EDITORIAL. « Bouclier et flèche: Israël pose de nouvelles équations à Gaza ».

Daniel Haïk – i24NEWS.

 

L’opération « Bouclier et Flèche » est venue prouver que Benjamin Netanyahou avait retrouvé ses « bons vieux réflexes » de « Monsieur sécurité »

L’opération « Bouclier et Flèche » est terminée. Elle aura duré cinq journées. Et, en dépit de l’impact meurtrier de deux missiles et des tirs de vendredi matin vers la région de Jérusalem, elle peut être considérée comme un succès militaire pour l’armée israélienne, pour le Shin Beth, mais aussi pour un Benjamin Netanyahou qui, après cinq mois de passage à vide, semble avoir retrouvé certains des réflexes qui, par le passé, ont forgé sa popularité.

Voici, à chaud donc, les premières conclusions sécuritaires que l’on peut tirer de ce nouveau round de confrontation entre Israël et le Jihad Islamique à Gaza:

1. Restauration de la force de dissuasion de Tsahal 

A l’annonce de la mort en prison de Hader Adnan, le gréviste de la faim du Jihad islamique, la semaine dernière, la réaction d’Israël avait été timorée. Ce qui avait provoqué la colère de l’aile droite radicale du gouvernement Netanyahou…

L’opération « Bouclier et Flèche » est venue prouver que Benjamin Netanyahou était capable de retrouver les « bons vieux réflexes » qui avaient fait de lui dans le passé « Mr Sécurité ». Face au Jihad islamique, il a joué la carte de la surprise et donc de l’efficacité. Avec le concours très actif du Shin Bet, de Tsahal, et de leurs technologies époustouflantes, le Premier ministre a établi une nouvelle équation face au terrorisme palestinien : « C’est Israël qui décide quand il frappe. Plus les terroristes ». Et pour appuyer cette équation il a avancé son « arme fatale »: les éliminations ciblées. Celle des trois leaders du Jihad islamique, dans la nuit de lundi à mardi, a totalement pris de cours la direction du mouvement terroriste pro-iranien. Les trois autres chefs terroristes éliminés jeudi et vendredi au cœur de l’opération ont confirmé les étonnantes capacités de renseignement et de frappes chirurgicales dont Israël disposait et ont permis de déceler le maillon faible du Jihad islamique: l’imprudence de ses leaders. « Nous savons où vous êtes. Vous ne pouvez pas vous cacher. Nous vous poursuivrons », avait lancé Netanyahou dans son point de presse mercredi soir. Le Shin Bet et Tsahal ont confirmé.

Kobi Gideon (GPO)
Kobi Gideon (GPO)

Ces performances ont incontestablement consolidé la force de dissuasion israélienne, durement mise à l’épreuve, ces derniers mois, par la répétition des attentats terroristes. Le Dôme de Fer a prouvé son efficacité et neutralisé 95% des roquettes arrivées sur le territoire israélien, et Tsahal a même pu rendre opérationnelle sa « Fronde de David ». Même si le Jihad a voulu donné l’impression de « résister » en tirant plus d’un millier de roquettes sur Israël, dont quelques missiles de fabrication iranienne, il a concrètement essuyé plusieurs coups très durs: sa direction est décimée, certaines de ses infrastructures sont détruites. Et, à l’exception du tir meurtrier à Rehovot, il n’a pas obtenu le « moindre succès » sur le terrain, la seconde victime des tirs de roquette se trouvant être un travailleur palestinien présent en Israël.

2. Le Hamas en stand by 

Alors que, d’ordinaire, les gouvernements israéliens rendent automatiquement le Hamas responsable de toute roquette tirée à partir de Gaza, là encore, Netanyahou et les responsables sécuritaires ont voulu poser une nouvelle équation. Une équation dans laquelle le Hamas avait tout intérêt à ne pas prendre part à ce round de confrontation.

