Ygal Amir a plongé le pays dans le deuil d’un chef d’Etat emblématique, mais aussi révélé un ennemi intérieur. Qui est prêt à pardonner Ygal Amir ? Pas grand monde en Israël si l’on en croit le récent sondage publié à l’occasion de la commémoration de l’assassinat de Yitshak Rabin.

Selon i24 News : « A cette question posée par l’Institut Roshink, quatre Israéliens sur cinq ont répondu par la négative. Une preuve que les vingt-quatre années écoulées n’ont pas permis de susciter une forme de clémence. Pétri de culture biblique et de l’ancien testament, Israël refuse de gracier l’homme qui ne s’est jamais repenti de son acte. « L’assassin qui l’a tué et qui a déchiré le tissu si fragile de la société israélienne, nul ne pourra lui pardonner », avait jugé de l’Etat d’Israël Reuven Rivlin. « On n’oublie rien, on ne pardonne rien », avaient renchéri des manifestants lors d’un rassemblement en mémoire de l’ancien Premier ministre. Pour cause, l’épisode a mis un point d’orgue à la violence politique en Israël et activé la potentialité d’une guerre fratricide.

Ce que Benyamin Netanyahou a qualifié de « traumatisme historique » a plongé le pays dans le deuil d’un emblématique chef d’Etat, mais aussi d’une certaine représentation de l’adversaire. Ygal Amir, enfant d’Israël, incarnait dès lors le visage de l’ennemi intérieur. Quand bien même un consensus large, transcendant les clivages politiques, eut lieu pour condamner la barbarie du geste, ce meurtre a mis au jour des fractures profondes qui n’ont pas fini de morceler la société israélienne. En tirant trois balles sur l’artisan des accords d’Oslo, Amir a mis en lumière la scission d’une partie du peuple avec lui-même, un divorce entre orthodoxes et les laïcs, droite et gauche, partisans d’ »accommodements raisonnables » et ceux d’un « refus de compromission ». Deux forces antagonistes qui revendiquent l’identité du pays et dont la confrontation s’illustre, d’une certaine façon, dans l’instabilité de la situation politique actuelle, la difficulté de former une coalition ou un gouvernement d’unité nationale.

Des enjeux cristallisés autour de la figure du condamné à la réclusion à perpétuité, alors qu’il continue d’exercer une fascination sur un noyau de radicaux et que son mariage, sa paternité, sa grève de la faim et ses frasques en cellule continuent d’alimenter l’actualité ».

EN OCTOBRE 2020. UN ARTICLE DE (1)

25000 bougies allumées place Rabin par des israéliens de tout âge, et notamment par de nombreux jeunes pas encore nés en 1995.

25000 bougies pour marquer le 25ème anniversaire de l’assassinat d’Ishak Rabin sur cette même place, alors Place des Rois, par un juif extrémiste qui “voulait arrêter la catastrophe d’Oslo”.

C’est à l’issue d’un rassemblement pour la Paix, après avoir chanté « Faites que le Soleil se lève et illumine le matin » que l’ancien 1er ministre est touché dans le dos par les trois balles haineuses et fanatiques d’Yigal Amir qui attend tranquillement – sans être aucunement inquiété -qu’Itshak Rabin descende les marches qui le mènent à sa voiture pour tirer. Transporté à l’hôpital, l’ancien 1er ministre succombera à ses blessures.

Plongeant tout le pays dans l’incrédulité, le choc, la douleur. Un Juif avait tué un autre Juif. Yigal Amir sera arrêté tout de suite après les faits et condamné à la prison à perpétuité. Il n’a jamais regretté son geste et sa famille souhaite la révision de son procès. Et un chiffre effarant : 1 israélien sur 5 souhaite qu’Yigal Amir bénéficie d’une grâce présidentielle. « Jamais tant que je serai président » a toujours répété Reuven Rivlin le chef de l’Etat israélien. Mais après lui…

(1) Nathalie Sosna-Ofir.

Photo AP / Ariel Schalit 2007 ©

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