Le Koweït a interdit la sortie dans ses cinémas du grand succès mondial Barbie pour « atteinte à la morale publique », ont annoncé jeudi 10 août les autorités de cet État pétrolier du Golfe très conservateur. « La diffusion des films Barbie et Talk Two Me a été interdite », a annoncé Lafi Subaïei, président du comité koweïtien de la censure cinématographique, cité par l’agence de presse officielle Kuna.
« Scènes obscènes ».
La veille, le ministre libanais de la Culture Mohammad Mourtada avait annoncé avoir demandé l’interdiction de Barbie pour des raisons similaires. Dans un communiqué, il a estimé que le film, qui a dépassé le milliard de dollars au box-office mondial et devait être projeté au Liban à partir du 31 août, « va à l’encontre des valeurs morales et religieuses au Liban ». Barbie fait « la promotion de l’homosexualité et du changement de sexe, soutient le rejet de la tutelle du père, mine et tourne en ridicule le rôle de la mère et remet en question la nécessité du mariage et de la formation d’une famille », a énuméré le ministre libanais.
Au Koweït, avant de prendre leur décision, les autorités avaient demandé la « suppression de certaines scènes obscènes encourageant des comportements inacceptables », a-t-il assuré, sans donner de précisions sur les passages en question. La comédie de la réalisatrice américaine Greta Gerwig, avec les stars hollywoodiennes Margot Robbie et Ryan Gosling, met en scène l’emblématique poupée Mattel, s’aventurant toute de rose vêtue aux côtés de son petit ami maladroit Ken.
Une diversion politique au Liban.
La rhétorique anti-LGBT+ (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et autres) gagne du terrain au Liban, l’un des pays les plus libéraux du Moyen-Orient. Il est considéré plus « tolérant » que d’autres États arabes par rapport à l’homosexualité. Mais les institutions religieuses continuent d’exercer une influence majeure sur les affaires sociales et culturelles, et l’homosexualité reste sanctionnée par la loi.
Neuf députés ont présenté un projet de loi, le mois dernier, au Parlement pour décriminaliser l’homosexualité, mais ils ont été la cible d’une campagne de critiques. Le Liban a annulé à plusieurs reprises ces dernières années des activités de la communauté LGBT+, notamment sous la pression des autorités religieuses. L’an dernier, le film d’animation Buzz l’Eclair, où apparaît un couple de lesbiennes, y avait été interdit.
L’Arabie saoudite, à contre-courant
Plusieurs grosses productions américaines ont été accueillies avec un certain malaise au Moyen-Orient ces derniers mois, sur fond de visibilité grandissante des personnes homosexuelles et transgenres à Hollywood. Le principal distributeur du Koweït avait annoncé lundi 7 août l’interdiction par les autorités de Talk to me. Le film d’horreur australien met en vedette Zoé Terakes, acteur transgenre s’identifiant comme non binaire, mais ne contient aucune référence explicite au mouvement LGBT+. Sur les réseaux sociaux, Zoé Terakes avait qualifié cette décision de « déshumanisante » et « ciblée ».
Ailleurs dans le Golfe, Barbie et Talk to me sont actuellement à l’affiche en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis. Ces deux pays avaient pourtant eux aussi interdit des films contenant des références aux LGBT+. En juin, le film d’animation Spider-Man y avait fait l’objet d’une interdiction, à cause d’une scène où figurait selon eux un drapeau transgenre. Barbie n’est toujours pas diffusé au Qatar, qui n’a toutefois pas fait d’annonce officielle à ce sujet.