SPECIAL ISRAËL. Quand le prix du bœuf flambe en Argentine, c’est toute la population qui en pâtit : le pays est le plus gros consommateur de viande au monde. Pour réguler les prix sur le marché intérieur, le gouvernement vient de suspendre pour 30 jours les exportations. L’Argentine interdit donc l’exportation de viande de boeuf casher vers Israël.
L’Argentine est le principal fournisseur de viande casher dans le monde. 87 rabbins se sont déplacés récemment dans le pays pour aider le pays à doubler ses exportations en 2021, selon le gouvernement argentin. L’an dernier, 24 000 tonnes de viandes ont été exportées. En juin 2020, une centaine de rabbins étaient venus d’Israël.
RFI : « C’est une mesure temporaire. Le temps de mettre en place un dispositif pour remettre de l’ordre sur le marché argentin, explique le gouvernement ».
RFI : « Mais même temporaire, cette annonce est très mal vécue par les producteurs de viande qui profitent en ce moment des prix élevés à l’exportation. C’est « un pas en arrière pour le développement et la croissance de l’élevage », a d’ailleurs aussitôt commenté l’organisation Confédérations rurales argentines.
En un an, les prix de la viande bovine vendue localement ont bondi. Or la viande est l’aliment de base dans le pays : entre 40 et 50 kg de consommation par personne et par an, selon les sources, alors que la moyenne européenne est de 14 kg. Et dans un contexte économique local déjà très difficile – le coût de la vie a augmenté de 46% ces douze derniers mois –, si le prix de la viande augmente, le quotidien devient vite problématique et source potentielle de contestation. D’où la décision des autorités, qui ne surprend pas les bons connaisseurs du pays. « L’Argentine, c’est une alternance d’ouverture et de fermeture par un système de droit de douane à l’export », explique l’un d’eux.
La Chine s’impose sur le marché des viandes
Cette hausse des prix n’est pas si « inexplicable » que le dit le président Alberto Fernandez. La principale raison, c’est l’appétit chinois. Un quart de la viande consommée dans le monde aujourd’hui l’est par la Chine. « Cela fait une dizaine d’années que les Chinois sont arrivés sur le marché international de la viande », explique Jean-Paul Simier, économiste et spécialiste du marché des viandes qui confie n’avoir jamais imaginé Pékin assécher à ce point le marché de la viande.
Les Chinois achètent à tout-va, que ce soit du porc, du bœuf du mouton ou de la volaille. Illustration d’un changement d’habitude alimentaire, mais aussi conséquence d’accidents sanitaires à répétition : grippe aviaire, fièvre porcine. Le cheptel chinois a été décimé ces dernières années. Les viandes d’Amérique du Sud qui allaient vers l’Europe vont maintenant surtout vers l’Asie.
Hausse des prix probables à l’international
Face à l’incroyable demande chinoise, les exportations de viande argentine n’ont cessé de croître ces dernières années – 80% part en Chine – alors que la production locale elle reste quasi-stable, notamment à cause de l’augmentation des surfaces de culture de soja, qui réduit les terres disponibles pour le pâturage. Moins de produit disponible, c’est automatiquement un marché local plus tendu.
La mesure prise par les autorités devrait rééquilibrer l’offre et la demande sur le marché intérieur, et faire du bien au porte-monnaie des Argentins même s’il est difficile de dire dans quelle proportion. « Sur les prix à l’international, cela devrait avoir un effet inflationniste », ajoute Jean-Paul Simier, car c’est un fournisseur majeur de la Chine qui va être absent pendant un mois ».