Aujourd’hui, à Treblinka, à l’est de Varsovie, se trouve les restes d’un camp d’extermination où près de 900 000 personnes, presque toutes juives, ont été gazées entre 1942 et 1943.
Un site mémoriel, érigé en 1964 s’y trouve avec deux blocs de béton qui symbolisent l’entrée du camp et 17 000 pierres qui rendent hommage aux victimes dont les cendres reposent sous une chape de béton.
En treize mois, la dizaine de chambres à gaz de Treblinka a fait disparaître l’essentiel de la communauté juive de Varsovie et des villes environnantes, à laquelle s’ajoutent des Roms et des juifs de toute l’Europe. Une machine à tuer « particulièrement efficace », rappelle l’historien Zachary Mazur, affilié au Polin, le Musée de l’histoire des juifs polonais. « Il n’y avait que trente à soixante officiers présents sur place et un peu plus d’une centaine de prisonniers de guerre soviétiques, principalement ukrainiens. Et c’est aux prisonniers juifs qu’on confiait les tâches les plus abjectes autour des cadavres. »
C’est à une cadence quasi journalière que les trains arrivent jusqu’à une voie de contournement acheminant 6 000 à 8 000 personnes. Une cahute à proximité de la rampe de déchargement a été peinte pour imiter une gare, figurant une horloge irrémédiablement figée. Les passagers, bernés par la perspective « d’un transport à l’Est » étaient priés de laisser toutes leurs affaires à l’entrée. Puis rejoignaient les chambres à gaz à 80 mètres de là, sous prétexte d’une douche, où ils suffoquaient et mouraient en quelques minutes dans les émanations des moteurs diesel d’anciens chars soviétiques.
A la suite du soulèvement du ghetto de Varsovie en avril 1943, les prisonniers parvinrent à organiser une révolte qui ne permettra pas de mettre fin aux chambres à gaz, mais qui aura hâté la décision de fermer Treblinka II, définitivement abandonné en novembre 1943.
Les nazis prirent alors le soin de masquer méticuleusement toute trace de leur œuvre, démantelant les chambres à gaz, retournant la terre et installant une ferme sur les lieux. Pendant longtemps, la conviction qu’on « ne retrouverait rien a dominé », mais une étude menée en dans les années 2010 par Caroline Sturdy Colls, une chercheuse britannique, et des fouilles plus récentes, menées à l’été 2023, par une équipe polonaise sous l’égide de Sebastian Rozycki ont permis de retrouver des traces du camp. « On doit encore procéder à des analyses pour déterminer la présence d’oxyde nitrique, qui attesterait d’une combustion, mais on peut être sûr à 95 % qu’il s’agit bien de chambres à gaz », affirme le chercheur polonais.
« Les nazis ont certes voulu tout détruire, mais ils ont tout de même laissé un fragment de 30 centimètres de fondation à 70 centimètres du sol », remarque le chercheur, qui a également réussi à identifier où se trouvait le « lazaret », une fausse infirmerie où les juifs malades étaient exécutés sur-le-champ. « Toute trace matérielle des camps de la mort est importante et sert d’avertissement, d’autant plus que toute la documentation du camp ainsi que son infrastructure ont disparu », insiste Agnieszka Zolkiewska, historienne auprès de l’Institut historique juif.
Ces objets, que les bourreaux ont tenté à tout prix de dissimuler, pourraient se retrouver au centre de la future collection du musée de Treblinka, alors qu’un nouveau bâtiment devrait héberger d’ici 2025 une exposition plus complète que celle que renferment les deux petites salles actuelles.
Source : Le Monde (résumé par Israël Valley)