C’est le jeudi 8 octobre 2020 que le groupe Casino a révélé au grand public son concept de magasin autonome et automatisé, baptisé BlackBox. Le magasin est en réalité un conteneur de 18 mètres carrés. Le premier BlackBox a ouvert ses portes à Clichy (92), au pied du siège social de Monoprix (enseigne du groupe Casino).
Le concept est sorti de terre après un travail de 18 mois, qui a vu Monoprix collaborer avec plusieurs partenaires technologiques. L’israélien Shekel Brainweigh a été sollicité pour son système de capteurs avancés, reconnus pour leurs capacités à mesurer précisément les poids d’articles en rayon (et ainsi identifier ceux prélevés).
Le système de paiement est lui l’oeuvre d’Ingenico et d’Oreka, société réunionnaise qui édite des logiciels d’encaissement open source.
Si les apports technologiques viennent de prestataires externes, le projet BlackBox a bien été incubé en interne chez Casino.
« Ce projet, construit de A à Z en interne, est une étape supplémentaire pour la fluidité du parcours client. Il marque l’ambition de tester une technologie qui rend les clients autonomes dans ce parcours », présente Martin Camels, directeur de l’innovation du groupe Casino.
Si la finalité de fluidification du parcours client de BlackBox se rapproche de ce que propose Amazon Go, les périmètres technologiques diffèrent quelque peu. Amazon, pionnier dans le secteur des magasins autonomes et automatisés, a développé (et désormais vendu la technologie) Just Walk Out, une technologie entièrement basée sur un système de caméras.
Celles-ci, couplées à l’intelligence artificielle, permettent d’associer un consommateur avec les produits qu’il prélève des étagères, ou remet en rayon. Amazon est d’ailleurs un partenaire de Monoprix qui propose des services via Prime Now.
En seulement 48 après son lancement sur Prime Now, l’enseigne était déjà dépassée par la quantité de commandes.
Contrairement à Amazon Go, les conteneurs BlackBox sont dépourvus de caméras, afin de se plier aux exigences RGPD. Le système de détection repose uniquement sur des capteurs.
Eux-aussi dopés à l’intelligence artificielle, ils identifient les produits prélevés via leurs poids. « Cela nous permet d’être en règle avec la CNIL. Nous avons mené des tests car la solution repose aussi sur l’intelligence artificielle et elle apprend au fil des usages.
Nous sommes désormais sur un taux d’erreur inférieur à 1% », précise Lorraine Gentin, directrice adjointe de l’innovation et de la transformation digitale du groupe Casino.
Le système de paiement est lui aussi distinct. Amazon ayant décidé de tout centraliser sur une application Amazon Go, c’est en scannant l’application à l’entrée et la sortie du magasin que la technologie associera le panier d’articles achetés à son utilisateur.
Monoprix a épuré les outils technologiques pour la première version de son magasin autonome
BlackBox a conçu son parcours client différemment. Pour le concept français, pas d’application.
L’entrée dans le conteneur se fait après avoir présenté à un terminal positionné à l’entrée un moyen de paiement, au choix carte bleue ou Apple Pay/Google Pay. Avant de sortir du magasin BlackBox, un écran tactile affiche la liste des articles récapitule panier de commande.
Une simple validation, ainsi que la possibilité de recevoir la facture par mail, et le tour est joué.
Finalement, la solution qui technologiquement se rapproche le plus d’Amazon Go, c’est celle du français Storelift, avec son concept de conteneur Boxy (doté d’une application et de caméras).
Les conteneurs Blackbox sont similaires à ceux de son concurrent français. Une offre produits réduite, limitée à 300 références, principalement orientées snacking salé et sucré, ainsi que de produits d’hygiène, comme du gel hydro-alcoolique et du déodorant.
Les prérequis techniques sont là aussi épurés, BlackBox reposant sur une simple alimentation électrique et un réseau 4G.
Les rayons sont réapprovisionnés très rapidement grâce à la présence de l’enseigne mère Monop’ juste à côté.
BlackBox a donc su allier les minimums technologiques requis pour la viabilité de ce type de concept, tout en limitant les gammes produits et les emplacements de ses conteneurs.
Une stratégie qui devrait avoir un impact sur la rentabilité. Olivier Régo, directeur de l’enseigne Monop’ justifie ce positionnement en avançant que le panier moyen des consommateurs est entre 6 et 10 euros. La fidélité des clients étant par ailleurs encore à établir pour ce type d’achat, pas de frais de développement et de maintien d’un univers applicatif.
L’enseigne espère un chiffre d’affaires mensuel compris entre 30 000 euros et 60 000 euros selon les emplacements. Pour des questions de réapprovisionnements, ceux-ci devraient être disposés à côté des magasins de proximité Monop’ déjà existants.
« L’usage n’est pas le même et il n’y aura pas de cannibalisation », assure Olivier Rego. « Dans des zones de gros flux, aux heures de pointe, cela peut même être complémentaire pour éviter des queues trop longues. »
Déploiement d’une dizaine de conteneurs en 2021, avant de vendre la technologie aux autres franchises du groupe ?
Le concept se laisse également de la marge pour apporter des améliorations et une seconde version à BlackBox.
Ce premier rendu présente en effet quelques limites, mis en avant par l’équipe de L’Usine Digitale, qui a pu tester le concept.
Un produit étant tombé d’un rayon, le système de capteurs a considéré qu’il était acheté, et sera donc facturé sans possibilité de revenir en arrière même après avoir ramassé et reposé le produit.
Autre limite, celle des références dont le poids est proche. les capteurs ont pu commettre des erreurs, marginales d’après Casino. Pour anticiper ce problème, des références similaires ont té positionnées à deux endroits distincts du magasins (comme pour un Coca et un Coca Zéro).
Toujours est-il que BlackBox, soutenu par sa maison mère, a les moyens de ses ambitions. Monoprix souhaite en effet installer ces nouveaux magasins autonomes dans « des zones de flux », comme par exemple les gares ou les aéroports, les campus, ou encore les parkings d’hôpitaux. L’enseigne ne précise pas la feuille de route, mais donne des pistes.
« Nous avons un plan de développement qui est amené à évoluer en fonction de la situation sanitaire », explique Olivier Régo.
« La technologie est appelée à être exploitée dans des magasins traditionnels, notamment auprès des franchisés. On espère une exploitation de cette technologie encore plus importante par les autres enseignes du groupe (Franprix, Casino…), ou bien même en proposant cette technologie à d’autres distributeurs. Mais ce sera du moyen terme »
Source Siècle Digital