Antisémites, souriez vous êtes filmés, par Raphaël Jerusalmy.
Antisémites, souriez vous êtes filmés. Et fichés par le département du Mossad consacré à la sécurité des communautés juives de par le monde. En 2018, ce département issu de l’unité de chasse aux anciens nazis a été doté d’un budget spécifique et de moyens technologiques lui permettant de détecter des menaces, surveiller des suspects, partager l’information avec les services de sécurité de nombreux pays, dont la France.
Cette surveillance s’exerce sur le web et les médias grâce au repérage de mots clefs utilisés par les haïsseurs d’Israël, tels que ‘génocide’, ‘apartheid’, ‘capitalisme juif’. Des algorithmes permettent ensuite d’évaluer la probabilité que ces propos entraînent des actes de violence. Auquel cas, les autorités locales sont alertées. Le problème est qu’il est juridiquement difficile d’établir le lien de cause à effet entre un discours haineux et le passage à l’acte criminel qu’il encourage. L’histoire nous montre pourtant que ce qui commence par des déclarations verbales, rumeurs et accusations, se poursuit par des actions physiques : autodafés et pogroms. Comme cela fut le cas pour la chasse aux anciens nazis, n’y a-t-il pas un devoir sécuritaire et moral de poursuivre ceux qui en sont les émules ?
Grâce à l’Internet des Objets.
L’IdO ou ‘Internet des Objets’ relie actuellement plus de 150 milliards d’appareils entre eux afin d’étudier et améliorer leur performance. Votre système d’alarme, par exemple, est connecté à une agence de sécurité ou au commissariat, mais aussi à votre microonde ou votre machine à laver. Et à tous les microondes et machines à laver du monde. Votre téléphone est constamment surveillé par les sites auxquels vous avez donné votre accord d’utilisation de vos données, que ce soit Google ou le livreur de pizzas du coin. Vous êtes sur écoute. Prononcez le mot ‘vélo’ plusieurs fois et vous recevrez des annonces publicitaires concernant les derniers modèles de bicyclettes. Vos données circulent, sont partagées, parfois manipulées. Et elles rejoignent la banque du Big Data, ou mégadonnées, dans laquelle on peut glaner des renseignements précis selon des critères algorithmiques définis. Dont celui qui vous classe comme antisémite, néo-nazi, islamo-gauchiste, radicalisé…
Tout a commencé en 1946, avec le système Échelon créé par les services secrets américains et britanniques pour l’obtention de ROEM, soit ‘renseignements d’origine électromagnétique’, appelé SIGINT en anglais (Signal Intelligence). Durant la guerre froide, le KGB s’est empressé de développer ses propres capacités pour détecter et observer les signaux radio ou satellites. Puis vint le tour des Chinois qui, aujourd’hui, sont les champions de la pénétration de votre vie privée et l’utilisation sauvage de vos données personnelles, par le biais de TikTok et autres programmes dits ‘malins’. Le domaine de prédilection de ces technologies est l’espionnage industriel. Vient ensuite l’ingérence clandestine dans la vie politique d’un autre pays par le truchement d’informations mensongères, de faux profils ou ‘bots’ créés de toutes pièces.
En fin de compte, l’espionnage classique pour raison de défense d’une nation est bien plus légitime que ces manigances du web pour faire de l’argent ou saboter un concurrent. Les récentes prouesses de l’Unité 8200 de Tsahal montrent quel niveau d’efficacité et de sophistication l’exploitation de signaux émis par des appareils peut atteindre. L’Internet des Objets permet désormais d’éliminer l’ennemi à distance, pénétrer les programmes du nucléaire iranien, détecter divers types de menaces. Dont la menace antisémite en diaspora.
Le grand vecteur de l’antisémitisme actuel est la toile. Les réseaux sociaux, mais aussi le ‘dark web’ (web caché), véhiculent des messages d’incitation à la haine ainsi que des conseils pour perpétrer des actes plus agressifs, voire des attentats. Mais la présence sur la toile rend l’antisémite visible, repérable, et par-là vulnérable. Il est dûment recensé et classé par les services informatiques compétents dont le souci est de prévenir le glissement fatidique de la propagation raciste vers un péril concret pour les communautés juives.
‘De la rivière à la mer’ est un appel au meurtre. Ceux qui le clament sont aujourd’hui fichés comme menace sécuritaire dont les victimes peuvent aussi bien être des étudiants juifs sur les campus que des gens portant une kippa dans le métro. C’est pourquoi l’antisémite actuel est sous haute surveillance. Au même titre que l’étaient les anciens nazis. Alors vous tous, ennemis du peuple juif, souriez. Vous êtes filmés.