LE MOT DU JOUR. COMPLOT. Un article de Jean de France (nom d’emprunt!). L’un des mots le plus couramment utilisé actuellement dans les médias est celui de « complot » et certains pensent que c’est grâce aux réseaux sociaux que ceux-ci (réels, supposés ou fantasmés) sont mis à jour.
Pourtant, les comploteurs existent depuis toujours et le 1er homme qui s’est affirmé chef d’une tribu ou d’un clan a certainement inspiré d’autres qui se sont ligués pour prendre sa place …
Aussi, dès l’antiquité ont foisonné complots, cabales, conspirations et conjurations et le fait que l’étymologie du mot « histoire » signifie « enquête » n’est pas neutre.
Dans un premier temps, ceux qui fomentaient les complots étaient proches du monarque et même souvent faisaient partie de sa famille. Richard III a fait tuer les enfants de son frère, roi avant lui, Catherine II de Russie a fait disparaître son mari pour régner à sa place et Monsieur, frère du roi Louis XIV a passé sa vie à rassembler dans l’ombre ses opposants.
Puis sont apparus d’autres formes d’oppositions et comme l’époque n’était pas à la liberté d’expression, des sociétés secrètes ont vu le jour. Celles-ci ont généré de nombreux soupçons et les théories du complot ont foisonné dès le XVIIIème siècle. Ainsi, dès 1798, un livre expliquait le déclenchement de la révolution française par une grande conspiration regroupant les Templiers, les Rosicruciens, les Jacobins et les Illuminati, tout comme les Francs-Maçons dans d’autres ouvrages.
La difficulté qu’il y a cependant à définir les complots, c’est qu’il y en a des multitudes.
Si certains hommes sont arrivés au pouvoir par des voies obscures, certains sont devenus célèbres pour avoir échoué. C’est le cas de Guy Fawkes impliqué dans la Conspiration des poudres qui est commémorée en Angleterre chaque année et qui l’a immortalisé.
Il y a les complots réalisés en accord avec la victime et de plus en plus d’historiens sont persuadés que Jules César était informé de l’attentat préparé contre lui. Malade et fatigué, il était cependant persuadé que sa mort brutale faciliterait l’arrivée de son successeur, Auguste et lui permettrait de passer à la postérité.
De nombreux ministres ont fomenté des conspirations contre leur roi, mais l’inverse s’est produit. A 16 ans, écarté du pouvoir par sa mère, Louis XIII, âgé de 16 ans, rassembla secrètement quelques fidèles pour faire exécuter son 1er ministre à son arrivée au Louvre.
L’étymologie du mot « complot » viendrait d’ailleurs des termes « com-peloter » et implique les sens « assemblage serré– la pelote de laine », et « action commune », mais là aussi, l’histoire donne des contre-exemples.
De nombreux conjurations ont été organisées contre Napoléon, qui est sorti indemne de plusieurs attentats, mais c’est un homme quasi seul et sans arme, le général Mallet, qui a failli renverser le régime, lors de l’éloignement de l’Empereur en Russie en affirmant qu’il y était décédé. Avant qu’un colonel, plus suspicieux que les autres, n’arrête la tentative de coup d’État, la majorité des hauts fonctionnaires du régime, habitués à obéir sans discuter, avaient accepté la version du factieux.
Les chefs d’état paranoïaques qui ont vécu dans la crainte du complot, lors des difficultés qu’ils vivaient au quotidien, ignoraient la loi dite du rasoir d’Halon, utilisée en management et qui préconise « de ne jamais attribuer à la malveillance ce que l’incompétence suffit à expliquer ».
LE PLUS.
Le « complot juif » est une théorie du complot qui prête aux Juifs une volonté de dominer le monde. Ce mythe est particulièrement incarné par Les Protocoles des Sages de Sion, document du début du XXe siècle se présentant comme un programme juif de domination du monde, mais en réalité créé par le faussaire antisémite russe Matveï Golovinski pour le compte de la police politique tsariste.
Relevant originellement de l’antijudaïsme, les théories du complot juif sont plus élaborées que la simple allégation antisémite : ayant un auteur ou groupe d’auteurs précis, elles sont des constructions plus complexes et insistent sur l’accusation de domination.
La théorie du complot juif connaît un regain de popularité en Europe durant les années 1930, années de crise, après avoir été développée dans le manifeste d’Adolf Hitler, Mein Kampf. À l’époque, une telle théorie est cautionnée principalement à droite et à l’extrême droite : la droite de l’époque est fortement nationaliste et hait donc autant le Juif apatride que le communisme, qu’elle attribue aux Juifs, tandis qu’à gauche le Juif est parfois accusé de contrôler la finance et se trouve parfois assimilé à la figure du capitaliste (en réalité cela était marginal ; en fait de nombreux leaders de la gauche étaient eux-mêmes Juifs ou d’origine juive, et furent d’ailleurs victimes d’attaques antisémites de la part de la droite – c’est par exemple le cas de Léon Blum).
Après la mise en œuvre de la « Solution finale à la question juive » par les nazis et la création de l’État d’Israël, le thème du complot juif renaît dans certains milieux antisionistes qui assimilent abusivement les substantifs « sionisme » et «fascisme» et les adjectifs «juif» et «sioniste». Cette fraction radicale d’antisionistes a développé une opposition à Israël fondée sur l’antisémitisme et la contestation de la Shoah. La théorie du complot sioniste qui en résulte est considérée par Pierre-André Taguieff et Jacques Tarnero comme une variante moderne de la théorie du complot juif.
La thématique du complot juif connaît aujourd’hui une popularité dans certains mouvements extrémistes au Moyen-Orient, comme le Hamas qui se réfère explicitement aux Protocoles des Sages de Sion dans sa charte.