Les israéliens qui vont découvrir la Capitale française cet été ne le savent certainement pas…
Pourquoi Paris est-elle la ville la plus mortelle d’Europe en cas de pic de chaleur ?
SELON COURRIER INTERNATIONAL : Parmi les 854 villes étudiées par la revue scientifique “The Lancet”, la capitale française est celle qui présente la plus forte surmortalité liée à la chaleur. Pourquoi celle-ci est-elle plus mortelle à Paris que dans les villes du sud de l’Europe, où des plus fortes températures sont observées ? Explications en vidéo.
Alors que les fortes chaleurs s’enchaînent dans la capitale, entrecoupées d’épisodes orageux, une étude conduite par des chercheurs britanniques et publiée en mars par la revue The Lancet revient sur le devant de l’actualité. Consacrée à la surmortalité causée par les variations de température, l’étude classe Paris en tête des villes les plus mortelles d’Europe en cas de pic de chaleur. En tout, 854 villes de plus de 50 000 habitants ont été étudiées par les scientifiques.
Pour arriver à cette conclusion, ils ont analysé la surmortalité liée aux canicules pendant vingt ans, entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2019. La canicule de 2003, véritable désastre sanitaire qui avait coûté la vie à plus de 14 000 personnes en France, dont près de 5 000 en région parisienne, a donc été comptabilisée.
L’Europe de l’Ouest très affectée
Derrière Paris, la deuxième ville où la chaleur est la plus mortelle est Amsterdam. L’Europe de l’Ouest dans son ensemble se réchauffe d’ailleurs trois à quatre fois plus vite que le reste du monde, et c’est la région qui subit la plus grande surmortalité liée à la chaleur et au froid.
Contrairement à ce qu’on aurait pu imaginer, ce ne sont donc pas les villes du sud de l’Europe, où des pics de température plus élevés sont pourtant enregistrés, qui se placent en tête du classement. Si la chaleur parisienne est particulièrement dangereuse, c’est dû au phénomène de “l’îlot de chaleur urbain”.
La bétonnisation en cause
Ce phénomène correspond à la présence de dômes d’air chaud, observés dans les grandes villes en raison de plusieurs facteurs cumulés : d’abord, l’activité humaine y est plus intense, avec plus de circulation automobile et plus d’activité industrielle notamment. Ensuite, le sol y est très bétonné, or ce sont les espaces végétalisés qui permettent l’évapotranspiration, lorsque l’eau qui s’évapore des plantes refroidit l’air. À l’inverse, les surfaces minéralisées absorbent la chaleur, puis la rejettent la nuit par rayonnement infrarouge.
On peut aussi citer la densité des bâtiments, qui bloque la circulation de l’air, ou encore la climatisation qui rejette de la chaleur dans les rues. À Paris, plus de 80 % des sols sont artificialisés, et le phénomène d’îlot de chaleur urbain est donc particulièrement intense.
Une solution : la végétalisation
En conséquence, il y a parfois de très gros écarts de température entre la capitale et sa périphérie. Le 15 juin, par exemple, la température minimale enregistrée intra-muros était de 20,9 °C, alors qu’elle était de 9,5 °C à Fontainebleau, à une soixantaine de kilomètres de là. Un écart de plus de dix degrés, que l’on doit d’une part à l’îlot de chaleur urbain et, d’autre part, à l’effet rafraîchissant de la forêt.
Une mission d’information et d’évaluation intitulée “Paris 50 °C : s’adapter aux vagues de chaleur” a rendu ses conclusions en avril. Les préconisations sont claires : il faut végétaliser et débitumer la ville. Parmi les mesures proposées figurent la création d’une “placette oasis” dans chaque quartier, la rénovation thermique des bâtiments, ou encore l’interdiction des climatiseurs qui rejettent de la chaleur dans la rue.
“Nouvelle révolution haussmannienne”
Mais certains grands projets de constructions neuves vont à l’encontre de ces préconisations. C’est le cas par exemple de la “tour Triangle”, en cours de construction près de la porte de Versailles, qui fait l’objet d’une “bataille politique”, comme l’écrit Le Soir : certains élus Europe Écologie-Les Verts ont critiqué un projet “antiécologique au possible”, “révoltant”, tandis que l’adjoint PS à l’urbanisme de la mairie de Paris, Emmanuel Grégoire, salue une “excellente nouvelle pour l’attractivité de Paris et de notre pays”.
Pour Alexandre Florentin, chargé de la mission “Paris 50 °C”, adapter la Ville Lumière au changement climatique nécessite des transformations majeures. Il faudrait même, selon lui, “une nouvelle révolution haussmannienne”.