Hier, alors qu’Israël et le Monde Juif rendaient hommage aux 6 millions de victimes de la barbarie nazie, dans l’Est et l’Ouest de l’Allemagne défilaient en toute impunité des nostalgiques du IIIème Reich. Frappant sur des tambours comme le faisait la jeunesse hitlérienne et scandant : » les étrangers dehors, le nationalisme socialiste ici et maintenant ».
Ou brandissant des pancartes qui appelaient clairement à la destruction d’Israël. « Si l’Allemagne entend vraiment comme elle l’avance lutter contre l’antisémitisme, elle doit prendre des mesures drastiques et notamment ne pas autoriser ces manifestations publiques de haine qui rappellent les heures les plus obscures de l’histoire allemande » a réagi Joseph Schuster, le président du Conseil des Juifs d’Allemagne.

Nathalie Sosna-Ofir

LE PLUS. LAPRESS.CA

Soixante-cinq ans après la chute du Troisième Reich, les jeunes Allemands se sentent tout aussi concernés que leurs aînés par le nazisme, qu’ils regardent sans tabou, contrairement aux générations précédentes, torturées par la question de la culpabilité.

«Parce que la génération des criminels est en train de disparaître, les jeunes peuvent développer une saine curiosité, se demander ce qui s’est réellement passé», estime le psychanaliste allemand, Wolfgang Schmidbauer, auteur du livre Un pays – trois générations: psychodrame de la République fédérale.
D’après lui, la jeunesse allemande peut désormais s’intéresser beaucoup plus librement à cette période, car contrairement aux générations précédentes, elle n’a plus besoin de protéger la belle image qu’elle se fait de ses parents – ceux-ci étant eux mêmes trop jeunes pour avoir vécu sous le régime d’Hitler.
D’ailleurs, selon un sondage paru la semaine dernière dans l’hebdomadaire Zeit Magazin, sur le millier d’Allemands interrogés par l’institut TNS Infratest, ils reconnaissent plus que leurs aînés la culpabilité de leurs proches pendant le Troisième Reich.
Ainsi 78% des plus de 45 ans estiment que leur famille n’a rien fait de mal sous les nazis. Ils sont moins à le penser chez les 20-44 ans (68%) et encore moins chez les 14-19 ans (56%).
Avec eux, se tourne la page du refoulement collectif, déjà dénoncé dans les années 1968, mais malgré tout toujours présent dans la population.
«Les jeunes Allemands connaissent de façon bien plus exacte et beaucoup plus intensément l’époque du national-socialisme qu’il y a 20 ans», estime Rudolf Trabold, porte-parole du Musée d’histoire allemande à Berlin, qui montre la première exposition en Allemagne tentant d’expliquer comment un peuple déboussolé a vu en Adolf Hitler son «sauveur».
Moins d’un mois après son ouverture, elle connaît un succès phénoménal avec plus de 70 000 visiteurs, qui s’y rendent parfois en famille, grand-parents, parents et enfants, note M. Trabold.
Selon le sondage de TNS Infratest, 69% des 14-19 ans se disent très intéressés par l’histoire du nazisme, soit exactement le même pourcentage que toutes les tranches d’âge confondues.
Alors que 6 millions de Juifs ont été exterminés par les nazis, durant la Deuxième Guerre mondiale, l’Holocauste, largement étudié à l’école, était longtemps très peu évoqué dans les familles allemandes.
Selon une étude réalisée auprès de celles-ci et publiée en 2002 dans un ouvrage collectif intitulé Opa war kein Nazi (Papi n’était pas un nazi), les témoins de cette époque se bornaient la plupart du temps à évoquer la nuit de Cristal (le pogrom contre les Juifs du IIIème Reich, entre le 9 et 10 novembre 1938) ou le départ de camarades juifs de leur classe.
En revanche, rien n’était dit sur la spoliation des biens des Juifs, les déportations et les exterminations.
Dans cette mémoire sélective, les anciens affirmaient régulièrement n’avoir jamais rien su des camps, mais répétaient paradoxalement qu’ils craignaient en permanence y être envoyés, relève notamment ce livre.
Actuellement, des questions que personne n’osait poser auparavant surgissent. «Les jeunes s’interrogent beaucoup plus sur le profil des criminels», constate le porte-parole des camps de concentration du Brandebourg, Horst Seferenz.
Dans le camp de concentration de Oranienburg, situé en pleine ville, ils demandent comment les habitants ne pouvaient pas savoir. «Un sujet totalement tabou auparavant». Et ce d’autant plus qu’il se trouvait en RDA, où le régime, se voulant héritier des résistants communistes, fermait les yeux sur toute responsabilité dans les crimes nazis.
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