Alya, mot hébreu qui signifie ascension ou élévation. Il désigne aussi l’immigration des juifs de la diaspora en Israël. L’État israélien encourage fortement ce mouvement qui a tendance à s’accélérer parmi les juifs d’Europe, et de Belgique en particulier. L’attentat du musée juif de 24 mai 2014 fut l’un des événements qui a poussé certains à partir, même si la tendance n’est pas massive au sein de la communauté.
Comment cela se passe-t-il lorsqu’ils arrivent en Israël ? Certains jeunes y vont pour servir dans l’armée israélienne. D’autres habitent dans des colonies, en territoire palestinien. Et puis, l’installation dans un pays très différent de la Belgique peut réserver des surprises. Nous sommes partis à leur rencontre.
Jets de pierres et crachats
Yaniv Wygodzki a franchi ce cap il y a 8 ans. Il a grandi à Bruxelles jusqu’à l’âge de 19 ans, scolarisé dans une école juive, et a fréquenté les mouvements de jeunesse juifs. Il habite désormais dans une cité proche de l’aéroport Ben Gurion, à Lod.
Adolescent, il est régulièrement venu voir sa famille en Israël pendant les vacances. « On se sent à notre place ici, comme à la maison, explique-t-il. Du coup, à 19 ans, j’ai quitté la maison, j’ai quitté la Belgique pour venir ici. C’est plus facile en tant que juif pratiquant de pouvoir sortir avec la kippa, sans que les gens nous regardent bizarrement, sans me prendre des jets de pierres comme ça m’est arrivé plusieurs fois à Bruxelles. C’est une sensation de liberté de pouvoir sortir dans la rue sans crainte. »
Yaniv se souvient que, enfant, il se baladait à Bruxelles kippa sur la tête sans problème. « Avec le temps, ça s’est beaucoup dégradé. À tel point que la direction de mon école nous interdisait d’utiliser la station de métro la plus proche, parce qu’il y avait trop d’agressions. Nous devions aller dans une plus grosse station, plus loin, pour nous fondre dans la masse sans être reconnus comme les étudiants de l’école juive et être pris à partie. »
« C’est un sentiment très désagréable : on vit chez nous, on a grandi en Belgique, nous sommes des citoyens comme tout le monde, mais il est impossible de se promener en rue sans être sur un qui-vive permanent, cacher sa kippa sous une casquette, devoir changer de trottoir pour éviter les jets de pierres et les crachats… Ce sentiment d’insécurité, à la longue, c’est lassant. Il y a des vagues aussi, liées à la situation en Israël : dès que ça chauffe ici, il y a des répercussions à Bruxelles et dans le monde entier. Le simple fait d’être identifié comme juif constitue alors un danger. »
« On construit l’avenir de nos enfants ici »
À 53 ans, Michel Pardès vient, lui, de quitter sa Belgique natale pour s’établir à Ramot, un confortable quartier résidentielle proche de Jérusalem. Bientôt, il emménagera dans la maison qu’il y fait construire. Il revient très régulièrement en Belgique pour ses affaires. Mais ses enfants grandiront et seront scolarisés en Israël.
Sa première motivation pour faire son Alya est sécuritaire : « Ne pas pouvoir vivre en Belgique notre différence de manière libre et acceptée, devoir fréquenter des écoles qui sont des bunkers, aller dans des synagogues super-protégées, écouter diaboliser Israël à longueur de journée« .
Tout cela lui était devenu insupportable. « C’est le résultat d’une démarche qui a débuté il y a des années. Ce qui a accéléré le processus, c’est la naissance de mes enfants, vu la réalité qui est la nôtre, en tant que juifs, à Bruxelles. Je me suis dit que ce n’était pas une bonne idée de continuer à vivre en Belgique et d’y faire grandir mes enfants. C’est vraiment une rupture : on construit l’avenir de nos enfants ici, en Israël. »
285 Belges ont immigrés en 2015
Yaniv et Michel sont deux exemples de ces juifs de Belgique qui font leur Alya. Selon l’Agence juive, la communauté belge est évaluée à 35 000 (ils sont venus s’installer en Israël).
Ils sont accueillis à bras ouverts. Il existe, entre autres, une association des Originaires de Belgique en Israël (OBI). Le président d’OBI, Sally Zajfman, constate également une accélération du mouvement d’immigration : il pense même que le chiffre a atteint 300 immigrants en 2015, alors que la moyenne tournait autour de 80 personnes au début des années 2000.
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