréquentes. La vogue des régimes d’exclusion sans justification médicale est toutefois une réalité avec ses conséquences parfois délétères comme des carences. C’est le cas du fer et de la vitamine B12 chez les végétariens, nous l’avons vu récemment.
Le chasseur-cueilleur de la préhistoire découvre progressivement les céréales, le blé chez nous en Occident. Il le mélange d’abord à de l’eau pour fabriquer des galettes comme le pain azyme. Il se rend compte plus tard que certaines variétés lèvent plus facilement et peuvent donc être panifiées… à condition que la farine contienne des protéines comme le gluten. Celui-ci, d’ailleurs découvert empiriquement, est en effet capable de se lier (glu = coller) avec l’amidon du blé. Le pain s’invite alors à la table, il y a environ 1000 ans, et ne la quittera plus. Le gluten est ensuite progressivement modifié génétiquement pour augmenter les rendements agricoles, permettre à la pâte de lever plus facilement, s’adapter au pétrissage mécanique quasi généralisé du pain en lui donnant de l’élasticité, favoriser la viscosité d’un certain nombre d’aliments qui n’en contiennent pas. Nous ingérons donc actuellement un gluten plus agressif, que 10 à 20% de la population estime avoir du mal à assimiler et a donc décidé ces dernières années de réduire et parfois de stopper.
Les scientifiques nous répondent que le gluten déclenche aucun symptôme, en dehors de la maladie cœliaque et de l’allergie au blé. Les patients avancent eux des raisons diverses et variées : troubles digestifs, douleurs chroniques, fatigue, coups de blues inexpliqués. D’autres évoquent un mieux-être, notion vague qui justifie cette exclusion temporaire ou définitive.
On trouve principalement le gluten dans l’avoine, le blé, l’orge, le seigle, le triticale (hybride entre blé et seigle), leur permettant nous l’avons dit de lever. L’épeautre, le maïs, le millet, le quinoa, le soja, le sorgho… en contiennent peu et lèvent mal. Le riz et le sarrasin (une herbacée et pas une céréale) qui n’en contiennent pas du tout, ne panifient par conséquent pas.
L’épeautre contient en réalité un peu de gluten qui serait toutefois moins agressif donc mieux toléré. Les hypersensibles au gluten doivent donc le tester, en commençant par de toutes petites quantités qu’ils vont augmenter ensuite progressivement. La majorité peut en consommer sans problème.
C’est sans danger de manger sans gluten et ça oblige même à manger plus sain (fruits et légumes, aliments non transformés) en éliminant les produits trop industrialisés. C’est juste inutile pour la majorité de ceux qui suivent ce régime « sans », avec parfois un retentissement sur leur vie sociale.
Le régime sans gluten traduit un phénomène profond qui touche à notre culture, notre identité, notre rapport au monde et à l’alimentation actuelle, telle qu’elle nous est proposée. Il ne doit être ni critiqué ni encouragé. Et attention qu’il n’amène pas à l’orthorexie, qui elle, est un véritable trouble du comportement alimentaire, une obsession du manger sain.
Radio J.