Malgré de vives critiques publiques à l’encontre d’Israël, au moins six États arabes (Egypte, Jordanie, Arabie, Emirats, Quatar, Bahrein) ont secrètement participé à un réseau de sécurité régional dirigé par les États-Unis, partageant des renseignements et des formations avec Israël sur la guerre des tunnels et la lutte contre l’Iran.
Tout en condamnant publiquement les opérations dans la bande de Gaza, les principaux pays arabes – Bahreïn, l’Égypte, la Jordanie, le Qatar, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis – ont intensifié leur coopération militaire avec Israël au cours des trois dernières années, allant même jusqu’à établir secrètement une structure de sécurité régionale coordonnée par l’armée américaine. C’est ce qu’ont révélé des documents américains classifiés obtenus par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et publiés aujourd’hui, 11 octobre, par le Washington Post.
Les documents, vérifiés par des archives officielles du Pentagone et d’autres sources ouvertes, montrent qu’au cours des dernières années, de hauts responsables militaires d’Israël et des six États arabes se sont rencontrés lors d’une série de réunions de planification facilitées par les États-Unis à Bahreïn, en Égypte, en Jordanie et au Qatar. Dans le cadre de ce processus, une structure de sécurité régionale a été créée, coordonnée par le Commandement central américain (CENTCOM), le Koweït et Oman étant cités comme partenaires potentiels du groupe.
Selon le Washington Post, cette collaboration a été alimentée par la menace commune posée par l’Iran et ses milices alliées, décrites dans un document comme l’« Axe du Mal ». Les présentations du Centcom, rédigées entre 2022 et 2025, décrivent des initiatives telles qu’un système régional de défense aérienne pour contrer les missiles et les drones iraniens, avec des exercices militaires coordonnés et le partage de données radar entre partenaires. En 2024, le Centcom a connecté avec succès de nombreux pays partenaires à ses systèmes, permettant l’échange d’informations via un réseau de communication sécurisé exploité par l’US Air Force. Un exemple notable, selon l’article, est la réunion de mai 2024 à la base aérienne d’Al Udeid, au Qatar, où des responsables israéliens ont discuté avec des représentants arabes. L’accès civil à la base a été refusé afin d’éviter d’attirer l’attention du public. La Structure de sécurité régionale envisage également la création d’un « Centre combiné de cybersécurité du Moyen-Orient » d’ici 2026 pour la formation aux opérations de cybersécurité, et d’un « Centre d’intégration de l’information » pour planifier et évaluer rapidement les opérations de guerre de l’information.
Ce qui a menacé de faire dérailler cette coopération a été l’attaque israélienne contre Doha, au Qatar, le 9 septembre. Les missiles, visant les dirigeants du groupe palestinien Hamas, n’ont été détectés ni par les systèmes radar américains ni par les systèmes radar qataris. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a présenté ses excuses pour l’attaque 20 jours plus tard, le 29 septembre, sous la pression de l’administration du président Donald Trump, promettant de ne pas répéter d’actions similaires. Cela a conduit au feu vert pour l’accord de paix conclu le 8 octobre entre Israël et le Hamas. Les États-Unis ont annoncé le 9 octobre l’envoi de 200 soldats américains en Israël pour soutenir l’accord de cessez-le-feu, aux côtés de troupes de plusieurs pays arabes participant au Cadre de sécurité régionale.
Selon les documents, avant même l’annonce, les pays arabes concernés avaient manifesté leur soutien au plan en 20 points du président Trump pour mettre fin à la guerre à Gaza. Ce plan prévoit la participation des États arabes à une force internationale chargée de former une nouvelle force de police palestinienne dans la région. Dans une déclaration commune, cinq des six pays ont affirmé soutenir la mise en place d’un mécanisme « garantissant la sécurité de toutes les parties », tout en évitant de s’engager publiquement à déployer des forces militaires. Les documents non classifiés ont été distribués aux partenaires de ce mécanisme et, dans certains cas, à l’alliance de renseignement « Five Eyes », qui comprend l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et les États-Unis. Les documents datent de 2022 à 2025, avant et après le début de la guerre israélienne à Gaza en octobre 2023.
LE PLUS. Secret Israel-Arab military cooperation during Gaza war revealed, leaked US documents show.
Despite harsh public criticism of Israel, at least six Arab states secretly took part in a US-led regional security network, sharing intelligence and training with Israel on tunnel warfare and countering Iran.