Le 24 mai 2000, en moins de 24h, l’armée israélienne mettait fin à 22 ans de présence au Sud-Liban après son installation en 1978. A l’occasion du 20ème anniversaire de cet évènement, Ehud Barak, Premier ministre israélien à cette époque et instigateur de ce retrait, était l’invité d’i24NEWS, la chaîne d’information internationale du groupe Altice.
Au cours de cet entretien exclusif, il a commenté son choix militaire, alors qu’Israël se trouve aujourd’hui sous la menace de 200 000 missiles du Hezbollah : « Si c’était à refaire, je le referais, et je suis fier de l’avoir fait face à des oppositions importantes, tant dans Tsahal, que dans les systèmes politique et sécuritaire. »
Il ajoute : « Le Proche-Orient est un endroit dur, celui qui ne sait pas se défendre disparaît. Et un peuple qui veut vivre ici doit être capable de sacrifier des vies pour vaincre. Mais on n’a pas le droit de faire l’inverse : perdre le sang des jeunes alors qu’il n’y a aucune justification d’efficacité. De 1985 à 2000, on a été dans une bande de sécurité tellement étroite que les missiles de courte portée tiraient au-dessus de la zone de sécurité vers nos villes. Il fallait arrêter, c’était une tragédie inexplicable. »
Il poursuit son propos concernant le renforcement du Hezbollah au Sud-Liban après le départ de Tsahal de la région : « Une légende dit que depuis que nous nous sommes sortis du Liban, le Hezbollah s’est renforcé : le Hezbollah s’est renforcé parce que nous sommes restés au Liban ! A l’époque dans l’opposition, je disais ‘il faut mettre en place des milices dans le Nord, mais pas une armée, pas d’artillerie.’ On ne m’a pas écouté, je n’ai réussi à convaincre ni Rabin ni Shamir, et on en est arrivé là. »
A la question d’une éventuelle éradication du Hezbollah à l’époque, alors qu’il était Premier Ministre et Chef d’Etat-Major un peu plus tôt, Ehud Barak justifie : « Lorsque j’étais chef d’Etat-Major, nous étions en négociations avec les Syriens. Donc il ne fallait pas sortir du Liban, puisque si nous réussissions cet accord, le Liban serait réglé automatiquement. Le Liban était une zone en sang car la Syrie voulait que ce soit une zone de sang. »
A propos du matériel de Tsahal laissé sur place lors du retrait, il commente : « Il n’y a pas de retrait parfait. Le seul objectif était de le faire en une nuit, pour surprendre l’armée du Liban au Sud et échapper aux tirs du Hezbollah. Nous nous sommes retirés sans un blessé, sans un mort. Le matériel laissé derrière n’a aucune importance. Rester n’aurait pas servi la sécurité d’Israël ».
« Je veux casser cette légende affirmant que le Hezbollah détient 200.000 missiles car nous sommes sortis du Liban. C’est faux. (…) Ce qui a contribué à la croissance énorme des capacités du Hezbollah s’est passé après 2006 et non pas avant« , a-t-il par ailleurs souligné.
Préconise-t ‘il encore le retrait militaire comme solution de paix ? « Il n’y a aucune ressemblance entre le Liban et Gaza, et encore moins avec la Judée-Samarie. Une grande partie des Israéliens veulent vivre pour toujours en Judée-Samarie car ils disent ‘c’est à nous, nous sommes liés à ces collines qui font partie de nos cœurs.‘ Nous n’avions pas l’intention de nous installer au Liban, donc c’était tout à fait justifié de se retirer. A Gaza, Sharon a fait quelque chose de juste à mon avis, car la réalité était distordue. »
Il réaffirme sa volonté de création d’un Etat Palestinien : « Concernant la Judée-Samarie, d’un point de vue sécurité, ma position est qu’il faut qu’il y ait deux états. Entre la Jordanie et la Mer, il y a 14 000 000 d’habitants, 9 000 000 d’Israéliens, 5 000 000 de Palestiniens. Si on a une seule unité nationale, Israël, elle sera obligatoirement soit non-juive, soit non-démocratique. Car si ce bloc de millions de Palestiniens, qui ont des aspirations nationales, votent pour la Knesset, le lendemain, on est dans un état binational et dans quelques années, Israël sera un état binational avec une majorité musulmane. Et s’ils ne peuvent pas voter, alors nous ne serions plus en démocratie : ce serait de l’apartheid juif, une honte ! »
Il conclut : « Notre intérêt, pour notre avenir, notre sécurité et notre identité, est de nous séparer. Définir les lieux. Tout ce qui est nécessaire pour la sécurité, nous devons le contrôler. Ce n’est qu’avec un état palestinien viable à nos côtés que nous arriverons à un bon équilibre. »
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