Israël se refuse à pratiquer le « 996 », soit des journées de travail de 9 heures à 21 heures, 7 jours sur 7.

Par |2025-12-26T06:16:14+01:0026 Déc 2025|Catégories : JOBS|

La Silicon Valley à marche forcée vers le rythme de travail 996 importé de Chine. En Israël cela est loin d’être le cas. Nous n’avons pas trouvé en Israël ce fameux 996.


Dans un secteur longtemps connu pour ses douillets avantages, certains dirigeants de startups exigent désormais de leurs équipes de faire des semaines de 72 heures. À prendre ou à laisser. En Israël il est rare de trouver ce fameux 72 heures.
Silicon Valley

SELON VANITY FAIR: « Seriez-vous travailler quasiment le double de la durée légale du temps de travail ? C’est la question que posent aujourd’hui nombre de startups américaines à leurs candidats à l’embauche. Et pour décrocher le job, mieux vaut répondre sans sourciller par l’affirmative. Ces jeunes entreprises adoptent un rythme intensif, pratiqué en Chine, connu sous le nom de « 996 », soit des journées de travail de 9 heures à 21 heures, six jours sur sept. On vous épargne le calcul : la durée du temps de travail grimpe donc à 72 heures.

Pourtant, même en Chine, le phénomène 996 a donné lieu à des manifestations d’ampleur et des accusations d’« esclavage moderne », ses détracteurs l’accusant d’avoir provoqué une vague de décès au travail. Cette mauvaise presse ne semble pas émouvoir plusieurs entreprises américaines – beaucoup spécialisées dans l’intelligence artificielle – qui en adoptent à la fois l’emploi du temps et le petit nom, galvanisées par la course à l’innovation… et par la compétition avec la Chine. Adrian Kinnersley, entrepreneur en série à la tête d’une société de recrutement et d’une startup spécialisée dans la conformité RH, dit être frappé par le nombre de startups qui embrassent totalement le 996. « C’est de plus en plus courant, confie-t-il. Nous avons plusieurs clients pour lesquels accepter de travailler en 996 est une condition sine qua non pour ne serait-ce que décrocher un entretien. »

« Extrêmement hardcore »

Au début de la pandémie de Covid, les discussions concernant les conditions de travail aux États-Unis tournaient beaucoup autour du burn-out et de la nécessité d’une plus grande flexibilité. Même dans le secteur technologique, réputé pour son intensité, les entreprises mettaient en avant des efforts pour favoriser un meilleur équilibre de vie. Aujourd’hui, le bond en avant du 996 montre que le pendule bascule dans l’autre sens. Cette évolution n’est pas sans rappeler l’ultimatum « extrêmement hardcore » lancé par Elon Musk aux employés de X, les incitant à travailler des heures éprouvantes.

Les candidats volontaires sont pourtant loin d’être rares, alors même que certaines entreprises présentent ce mode de vie comme l’essence même de leur culture interne. Rilla, une startup d’IA qui vend un logiciel permettant aux artisans (comme les plombiers) d’enregistrer leurs conversations avec des clients potentiels pour les coacher dans la négociation, affirme que l’ensemble de ses 80 employés ou presque suit le rythme 996.

La Gen Z, Bill Gates et Kobe Bryant

« Il existe une sous-culture très forte et croissante, surtout dans ma génération – la Gen Z –, qui a grandi avec les histoires de Steve Jobs ou Bill Gates, ces entrepreneurs qui ont consacré leur vie à bâtir des entreprises qui changent le monde, explique Will Gao, responsable de la croissance chez Rilla. Kobe Bryant a dédié toutes ses heures éveillées au basket, et je ne crois pas que beaucoup de gens diraient aujourd’hui qu’il n’aurait pas dû travailler aussi dur. »

Rilla affiche ses exigences sans détour. Dans ses offres d’emploi, l’entreprise précise explicitement que les collaborateurs doivent dépasser les 70 heures hebdomadaires, les avertissant de ne pas postuler s’ils ne sont pas « enthousiastes » à l’idée d’un tel emploi du temps. Petit-déjeuner, déjeuner et dîner sont fournis au bureau tous les jours, même le samedi.

Amrita Bhasin, directrice générale de la startup logistique d’IA Sotira, estime qu’adopter le 996 est courant chez les startupeurs de la Bay Area : « Les deux premières années, on est un peu obligé de faire du 996 », dit-elle. Si elle juge cette charge de travail incontournable pour les dirigeants, elle ne pense pas qu’il soit juste de l’imposer aux employés : « Je ne crois pas que ce soit équitable d’attendre cela d’eux. »

Certains fondateurs présentent donc l’emploi du temps comme une option réservée aux plus dévoués, créant une structure à deux vitesses où seuls certains employés sont censés travailler davantage. Ritchie Cartwright, fondateur de la société de télémédecine Fella & Delilah, basée à San Francisco, a récemment partagé sur LinkedIn un message envoyé à ses équipes, décrivant ses efforts pour faire passer une partie de son personnel au 996. Pour les convaincre, Fella & Delilah offre une augmentation de salaire de 25 % et un doublement des parts en actions. Moins de 10 % du personnel aurait accepté, selon le post LinkedIn (Cartwright n’a pas souhaité répondre à nos demandes de commentaire).

996 vs 007

En 2021, après des années de critiques croissantes de la part des travailleurs, le gouvernement chinois a haussé le ton au sujet de la pratique du 996, illégale en théorie mais rarement sanctionnée. Bien qu’encore très répandu dans le secteur technologique, le modèle a été officiellement abandonné par certaines entreprises.

Mais le 996 semble pourtant gagner du terrain à l’échelle mondiale. Cet été, le capital-risqueur britannique Harry Stebbings a ravivé le débat en affirmant que le 996 ne suffisait peut-être plus et que les startups réellement ambitieuses devaient aller encore plus loin. « La vérité, c’est que la Chine fait désormais du 007, minuit à minuit, sept jours sur sept, avec une rotation des équipes, explique-t-il. Si vous voulez créer une entreprise à 100 millions de dollars, vous pouvez le faire sur cinq jours par semaine. Mais pour bâtir une entreprise à 10 milliards, vous devez travailler sept jours sur sept. »

Selon Stebbings, les entreprises américaines et leurs collaborateurs sont aujourd’hui bien plus enthousiastes à cette idée que leurs homologues européens. « Les Européens ont l’air choqués dès qu’on leur demande de travailler le week-end, » dit-il.

Adrian Kinnersley, l’entrepreneur spécialisé dans le recrutement, se dit quant à lui alarmé par le nombre d’entreprises prônant le 996 tout en étant « totalement non conformes » au droit du travail américain. Si une partie des employés du secteur technologique peut être exemptée d’heures supplémentaires, il affirme avoir vu des entreprises aller jusqu’à ignorer les classifications contractuelles. « La Californie est l’épicentre de l’IA, là où cette culture 996 prend de l’ampleur, et c’est l’État le plus protecteur pour les employés dans tout le pays, dit-il. Il existe une sorte d’hystérie dans la course à la création de produits d’IA, et beaucoup de jeunes talents, brillants mais pressés, oublient les risques et les immenses responsabilités qu’ils prennent. »

Malgré ses réserves, il ne voit pas ce mode de travail près de disparaître aux États-Unis : « Je viens d’enregistrer le domaine 996careers.com. »

Initialement publié par Wired

Partager :

Partager cet article, Choisissez votre plateforme !

Aller en haut