Stéphane Lilti, avocat de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), était l’invité de Olivier Issembert ce jeudi matin sur Radio J, à 8h50. Il est revenu sur l’obligation de Twitter à dévoiler ses outils de modération dans la lutte contre la haine en ligne.
Deux mois : voici le temps dont dispose Twitter pour dévoiler ses outils de modération dans la lutte contre la haine en ligne. Une décision prise lundi par la justice parisienne. Il faut également savoir que six associations avaient assigné la plateforme en mai 2020. Pour Stéphane Lilti, cette décision est unique parce qu’elle « affirme la primauté du droit français sur les conditions contractuelles de Twitter, société de droits américains qui se réserve contractuellement dans ses conditions générales de modérer les contenus racistes, antisémites et homophobes à la sauce américaine. Ils décident quel est le contenu qui peut ou pas être diffusé, sans prendre en considération les législations locales. La loi pour la confiance en l’économie numérique s’applique et elle impose, en droit français, aux plateformes et à tous les hébergeurs de concourir en termes légal à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et l’homophobie en mettant en œuvre et en publiant les moyens consacrés à cette régulation ».
Pour l’avocat, « Twitter est devenu une espèce de décharge à ciel ouvert. On peut trouver les choses les plus violentes. […] C’est vraiment aujourd’hui problématique et je pense qu’il fallait que la justice se donne les moyens et donne aux associations les moyens de comprendre et de faire un état des lieux de la situation pour influer sur la qualité du réseau ».
Il précise de surcroît que cette décision sera, pour les journalistes, « du pain béni [puisqu’ils pourront] comprendre, investiguer et vérifier la réalité des moyens. On va être en mesure d’actionner le levier puissant de l’opinion publique qui n’est pas près d’admettre que Twitter ne fasse rien. Il faut se rendre compte que Twitter c’est environ 5 000 salariés sur la planète ». Ces obligations sont également « contraignantes puisqu’ils doivent nous communiquer un certain nombre d’informations ». Si le réseau social ne les communique pas, « nous mettrons en œuvre des procédures d’exécution. Nous obtiendrons des astreintes financières et, surtout, nous dirons à l’opinion publique que Twitter ne respecte pas le pacte républicain […] Soit ils veulent jouer le jeu du respect de leurs obligations légales et aller exercer des droits de retour », soit ils ne jouent pas le jeu, « ce qui paraît le moins probable ».
Stéphane Lilti estime que « les lignes bougent depuis longtemps. Internet n’est pas une zone de non droit. Le Code pénal s’y applique. La seule difficulté c’est de pouvoir identifier les auteurs de ces propos. On a pu le faire dans l’affaire Mila car Twitter a coopéré. On voudrait que toutes les affaires soient traitées avec la même coopération ». Si cela devient le cas, cela va « permettre de rappeler les limites. […] Ce dont je suis persuadé, c’est que rappeler régulièrement quelles sont les limites à ne pas franchir c’est quand même sécuritaire ».
Cécile Breton (Radio J)