EDITORIAL de Daniel Rouach. J’ai passé des heures à voir (en hébreu) le film « Room 806 », qui ne tient pas sa promesse. Jalil Lespert, le réalisateur fait de trop nombreuses erreurs par omission. Il dissimule le plus important. Le vrai DSK n’apparait pas. L’auteur n’a pas du tout cerné la complexité de DSK (le sexe n’explique pas tout!). Pas celui des médias à scandale. J’ai eu l’occasion de croiser DSK à Sarcelles et dans d’autres occasions purement professionnelles. J’ai suivi l’affaire « DSK du Sofitel » sous le regard de l’intelligence économique (je suis l’auteur du Que sais Je? : « Veille technologique et Intelligence économique »).
DSK, son entourage réel (en France, Maroc, New-York, Tel-Aviv) est absent du film. Les vrais acteurs de cette affaire n’ont pas témoigné. Ce que l’on voit dans le film est une reconstitution artificielle. Des pans entiers de cette affaire sont mis sous silence… (le rôle de la police de New-York, les actions des politiques français, les médias Français…).
La survalorisation de juifs orthodoxes entrant dans la résidence de DSK (une résidence surveillée) à New-York est… bizarre. La « danse des agents de sécurité du Sofitel » est analysée sans aucune profondeur. Le calvaire et le rôle de Anne Sinclair sont survolés… Bref, un film moyen.
Lisons un autre avis :
Selon (1) : « Musique anxiogène, plans de lieux vides et sans vie en guise d’illustrations, et puis le récit glaçant et détaillé de “l’affaire” avec des flashbacks… Bienvenue dans “Room 2806: The Accusation” (“Chambre 2806: L’affaire DSK”), le docu-série du Français Jalil Lespert sur le scandale DSK, sorti lundi 7 décembre sur Netflix. Le résultat est aussi glaçant sur le fond que réussi sur la forme.
Ce documentaire en quatre épisodes, qui remplit tous les canons des séries de “true crime” qui ont contribué au succès de Netflix, nous replonge dans l’ambiance folle du 14 mai 2011 et des jours qui ont suivi, quand Dominique Strauss-Kahn, alors directeur du Fonds Monétaire International (FMI), est accusé d’avoir violé Nafissatou Diallo, une employée de ménage immigrée du Sofitel à New York. Une affaire qui a eu raison des ambitions présidentielles du socialiste, qui est alors un personnage incontournable de la scène internationale, plongée en pleine crise économique et financière.
Tout est passé au crible: la vie de Nafissatou Diallo avant le 14 mai, les moments qui ont suivi le viol présumé, les rumeurs de complot contre l’ancien ministre des finances, son retour en France, mais aussi son ascension politique, son comportement envers les femmes… Jalil Lespert et son équipe racontent ce scandale hors-norme à travers les yeux de ceux qui l’ont couvert ou vécu, notamment “Nafi” Diallo elle-même, le chef de la sécurité du Sofitel, l’assistante de DSK au FMI et ses avocats, ainsi que certains enquêteurs. Il en ressort une série plutôt équilibrée par rapport à d’autres, qui permettra à chacun de se faire une opinion sur ce qu’il s’est passé dans la suite 2806 et sur le bien-fondé du choix du bureau du procureur de Manhattan de jeter l’éponge. (DSK a échappé au procès pénal à cause de doutes sur la crédibilité de son accusatrice, mais lui a versé jusqu’à 6 millions de dollars au civil).
Neuf ans après “l’affaire du Sofitel”, “Room 2806: The Accusation” montre que ce scandale, et les manifestations de femmes qu’il a entraînées aux États-Unis, portait en lui les germes du mouvement #MeToo, qui balayera le pays quelques années plus tard. Il rappelle aussi le fossé qui subsiste entre les US et la France sur la prise en charge des crimes sexuels et le traitement des victimes.
Il contient des images d’archives qui révulseraient aujourd’hui aux États-Unis, comme l’extrait d’une émission de Thierry Ardisson où la journaliste Tristane Banon raconte, devant des invités amusés et blagueurs, l’agression sexuelle dont elle a fait l’objet par Dominique Strauss-Kahn alors qu’elle n’avait pas 30 ans. Les propos de Jack Lang qui, face caméra, trouve aujourd’hui encore le moyen de minimiser les actes attribués à son ami, qu’il décrit comme “sensuel“, paraissent sortis d’un autre temps, celle de l’ère pré-#MeToo. Ils sont difficilement supportables pour un public américain sensibilisé aux dynamiques qui interviennent dans les cas d’abus sexuels impliquant des hommes influents et des femmes sans ressources, parfois immigrées. Dominique Strauss-Kahn, qui n’a pas souhaité s’exprimer dans le documentaire, a d’ores-et-déjà annoncé qu’il allait raconter sa propre version des faits dans un documentaire sur sa vie prévu pour l’automne 2021″.
(1) frenchmorning.com