D’emblée, il était clair que l’entrée du Hamas bouleverserait la donne et amplifierait considérablement le conflit. De facto, le mouvement terroriste a verbalement soutenu le Jihad islamique, mais officieusement il est resté sur la touche. Yahya Sinwar, le leader du Hamas à Gaza, a compris que, dans la conjoncture actuelle, prêter main forte au Jjihad islamique risquerait de nuire considérablement à ses intérêts. Le Hamas d’Yahya Sinwar est un mouvement plus pragmatique, qui a réussi à calmer la vindicte populaire de 2019 (manifestations contre la hausse du coût de la vie) en obtenant du gouvernement Lapid-Bennett près de 20 000 permis de travail en Israël. Une coopération militaire avec le Jihad aurait signifié pour lui un risque d’hypothéquer cette stabilité et de précipiter son mouvement dans une spirale de violence qu’il ne souhaite pas… pour l’instant du moins. Concrètement, cette « passivité » du Hamas prouve aussi que la force de dissuasion israélienne fonctionne face au mouvement terroriste.

3. Le rôle de l’Iran 

Durant l’opération israélienne, l’Iran a joué un double jeu: d’un côté, les Iraniens ont pressé le Jihad Islamique de ne pas accepter un cessez-le-feu. Ils ont exercé leur pression sur le chef du mouvement Ziyad al-Nakhalah, alors qu’il se trouvait à Beyrouth, et celui-ci a répercuté les souhaits iraniens vers sa base, au grand dam des Egyptiens qui se sont efforcé de parvenir, avec le Qatar, à un arrêt des hostilités. Mais, de l’autre, les Iraniens ont pris soin de ne pas actionner leurs autres « proxys » dans la région: ni le Hezbollah au Liban, ni les milices pro-iraniennes déployées en Syrie que l’on avait vu s’agiter durant les fêtes de Pessah, n’ont bougé le petit doigt ! Cela signifie que, si l’Iran veut faire grimper la tension dans la région, il ne tient pas pour l’instant à ouvrir plusieurs fronts simultanément face à Israël. Insistons sur le « pour l’instant ». La Défense nationale israélienne en est pleinement consciente.

4. Les menaces à venir

Le front Sud devrait maintenant se stabiliser, mais pour combien de temps ? Selon certaines sources, le prochain défi sécuritaire d’Israël pourrait intervenir dès la fin de la semaine avec la Marche des drapeaux qui célèbre la réunification de Jérusalem. Il y a deux ans, ce rendez-vous avait marqué le point de départ de l’opération « Gardien des murailles ». C’est alors que le Hamas avait posé son équation liant Gaza et le mont du Temple à Jérusalem. C’est alors qu’il avait tiré des roquettes vers la capitale. Nous l’avons dit: Sinwar n’a pas d’intérêts à provoquer Israël. Mais, dans la région, ce qui peut paraitre stupide le dimanche peut s’avérer tout-à-fait cohérent le lundi dans une autre constellation. Le défi d’Israël sera de persuader le Hamas de ne pas revenir à des équations périmées.

Par ailleurs, les responsables sécuritaires n’auront certainement pas le temps de se reposer sur leurs lauriers: elles ont enregistré, durant l’opération « Bouclier et flèche », une augmentation sensible du nombre de menaces d’attentats terroristes en Judée et en Samarie. Et, concrètement, les unités d’élite de Tsahal ont poursuivi durant ces cinq jours leurs incursions audacieuses dans les fiefs terroristes de Jenine et Naplouse afin de neutraliser ces menaces.

5. La cohésion israélienne a fait ses preuves

Les Palestiniens ont une fois de plus mésestimé Israël : ils ont cru que les clivages, qui fracturent si durement la société israélienne autour de la réforme judiciaire, avaient affaibli la cohésion nationale. Ils ont interprété la protestation des réservistes et des pilotes de chasse comme un début d’effritement au sein de l’armée du peuple. Ils ont cru qu’Israël était en train de s’auto-saborder. Qui plus est, ils ont mal interprété la crise de confiance entre le gouvernement Netanyahou et l’administration Biden. Forts de ces interprétations, le Jihad a considéré que le moment était opportun pour frapper. Il s’est trompé. Comme Hassan Nasrallah s’était trompé en comparant la société israélienne à une toile d’araignée qui se disloque au vent. Ils n’ont pas compris que, face à ses ennemis, face à l’adversité, Israël savait retrouver ses réflexes d’unité.

DANIEL HAÏK. COPYRIGHTS.

Partager :