La France est l’un des derniers pays occidentaux à avoir reconnu l’État d’Israël. Quand David Ben Gourion déclare l’indépendance en 1948, les États-Unis et l’URSS, dans une rare communion, le reconnaissent immédiatement, entraînant avec eux leurs alliés respectifs.

Mais la France, elle, temporise. Elle n’accordera sa reconnaissance de facto que huit mois plus tard, en janvier 1949, et sa reconnaissance de jure, c’est-à-dire définitive et complète, qu’en mai suivant, juste après l’entrée de l’État hébreu à l’ONU. Elle entraînera avec elle les pays du Benelux et le Royaume-Uni, qui sera suivi par les pays du Commonwealth.

Déjà, lors du vote du plan de partage, la France avait voté «oui» à l’arraché, sous la pression des Américains, alors que sa politique était plutôt celle de l’abstention jusqu’ici. Dans les deux cas, la France a souhaité maintenir un équilibre.

«À l’époque, la France avait la plus grande communauté juive d’Europe, mais aussi la plus large communauté musulmane, avec 25 millions de personnes dans les colonies» , rappelle l’historienne Frédérique Schillo, spécialiste d’Israël et auteur de La Politique française à l’égard d’Israël . Elle était «soucieuse de limiter les dégâts dans sa relation de plus en plus délicate avec ses dépendances arabes, départements ou mandats», abonde l’historien Dominique Trimbur dans Les relations franco-israéliennes, 1948-2004. En Algérie, le mouvement vers l’indépendance qui mènera à la guerre quelques années plus tard est notamment en pleine expansion à cette époque.

De fait, la France, pourtant à la tête du Conseil de sécurité de l’ONU à l’époque, ne condamnera pas l’attaque du Liban, de la Jordanie, de la Syrie, de l’Irak et de l’Égypte contre Israël, au lendemain de sa déclaration d’indépendance.

Elle tentera également, sans succès, de négocier sa reconnaissance, notamment en «cherchant une indemnisation pour les Palestiniens d’origine maghrébine qui ont fui pendant la Nakba» , et en «appelant au retrait de Tsahal du Sud-Liban», souligne Frédérique Schillo. Si la France reconnaît officiellement Israël par la suite, c’est dans une logique de blocs, à la veille d’élections capitales à la Knesset, où les travaillistes de Ben Gourion affrontent les communistes, soutenus par l’URSS, ajoute l’historienne.

La question de Jérusalem

Un autre paramètre explique la frilosité de la France sur ce dossier : Jérusalem. Dans le plan de partage voté à l’ONU, il était prévu que la ville sainte soit placée sous statut international. «La France y a des intérêts très importants pour les communautés chrétiennes et la sécurité des œuvres chrétiennes» , souligne Frédérique Schillo.

«Elle se présente toujours en Terre Sainte comme la fille aînée de l’Église» . Mais quand les États arabes refusent le plan de partage de l’ONU, et entrent en guerre contre Israël en 1948, ce plan tombe à l’eau. La France attend alors «de voir se réaliser l’internationalisation de Jérusalem», note Dominique Trimbur, qui y voit une explication au délai que la France laisse avant de reconnaître officiellement Israël.

 

Sauf qu’à l’issue des combats, la ville se retrouve finalement divisée en une zone israélienne et une zone jordanienne, sur lesquelles les Nations unies n’ont aucun contrôle. Lors des négociations pour la reconnaissance, la France avait également mis l’accent sur «la protection des œuvres françaises» , explique Frédérique Schillo. Là encore, sans succès.

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