Un ancien complexe rituel a été mis au jour dans la partie la plus profonde et la plus sombre d’une grotte située dans ce qui est aujourd’hui le nord d’Israël.

D’après les scientifiques, des groupes d’Homo sapiens s’y sont rassemblés pour organiser des cérémonies aux flambeaux, probablement inspirées par des croyances mythologiques ou religieuses, il y a environ 37 000 ans, comme il a été rapporté le 9 décembre dans les Proceedings of the National Academy of Sciences.

La découverte de cette chambre spéciale dans la grotte de Manot dévoile la plus ancienne preuve connue de pratiques rituelles collectives au Moyen-Orient, affirment l’archéologue Omry Barzilai, de l’université de Haïfa, et ses collègues. Ils estiment qu’une centaine d’individus auraient pu tenir dans cet espace.

L’enceinte rituelle de la grotte de Manot ressemble à une grotte encore plus ancienne découverte en France. Les Néandertaliens ont construit des structures circulaires à partir de formations rocheuses brisées à l’intérieur de la grotte de Bruniquel il y a environ 176 500 ans, bien que l’on ne sache pas exactement quelles activités s’y déroulaient et les Néandertaliens européens et Homo sapiens ont également peint et dessiné sur les parois des grottes il y a 40 000 ans ou plus.

« Le souci apparent de créer un espace délimité dans les profondeurs d’une grotte est partagé [par les H. sapiens du Moyen-Orient] avec les Néandertaliens et les premiers Homo sapiens d’Europe », a déclaré l’archéologue Paul Pettitt de l’université de Durham, en Angleterre. Selon lui, les activités en dehors du quotidien, telles que les rituels auxquels participaient des groupes régionaux de chasseurs-cueilleurs, se déroulaient peut-être dans des grottes avant que l’on ne décore les parois de celles-ci.

Des outils en pierre, des os d’animaux dépecés et d’autres objets précédemment excavés à divers endroits près de l’entrée de la grotte de Manot indiquent des occupations humaines régulières il y a environ 46 000 à 33 000 ans. Cette période correspond à l’époque où des rituels collectifs se déroulaient au fond de la grotte. Des découvertes antérieures de fossiles placent H. sapiens dans cette grotte il y a au moins 50 000 ans.

L’activité dans la chambre rituelle date d’une époque où les artefacts dans les zones d’habitation montrent des influences de l’ancienne culture aurignacienne d’Europe. Les groupes aurignaciens se distinguent par leurs outils en pierre, leurs pointes en os, leurs perles et figurines en ivoire et leurs premiers exemples d’art rupestre. « Le complexe rituel de la grotte de Manot est associé aux populations aurignaciennes venues d’Europe, reflétant probablement leurs traditions rituelles établies », explique Barzilai et il a ajouté « L’excellente acoustique naturelle a fait de cette grotte un lieu privilégié pour les cérémonies de groupe« .

Une rangée de formations rocheuses naturelles élancées s’élevant du sol de la grotte monte la garde juste à l’extérieur de la chambre arrière de la grotte de Manot. Un rocher rond placé dans une niche juste à l’intérieur de la chambre présente des lignes gravées qui créent une représentation tridimensionnelle de la carapace d’une tortue, explique Barzilai. Les marques microscopiques à l’intérieur des rainures en forme de V indiquent que quelqu’un les a gravées sur le rocher à l’aide de pierres pointues.

Barzilai soupçonne que les rituels collectifs de la grotte de Manot tournaient autour de la réplique de la carapace de tortue. La signification spirituelle des tortues pour les anciens habitants du Moyen-Orient, qui collectionnaient ces créatures lentes pour compléter leur régime alimentaire, reste inconnue. Mais les carapaces de tortue apparaissent de plus en plus souvent dans les tombes d’individus importants de cette région vers la fin de l’âge de pierre.

Le groupe de Barzilai a estimé l’âge minimum de la gravure en analysant le taux de désintégration de l’uranium radioactif dans une fine croûte minérale qui s’est formée sur le bloc rocheux. Les chercheurs débattent actuellement de la précision de cette technique pour la datation des peintures rupestres. Une correspondance étroite entre la composition chimique de la croûte minérale et celle de formations rocheuses précédemment datées dans la grotte a permis de réduire l’estimation de l’âge entre environ 37 000 et 35 000 ans.

Une couche minérale qui s’était formée sur un bois de cerf trouvé sur le sol de la chambre a été datée à peu près de la même époque. Les chercheurs ont identifié plusieurs petites incisions faites par l’homme sur le bois.

Des particules de cendres de bois détectées dans une formation rocheuse à l’intérieur de la chambre indiquent que les visiteurs ont éclairé l’espace noir avec des torches car les enquêteurs n’ont trouvé aucun vestige de foyer.

Source : Science News & Israël News

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